
Introduction
Partout à travers le monde, le nom des stations de métro adopte harmonieusement la toponymie des lieux. La station de métro Berri-UQÀM s’appelle ainsi parce qu’elle débouche sur la rue Berri, près du pavillon principal de l’Université du Québec à Montréal UQÀM).
Il s’agit donc d’un indice donné aux passagers qui désirent de se rendre là. Comme c’est le cas de la station Université de Montréal ou Place Victoria.
Actuellement, l’immense majorité des noms de stations du métro de Montréal font référence aux rues sur lesquelles elles débouchent.
Cette cohérence sera rompue par les recommandations d’un comité formé d’activistes mis sur pied afin de choisir les noms des futures stations de métro de la ligne bleu.
Dans le passé, nous avons souligné sur ce blogue l’incompétence d’Éric-Alan Caldwell, responsable de la mobilité de Projet Montréal, muté à la présidence de la Société de transport de Montréal (STM) après le fiasco des trottinettes Lime (première version), dont il était responsable.
À l’annonce des noms des futures stations, celui-ci déclarait :
Plutôt que de faire comme avant et adopter les noms des rues, ce seront les rues qui adopteront les noms des stations de métro.
Vraiment ?
La station Vertières
À titre d’exemple, la nouvelle station à l’intersection de la rue Jean-Talon et du boulevard Pie-IX portera le nom de Vertières, du nom d’une bataille importante survenue à Haïti.
Si on en croit ce bon M. Caldwell, l’une ou l’autre de ces voies publiques devra changer de nom. Ce qui n’arrivera pas en raison du jeu de dominos qui affecterait notamment les stations Jean-Talon et Pie-IX (qui existent déjà).
Il aurait été plus simple de nommer cette nouvelle station Pie-IX Nord ou Pie-IX – Ligne bleue et d’ajouter au nom de l’actuelle station Pie-IX, le suffixe descriptif Sud ou Ligne verte.
La mairesse sortante, Valérie Plante, a avoué candidement s’être ingérée politiquement dans le travail du comité afin de s’assurer qu’on avait une forte représentation des femmes, sous-représentées dans l’espace public. ‘Je veux continuer à façonner ce Montréal féministe, pluriel et cosmopolite’ a-t-elle déclaré.
Le cosmopolitisme de Mme Plante vise à diluer les caractéristiques propres de la société québécoise, voire à les effacer, au profit d’un internationalisme niais.
Rares sont les stations de métro qui n’ont qu’une seule sortie. Ne pourrait-on pas prétexter la sortie sur une rue secondaire portant le nom d’un saint (ils sont légion à Montréal) pour ‘rebaptiser’ cette rue et du coup, donner ce nom à cette nouvelle station, plutôt que d’honorer une bataille survenue dans un pays étranger ?
À défaut, puisons dans notre riche passé pour honorer les grandes bâtisseuses et les grands bâtisseurs québécois.
La station Mary Two-Axe-Earley
Controversée au sein même de sa communauté, Mary Two-Axe-Earley est une militante mohawk née au Québec qui, de la partie américaine de la réserve de Kahnawake où elle a passé presque toute sa vie, a contesté avec succès l’apartheid juridique du Canada envers les Autochtones.
Cette station sera située à l’intersection de la rue Jean-Talon et de la rue Viau. Ces deux noms doivent demeurer.
Jean Talon (1626-1694) fut une des personnes les plus importantes de l’histoire du Québec.
De son côté, l’entrepreneur montréalais Charles-Théodore Viau fonda en 1867 une biscuiterie à son nom. Il l’a créée à l’époque où le milieu de la finance (les banques en particulier) étaient hostiles à l’entrepreneuriat des francoQuébécois.
Au risque de manquer de rectitude politique, rappelons que ce n’est pas les Mohawks qui paient pour le métro de Montréal. En conséquence, entre nos héros et les leurs, on choisira les nôtres… tout en encourageant les Mohawks à honorer la mémoire de Mary Two-Axe-Earley en donnant son nom à une de leurs rues, une de leurs places publiques ou un de leurs centres communautaires. Ce qu’ils tardent à faire.
