Balthasar, roi mage

24 décembre 2020
Crèche de Kamenesky (1783) au Museu Nacional de Arte Antiga de Lisbonne

C’est après le décès de l’apôtre Matthieu que fut écrit en grec l’évangile qui porte son nom.

Au chapitre deux, dans le récit de la naissance de Jésus de Nazareth, l’évangéliste fait la première mention de ce qu’on appelle aujourd’hui ‘les rois mages’.

Jésus était né à Bethléem en Judée, au temps du roi Hérode le Grand.

Or, voici que des mages venus d’Orient arrivèrent à Jérusalem et demandèrent : « Où est le roi des Juifs qui vient de naitre ? Nous avons vu son étoile à l’orient et nous sommes venus nous prosterner devant lui.»
(…)
Après avoir entendu le roi, ils partirent. Et voici que l’étoile qu’ils avaient vue à l’orient les précédait, jusqu’à ce qu’elle vienne s’arrêter au-dessus de l’endroit où se trouvait l’Enfant.

Quand ils virent l’étoile, ils éprouvèrent une très grande joie.

Ils entrèrent dans la maison, ils virent l’Enfant avec Marie, sa mère. Et, tombant à ses pieds, ils se prosternèrent devant lui. Ils ouvrirent leurs coffrets et lui offrirent leurs présents : de l’or, de l’encens et de la myrrhe.

Le nombre de ces mages n’est pas précisé. Ni leurs noms. Ni leur occupation.

Aucun des trois autres évangiles chrétiens n’en parle.

Dans l’évangile selon saint Matthieu, le mot grec utilisé pour les décrire (μάγοι) se prononce ‘mágos’ — l’accent tonique est sur le ‘a’ — et signifie ‘magicien’.

En raison des présents luxueux qu’ils apportèrent, on leur prêta une origine royale au IIIe siècle. Peu de temps après, le théologien Origène (un des pères de l’Église chrétienne) déduisit leur nombre à partir du nombre de leurs présents.

Vers le VIIIe siècle, on les nomma Gaspard, Balthazar et Melchior.

Portail de l’église priorale Notre-Dame-et-Sainte-Croix (milieu du XIIe siècle)

Au VIIIe siècle, un texte attribué à un moine anglais précisa un peu l’aspect des rois mages; Gaspar est imberbe et rose de peau, Balthasar y est décrit comme un barbu au visage sombre, et Melchior est un vieillard barbu aux cheveux blancs.

En somme, les rois mages symbolisaient des trois âges de la vie. En plus de représenter l’Humanité tout entière rendant hommage à l’Enfant Jésus.

Très lentement, cette conception des rois mages se répandit dans toute l’Europe.

L’Adoration des Mages (XVe), de Giovanni Boccati

C’est le cas, par exemple, de cette œuvre du XVe siècle où nous avons atténué les couleurs des personnages secondaires.

Toutefois, dans son Historia Trium Regum, paru en 1375, l’écrivain et frère carmélite Jean de Hildesheim fit de Balthasar un roi éthiopien (donc africain), descendant de la reine de Saba.

Dès lors, Balthasar cesse d’être simplement un adulte à la peau hâlé pour devenir très précisément un ‘Noir’.

Mais il faudra attendre l’âge des grandes découvertes maritimes — alors que des aventuriers européens entrent en contact avec des peuples d’aspect très différent d’eux — pour que des artistes de la Renaissance apprennent comment représenter correctement les Humains à la peau très pigmentée.

L’Adoration des Mages (~1461) d’Andrea Mantegna
Tiré du Livre d’heures de la Vierge selon l’usage romain (France, 1524)

C’est alors que la représentation artistique de Balthasar se fixe définitivement sous les traits d’un Africain.

Références :
Évangile de Jésus-Christ selon saint Matthieu
L’invention des races humaines
Myrrh mystery: how did Balthasar, one of the three kings, become black?
Rois mages

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Écrit par Jean-Pierre Martel