Arabes vs Musulmans

Publié le 16 février 2011 | Temps de lecture : 2 minutes

Être Arabe, ce n’est pas une question de religion, ni de race : c’est une question de langue. Toute personne dont la langue maternelle ou dont la langue principale est l’arabe, se définit comme un Arabe.

De manière analogue, les pays dont la langue officielle est l’arabe (en vert foncé sur la carte ci-dessus) et ceux dont l’arabe est une des langues officielles (en vert pâle) constituent les pays arabes.

© 2008 — Keteracel (pour Wikipedia)

En Turquie, on parle le turc : ce n’est donc pas un pays arabe, malgré le fait que la très grande majorité de sa population soit musulmane. Alors qu’on parle arabe en Irak, ce n’est pas le cas en Iran. Dans celui-ci, on parle perse : l’Iran n’est donc pas un pays arabe non plus.

À l’est de l’Iran se trouve l’Afghanistan. Ce pays n’est pas un pays arabe puisque les Afghans parlent l’afghan. Cette langue correspond au perse classique alors que la langue perse moderne, celle parlée en Iran, est truffée de très nombreux mots étrangers dont celui pour dire merci et qui se prononce : « merci » (exactement comme en français).

Tous les pays arabes sont musulmans. Mais l’inverse n’est pas vrai. De nombreux pays sont musulmans sans qu’on y parle l’arabe. En plus de la Turquie, de l’Iran, du Pakistan et de l’Afghanistan, c’est notamment le cas de l’Indonésie.

Au total, l’Islam comptait 1,57 milliard de fidèles en 2009. Dans la carte ci-dessous, en vert sont représentés les pays à majorité sunnite, et en brun ceux à majorité chiite.

© 2010 — MacedonianBoy (pour Wikipedia)

Dans une vingtaine d’années, alors que cette planète sera partagée entre deux clans rivaux (pays occidentaux vs Chine), l’immense population musulmane pourrait très bien jouer un rôle déterminant. Si tel est le cas, de quel côté penchera-t-elle ?

Compléments de lecture :
Impopularité d’Al-Qaida chez les Musulmans
La lapidation ou la barbarie participative
Les boucs-émissaires
Nourriture halal : controverses futiles

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Les Musulmans et Al-Qaida

Publié le 20 janvier 2011 | Temps de lecture : 5 minutes

Avant propos : Dans le cadre de la discussion relative à une vidéo de propagande sur YouTube « prouvant » que le Président Obama est musulman, j’ai rédigé le bref message suivant (en anglais) :

« Est-ce que les États-Unis sont en guerre contre les Musulmans (1,5 milliards de personnes) ou contre Al-Qaida ? Si les bigots du Parti républicain ne peuvent faire la différence entre les deux et continuent de prêcher l’intolérance contre les Musulmans, votre pays pourrait bien avoir à se chercher des amis lorsque la Chine sera la première puissance de la planète. »

À la suite de ce message, quelqu’un m’invitait par courriel à préciser mon opinion. On trouvera ci-après la traduction française de ma réponse. Il est à noter que la première moitié du texte explique la rage antimusulmane des participants américains à la discussion relative à la vidéo.


Le racisme viscéral du sud des États-Unis

Historiquement, le sud des États-Unis était pauvre, peu instruit, religieux et rural. Il était renommé pour sa violence raciale dirigée contre les Noirs et pour sa religiosité. Les personnes qui y habitaient, y menaient une existence rude destinée à assurer leur subsistance.

Depuis, un grand nombre d’entreprises de haute technologie ou reliées au complexe militaro-industriel s’y sont établies. Si bien qu’aujourd’hui, les États du sud rivalisent de prospérité avec ceux du nord de ce pays.

Toutefois, les mentalités n’ont pas évolué. La bigoterie et l’intolérance se rencontrent encore aussi couramment.

La violence, idéalisée dans le cinéma américain et les jeux vidéos, y est endémique. Par exemple, le taux d’homicides en Floride est le triple de la moyenne américaine, qui est lui-même le triple de la moyenne européenne.