L’impérialisme culturel consiste, entre autres, à vouloir imposer aux autres les héros qui correspondent à notre vision de la modernité.

Quant à la culpabilisation qu’on tente de susciter chez nous en répétant faussement que la ville Montréal s’est construite sur un territoire volé aux Mohawks, c’est une des inepties que répète une mairesse qui n’a jamais fait la différence entre deux membres différents de la famille linguistique iroquoienne, soit les Iroquoiens du Saint-Laurent (un peuple éteint) et les Iroquois (ou Mohawks, qui vivaient dans le nord de l’État de New York actuel).
La station Césira-Parisotto
Césira-Parisotto (appelée mère Anselme) est une Québécoise qui mérite amplement qu’une station de métro porte son nom.
Puisque la rue Lacordaire (desservie par cette nouvelle station) honore un dominicain français qui n’a jamais œuvré au Québec, je ne serais pas surpris d’apprendre que cette rue a été percée sur des terres appartenant aux Dominicains et que ceux-ci les ont cédées à la condition que la nouvelle rue porte son nom.
Toutefois, si aucun obstacle juridique ne s’y oppose, ce changement de nom est le bienvenu.
La station Madeleine Parent
Marie Parent est une syndicaliste montréalaise qui, elle aussi, mérite qu’une station porte son nom. Celui-ci remplacera le nom du boulevard Langelier.
Ce boulevard honore François Langelier (1838-1915), ministre québécois d’importance secondaire, nommé juge par Ottawa puis représentant la monarchie britannique au Québec. Bref, un collabo du régime colonial canadian. Le reléguer à l’oubli est tout ce qu’il mérite.
Après l’indépendance, nous n’aurons pas à faire disparaitre son nom; ce sera déjà fait.
La station Anjou
Rien à dire.
Conclusion
Les propriétaires des commerces dont la raison sociale indique le nom de la rue sur laquelle leur établissement est situé ont appris la nouvelle hier.
Fidèle à son habitude, l’administration de Projet Montréal ne les a pas consultés.
De plus, la ville n’a pas annoncé de compensation financière à ceux qui se sentiront obligés de changer la raison sociale de leur commerce afin qu’elle demeure signifiante.
Cette manière cavalière d’agir est typique de Projet Montréal, soit d’agir par le moyen d’un comité anonyme d’activistes qu’il a nommés et dont il n’hésite pas à orienter les conclusions.
D’autre part, le multiculturalisme est le tribalisme des sociétés anglo-saxonnes.
Le clientélisme de Projet Montréal — en promettant des nananes à différentes communautés ethniques — en est l’expression.
L’accent porté à l’origine ethnique contribue à enraciner son importance en tant que facteur identitaire. D’où les affrontements interethniques qui se multiplient en Occident puisque toute diaspora est alors jugée coupable des actes répréhensibles commis par leurs semblables à l’Étranger.
En reconnaissant ouvertement que Vertières a été choisi pour plaire à la communauté haïtienne de Montréal, que Mary Two-Axe-Earley a été choisie parce qu’Autochtone, et Césira-Parisotto pour plaire à la communauté italo-montréalaise, Projet Montréal est fidèle à ce tribalisme multiculturel.
Le nationalisme québécois a le vent dans les voiles. Ce qui entraine qu’un nombre croissant de personnes pensent qu’on doit honorer les personnes méritoires, indépendamment de leurs origines, pour leur contribution à bâtir le Québec, et non pour s’attirer les votes de la communauté ethnique à laquelle ils appartiennent.
Finalement, tout cela doit se faire sans chercher à reléguer à l’oubli ceux dont les noms rappellent ces géants que furent nos ancêtres et qui, depuis la Renaissance, ont façonné ce qui deviendra bientôt, je l’espère, la première république laïque et égalitaire digne du XXIe siècle.
Références :
Boulevard Langelier
La STM dévoile les noms des nouvelles stations de la ligne bleue
Le multiculturalisme ou le tribalisme des sociétés anglo-saxonnes
Les noms des cinq futures stations de métro dévoilés
Madeleine Parent, syndicaliste, féministe, citoyenne engagée
Mary Two-Axe Earley
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