La fenêtre et le gardien de sécurité

26 mars 2013

Carnavalet
 
Il y a tellement de choses intéressantes à voir à Paris qu’on ne peut pas tout visiter. Ayant décidé d’y passer mes trois semaines de vacances à l’automne de 2003, j’avais choisi d’ignorer le Musée Carnavalet, dédié à l’histoire de la capitale française.

Mais à la fin d’une journée d’octobre, j’étais dans le Marais (il s’agit d’un quartier autrefois marécageux), la lumière commençait à baisser et un jour de semaine à 17h, il est un peu tard pour entreprendre la visite de quoi que ce soit.

Mais je passais à côté de ce musée. C’était gratuit. Il était ouvert encore une heure. Alors pourquoi ne pas y faire un tour…

D’un pas alerte au début — mais qui se ralentit dès que je compris l’intérêt de ce musée — je passais devant des toiles représentant des endroits de Paris que j’avais visités. C’était fascinant de voir dans quelle mesure la capitale française avait peu (ou beaucoup) changée au cours des siècles.

Fouquet MuchaEt toutes ces boiseries et lambris d’intérieurs luxueux sauvés du pic des démolisseurs ou des rénovateurs zélés (dont les comptoirs Art nouveau de la bijouterie Fouquet dessiné par Alphonse Mucha, ci-contre), ces portraits de personnages illustres qui y ont habités, etc.

Bref, c’était beaucoup plus intéressant que ce que j’avais imaginé.

Quand tout à coup, je passe devant une fenêtre au travers de laquelle je vois une cour extérieure charmante, celle qu’on voit au début du texte. Puisqu’il est permis de photographier dans ce musée, je sors mon Canon Powershot G6, l’appareil que j’utilisais à l’époque.

FenêtreProfitant de l’absence de gardien, j’approche lentement mon appareil de la fenêtre ci-contre. Je dépose délicatement l’objectif métallique sur le verre et au moment précis où j’appuie sur le déclencheur, j’aperçois du coin de l’œil un gardien qui s’approche de moi rapidement.

Aussitôt, j’imagine ce gardien élever le ton et me dire quelque chose du genre : « Monsieur ! Cette fenêtre est du ixième siècle. Elle est classée monument national. Mme de Sévigné, elle-même aimait s’y appuyer pour contempler le soir couchant. Comment pouvez-vous… »

Alors que dans ma tête tourbillonnent les justifications que je pourrais invoquer, je suis étonné d’entendre le gardien s’excuser puis, alors que je me recule, m’ouvrir sans que je le demande cette fenêtre pour me permettre de prendre une meilleure photo.

Évidemment, je m’exécute aussitôt et, ravis, je remercie le gardien de mon plus beau sourire.

L’année suivante, j’étais revenu dans ce musée afin de remettre à ce gardien les photos que j’avais prises de Paris un an plus tôt. Mais je ne l’ai pas trouvé.

En repensant à ce fait divers, je me suis toujours demandé : si j’étais gardien de sécurité au Musée des Beaux-Arts de Montréal et qu’un touriste américain me demandait de lui ouvrir une fenêtre afin de lui permettre de photographier la rue Sherbrooke, serais-je aussi accommodant ?

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Écrit par Jean-Pierre Martel