Plus de 15 millions de personnes, principalement au sud des États-Unis, croient au créationnisme et s’opposent à l’enseignement scolaire de la théorie de l’évolution des espèces de Darwin (jugée contraire à la Bible).

Même si le Klu Klux Klan n’y fait plus semer la terreur, cette organisation terroriste américaine a toujours la sympathie de plusieurs Sudistes (comme en témoignent les messages racistes au sujet de la vidéo en question).

Ils ne connaissent presque rien du monde à l’extérieur des États-Unis et un grand nombre de jeunes adultes ont de la difficulté à épeler l’anglais correctement.

C’est la clientèle idéale pour la machine de propagande du Parti républicain. Celle-ci pratique le lavage des cerveaux avec succès, réussissant à faire croire aux Américains des choses aussi stupides que :

  • Saddam Hussain possédait des armes de destruction massive,
  • il est impossible que G.W. Bush ait menti relativement aux véritables raisons de la guerre contre l’Irak puisqu’un « born-again Christian » comme lui ne ment jamais,
  • plus on baisse les impôts des riches, plus l’économie prospère (ils suffit de regarder l’état actuel de l’économie américain pour juger de la stupidité de cette idée)
  • le monde déteste les États-Unis, donc les Américains sont justifiés de détester tout le monde.

Jésus de Nazareth a dit que lorsqu’on vous frappe sur une joue, présenter l’autre. Son message de tolérance est déformé par des prédicateurs qui, en son Nom, citent des extraits de l’Ancien testament pour propager la haine et l’intolérance. Tout comme Al-Qaida déforme le Coran en faisait de ce Document une arme de haine.

Le déclin de la sympathie pour Al-Qaida

Aux États-Unis, presque personne n’est conscient qu’Al-Qaida a été marginalisé — non pas par les bombes américaines — mais plutôt par les Musulmans eux-mêmes. En effet, ceux-ci ont réalisé que la plupart des victimes d’Al-Qaida, depuis des années, sont des Musulmans et non des Américains ou des Juifs.

La plupart des combattants d’Al-Qaida en Irak sont des étrangers en provenance d’Arabie Saoudite. Pourquoi ? Parce que l’organisation terroriste peine à recruter des gens en Irak : elle doit importer ses combattants d’Arabie, où Bin Laden demeure très populaire.

Au Pakistan, le chef des opérations d’Al-Qaida, Osama Hamoud al-Shehri, est saoudien et non pakistanais.

Les organisations terroristes dont les membres ne sont pas saoudiens sont simplement « affiliées » à Al-Qaida plutôt que d’en faire partie intégralement parce que Bin Laden s’en méfie, craignant qu’elles ne soient infiltrées d’espions américains.

Depuis les attentats du métro de Londres, le 7 juillet 2005, toutes les tentatives d’attentats en Occident d’Al-Qaida ont échoué, parfois à la dernière minute. Si bien qu’entretemps, ses revenus servent principalement à tuer d’autres Musulmans.

Ses hommes expérimentés ne parvenant pas à franchir la muraille de sécurité dressée afin de protéger les pays occidentaux, Al-Qaida doit se rabattre depuis quelques temps sur de jeunes recrues, nées en Occident, qui savent à peine manier les explosifs et qui, ayant échoué et ayant été capturées, fragilisent encore plus l’organisation par leurs révélations.

Jean-Pierre Filieu, un des plus grands spécialistes français de l’islamisme, dresse déjà le post mortem d’Al-Qaida et soutient que ce sont les Musulmans eux-mêmes qui ont eu raison de l’organisation de Bin Laden.

Bref, voir dans chaque Musulman un partisan d’Al-Qaida, prêt à contribuer à la destruction de la Civilisation occidentale, c’est profondément mal connaître le monde actuel.

Référence : Filieu JP, Al-Qaïda – c’est fini, La Revue, 2010;6:32-47.

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Les Européens et la grève

Publié le 15 janvier 2011 | Temps de lecture : 3 minutes

Pourquoi, en français, appelle-t-on « grève » une cessation concertée du travail par les salariés d’une entreprise ?

Au Moyen-Âge, à Paris, les bords de la Seine n’étaient pas aménagés comme ils le sont aujourd’hui. Un des principaux points d’accostage des bateaux dans la capitale française était la Place de grève. Située à proximité de l’hôtel de ville, celle-ci était bordée d’une plage de sable, d’où son nom.

Pour décharger un bateau de sa marchandise, le capitaine comptait en premier lieu sur ses matelots. Lorsque cela n’était pas suffisant, il choisissait parmi les hommes sans emploi qui s’entassaient sur la place dans l’espoir d’une embauche facile. Mais lorsque l’un d’entre eux y avait passé la journée à attendre en vain, on disait qu’il « avait fait la grève ».


Jours de grève par pays, par mille employés, de 2005 à 2009
 


 
Relativement aux arrêts de travail, on classe les pays de l’Union européenne en trois groupes distincts.

Le premier groupe comprend les pays où, en moyenne, on a perdu annuellement moins de vingt jours de travail par tranche de mille employés. Dans l’histogramme ci-dessus, ils sont en vert. Entre 2005 et 2009, ce groupe comprenait tous les pays d’Europe centrale et d’Europe de l’est, de même que le Luxembourg, les Pays-Bas, la Suède et le Portugal. Le record appartient à l’Autriche, un pays sans aucune grève durant ces années, suivi de près par l’Estonie.

Le deuxième groupe, en bleu, comprend le Royaume-Uni, l’île de Malte, l’Italie, l’Irlande et Chypre : ce sont des pays où le ce nombre passe de vingt à soixante jours par année, en moyenne, pour la même période.

Cinq pays forment le groupe (en rouge) où ce nombre est supérieur à soixante jours par année, soit l’Espagne, la France, la Finlande, la Belgique et le Danemark. Il est à noter que les données relatives à ces trois derniers pays sont influencées par une grève des employés du secteur public survenue en Finlande et en Belgique en 2005, de même qu’au Danemark en 2008. Sans cette super-grève, ces trois pays feraient partie du deuxième groupe : par exemple, le Danemark aurait eu 23,7 jours perdus annuellement.

On peut s’attendre à que les données à ce sujet soient très différentes pour les années qui viennent.

Références :
Developments in industrial action 2005–2009
Grève

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Écrit par Jean-Pierre Martel


WikiLeaks : la saison de la chasse est ouverte

Publié le 2 décembre 2010 | Temps de lecture : 4 minutes

WikiLeaks est un site Web créé en 2006 dans le but de donner une audience aux fuites d’information. Établi en Suède afin de bénéficier de la législation très stricte de ce pays protégeant les sources des journalistes, WikiLeaks s’est fait connaître cette année par quatre publications controversées.

La première concerne une vidéo (publiée le 5 avril 2010) montrant l’assassinat de deux photographes de l’agence de presse britannique Reuters par l’armée américaine, le 12 juillet 2007 à Bagdad. Cet incident était déjà connu : la vidéo montre simplement l’acharnement de l’hélicoptère Apache à éliminer tous les civils — dont les deux photographes de Reuters — essayant de porter secours aux insurgés qu’il venait d’abattre ou de blesser. Depuis, la vidéo s’est retrouvée sur YouTube.

Le 25 juillet 2010, la deuxième publication contenait 91,000 documents militaires américains secrets sur la guerre en Afghanistan. Dans les jours qui ont suivis, WikiLeaks fut le site européen le plus visité.

Le 23 octobre 2010, WikiLeaks a mis en ligne 391,832 documents secrets sur la guerre en l’Irak. Portant sur la période du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2009, ces documents révélaient que cette guerre avait fait environ 110,000 morts — dont 66,000 civils — au cours de cette période et que les troupes américaines avaient livré plusieurs milliers de prisonniers irakiens à des centres de détention pratiquant la torture.

Le 28 novembre 2010, WikiLeaks publiait 250,000 télégrammes confidentiels de la diplomatie américaine. Deux jours plus tard, le fondateur de WikiLeaks faisait l’objet d’un mandat d’arrêt international dans le cadre d’une enquête pour viol et agression sexuelle, ce qui devrait rendre plus difficiles ses déplacements internationaux.

Au cours des derniers jours, l’ancien gouverneur de l’Arkansas (et possible candidat républicain à la présidence des Etats-Unis), Mike Huckabee s’est prononcé en faveur de l’exécution pour trahison des américains responsables de cette fuite. Ici même au Canada, l’ancien chef de cabinet de Stephen Harper, Tom Flanagan, a déclaré sur les ondes de CBC que Julian Assange (le fondateur de WikiLeaks) devrait être tué : M. Flanagan s’est excusé depuis. Il y a deux jours, le quotidien Ottawa Sun publiait un billet d’Ezra Levant réclamant lui aussi l’assassinat du fondateur de WikiLeaks. Notons que la législation canadienne interdit les appels au meurtre.

Néanmoins, ces appels sont très commodes. Ils ont été émis par des personnes qui ne représentent la position officielle d’aucun gouvernement. Leur importance vient donc de l’audience qu’ils ont connue.

Si un tel événement tragique survient, s’agira-t-il de l’œuvre évidente de la CIA ou celle de Vladimir Poutine, le président russe, sautant sur l’occasion pour embarrasser les Etats-Unis et excuser ses propres assassinats politiques ? Est-ce une invitation lancée à la CIA de déguiser son commando en unité russe afin de brouiller les cartes ? Bref, les amateurs de roman d’espionnage pourront échafauder tous les complots possibles et imaginables.

Dorénavant, la seule manière pour Julian Assange d’échapper à cette condamnation, est de se rendre aux autorités policières de Suède qui auront alors la responsabilité délicate d’assurer sa protection. Entretemps Tom Flanagan et Ezra Levant — les grandes langues canadiennes — devraient répondre de leurs actes devant la justice de ce pays.

Références :
Flanagan regrets WikiLeaks assassination remark
Le voile levé sur un Canada complexé…
Mike Huckabee: WikiLeaks Source Should Be Executed (VIDEO)
WikiLeaks
WikiLeaks dans la mire du gouvernement américain


© — Symbole graphique de WikiLeaks

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Importance de l’Union européenne

Publié le 29 novembre 2010 | Temps de lecture : 1 minute


 
L’Union européenne (en jaune, ci-dessus) compte 27 pays dont seize ont adopté l’euro comme monnaie unique. En 2009, elle représente 28,38 % du produit intérieur brut (PIB) mondial, ce qui en fait la première puissance économique de la planète. Néanmoins, le PIB par habitant reste inférieur à celui des États-Unis.

En 2008, selon le classement du magazine américain Fortune, parmi les 500 premières entreprises mondiales — classées selon leur chiffre d’affaires — 167 avaient leur siège social dans l’UE (soit 33,4 %), contre 153 aux États-Unis (30,6 %) et 64 au Japon (12,8 %)

Huit pourcent de l’humanité habitent l’UE. La natalité est responsable d’environ 30% de la croissance de la population européenne alors que le solde migratoire — l’immigration moins l’émigration — est responsable du reste.


© 2010 — Carte de Google Maps (modifiée)

Référence :
Wikipédia

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Écrit par Jean-Pierre Martel


La guerre en Afghanistan : des chiffres

Publié le 27 novembre 2010 | Temps de lecture : 1 minute

2005 2009 2010
Militaires américains 18 000 57 000 95 000
Personnel civil américain 200 415 1 050
Autres militaires de la coalition 8 000 32 300 41 000
Forces de sécurité afghanes 50 000 170 000 230 000
Nombre approximatif d’insurgés 5 000 25 000 30 000
Nombre approx. d’attaques/semaine 60 80 120
Militaires américains tués 58 86 202
Militaires d’autres nationalités tués 5 70 121
Soldats et policiers afghans tués 200 485 500
Civils tués 300 580 700


Depuis les attentats du 11 septembre 2001, la lutte contre Al-Qaida a coûté aux États-Unis la somme de 1,112 milliards$, soit 369 milliards en Afghanistan et 744 milliards en Irak (où Al-Qaida n’était pas).

© 2010 — Carte de Google Maps (modifiée)

Références :
Cost of wars
La Revue, 2010;6:18.

Parus depuis :
L’Afghanistan, pourquoi ? (2020-03-05)
How the ‘good war’ went bad: elite soldiers from Australia, UK and US face a reckoning (2021-06-01)

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Le déclin de la Grèce

Publié le 16 mai 2010 | Temps de lecture : 4 minutes

C’est à partir de la Renaissance que l’Occident a dépassé la Chine et est devenue la civilisation dominante au Monde, tant au point de vue des sciences qu’au niveau technologique.

Or ce n’est pas une coïncidence; la Renaissance fut la redécouverte et la diffusion de la Civilisation gréco-romaine.

C’est cette redécouverte qui nous a fait sortir de la superstition et de la grande noirceur médiévale.

C’est le pouvoir de la raison qui nous a permis de découvrir les moyens de contrôler les épidémies qui décimaient des millions de personnes au Moyen-Âge et ce sont les inventions scientifiques qui nous ont apporté l’aisance et le confort dont nous profitons aujourd’hui.

Il est donc triste de voir la Grèce, un pays à qui nous devons tant, s’enliser dans la décadence.

On estime que 30 à 40% du produit intérieur brut de ce pays est représentée par le travail au noir, par les combines sous la table et les magouilles de toutes sortes. L’évasion fiscale y est généralisée, tout comme la corruption des agents du fisc. Or l’exemple vient de haut.

Pour 2009, le gouvernement conservateur grec sortant avait annoncé un déficit de 6% alors que le gouvernement socialiste, nouvellement élu, révélait qu’il était plutôt du double.

Cette révélation était une douce revanche pour les socialistes puisque cinq ans plus tôt, lorsque les conservateurs les avaient chassés du pouvoir, ceux-ci avaient révélé que les socialistes avaient maquillé les comptes publics et que les déficits publics de leurs prédécesseurs étaient deux fois supérieurs à ceux annoncés (en 2000, 4,1% vs 2% — en 2001 et 2002, 3,7% vs 1,4% — en 2003, 4,6% vs 1,7% — en 2004, 5,4% vs 1,2%).

Pour l’instant, les socialistes n’ont pas eu le temps de fouiller la période de 2005 à 2008 mais on croit généralement que la tradition de trafiquer les comptes publics est une grande constance de la politique grecque.

Mais il n’y a pas que l’État qui triche.

Quand le ministre des finances de ce pays a demandé à ses contrôleurs de vérifier la rémunération des médecins du plus chic quartier d’Athènes (Kolonaki), quelle ne fut pas sa surprise d’apprendre qu’une bonne partie de ceux qui menaient un train de vie fastueux ne déclaraient que des revenus de 10 000 à 15 000 euros par année. Son ministère a également publié une liste de onze médecins spécialistes qui ont déjà reçu une amende globale de 4,3 millions d’euros pour fraude fiscale.

D’après ce que j’ai cru comprendre, il y a une taxe sur les piscines en Grèce. Or le fisc vient d’utiliser Google Earth pour compter les piscines dans les quartiers huppés du nord d’Athènes. Le résultat ? Alors qu’il en y avait 324 déclarées officiellement, on en a dénombré cinquante fois plus, soit 16 974.

Entre 2000 et 2009, la Grèce a acheté pour 65,3 milliards d’euros de matériel militaire, soit l’équivalent de 5 930 euros par habitant. Entre 2005 et 2009, ce pays fut le cinquième plus important acheteur d’armes au Monde.

En somme, ce pays a plus de latitude qu’on pense généralement pour à la fois réduire ses dépenses (tout spécialement en équipement militaire) et pour aller chercher l’argent là où il se trouve, soit dans les poches de ses plus riches fraudeurs.

L’élément déclencheur de la crise grecque, c’est la décote — au rang d’investissement spéculatif — de la dette de ce pays par une importante agence de notation. Cette décode était souhaitable, voire nécessaire; il est inadmissible qu’un pays mente systématiquement et ce, pendant des années, sur l’importance de son déficit et tente ainsi de tromper ses créanciers.

La colère de ces derniers, qui a secoué toutes les bourses du Monde — grâce à l’effet multiplicateur des millions de petits menés suiveux qui jouent à la bourse sans savoir ce qu’ils font — a été suffisante pour ébranler la monnaie européenne et pour inciter les dirigeants politiques européens à faire en sorte que leurs contribuables à eux se portent garants de cette dette (et possiblement la paient un jour de leurs taxes).

Références :
En Grèce, fraude et corruption à tous les étages
Grèce : Georges Papandréou veut enrayer la fraude fiscale généralisée
Grèce : hausse du chômage et chasse au gaspi
Les avantages de la crise grecque
Payer l’impôt, c’est être un con
Trends in international arms transfers, 2009

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Impressions de Chine (6e partie) : Impérialisme appréhendé

Publié le 11 janvier 2010 | Temps de lecture : 3 minutes

Notre guide de Beijing
 
En boutade, notre guide de Beijing nous a déclaré que l’ambition de son pays est qu’au lieu de « Made in China », les produits chinois portent un jour la mention « Made by China ». La nuance, c’est qu’au lieu d’être des exécutants, les Chinois aspirent à développer de nouvelles technologies et devenir les meilleurs au Monde. Il nous a donné l’exemple d’un train à grande vitesse (TGV) en construction, conçu par des firmes chinoises, et qui deviendra le plus rapide au Monde, alors que le premier TGV en Chine était de technologie française.

Dans cet exemple-ci, la Chine suit l’exemple du Québec dont le premier métro était construit selon une technologie française que Bombardier exporte aujourd’hui à travers le Monde.

Pendant des siècles, la Chine fut la première puissance mondiale. Aujourd’hui, les États-Unis représentent environ vingt pourcent de l’économie mondiale : dans le cas de la Chine, ce fut déjà 25%, à l’époque où caravaniers et marins transportaient les épices, la soie et la porcelaine chinoises aux quatre coins du Monde. Durant toute cette époque, la Chine n’a jamais cherché à exporter son modèle hiérarchisé d’organisation sociale (Empereur, mandarins, fonctionnaires choisis par examens parmi les lettrés) mais s’est plutôt contenté de s’enrichir aux dépends de ses clients.

Pendant toute son histoire, la Chine n’a cherché à exporter son mode de gouvernement que sous le règne de Mao. C’est sous son règne que la Chine s’est emparée du Tibet et qu’elle a financé des révolutionnaires en Afrique et en Asie. Aux autres époques, lorsque le territoire chinois s’est agrandi, c’est lorsque des peuples voisins nomades (ex.: Mongols) ont fait la conquête de la Chine, et non l’inverse. C’est un euphémisme que de dire qu’à travers son Histoire, la Chine n’a pas été favorisée par les conflits armés dans lesquels elle était impliquée.

Aujourd’hui, lorsqu’on invite la Chine à faire pression sur les pays auprès desquels elle s’approvisionne (surtout en pétrole), les dirigeants chinois refusent en invoquant cette tradition millénaire de non-intervention dans les affaires intérieures des autres pays.

Ce refus irrite beaucoup de dirigeants occidentaux. Personnellement, il me rassure puisqu’il signifie que lorsque la Chine deviendra la première puissance économique (donc militaire) du Monde, elle pourrait bien se contenter de garnir ses coffres d’or sans chercher à imposer ses vues sur nous. Dans ce sens, rappelons que le déficit du Trésor américain est principalement financé par la Chine sans que les États-Unis se soient engagés à devenir communistes. Ceci étant dit, je ne vois pas comment la Chine, devenue première puissance mondiale, pourra éviter de jouer un rôle pacificateur lorsqu’un conflit menacera la stabilité de ses échanges commerciaux.

Pour terminer, je suis conscient qu’un bref séjour de trois semaines en Chine ne me confère pas d’autorité à prédire l’avenir de ce pays. Néanmoins, tout ce que je peux dire, c’est que je suis parti pour la Chine rempli de préjugés et que j’en suis revenu beaucoup plus rassuré qu’inquiet, face à l’avenir.

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Écrit par Jean-Pierre Martel