Le sens profond de ‘Je suis Charlie’

8 janvier 2018
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Hier, on commémorait l’attentat contre l’hebdomadaire Charlie Hebdo, survenue il y a trois ans.

Selon un sondage récent, 61% des Français s’identifient encore au slogan ‘Je suis Charlie’, soit dix pour cent de moins qu’il y a un an.

Ceux qui se dissocient de ce slogan, ce sont ceux auprès desquels on en a perverti le sens.

Il ne signifie pas ‘Je suis d’accord avec ce qu’écrit Charlie Hebdo’, ni ‘Je suis d’accord avec le blasphème’ (quel qu’il soit). Il signifie ‘À travers Charlie, c’est moi qu’on veut faire taire’.

Cet attentat était une manière violente de relancer le débat au sujet du blasphème contre l’Islam. Doit-on l’interdire ?

Même s’il n’est pas poli d’attaquer les croyances d’autrui, interdire le blasphème ouvre la porte aux dérives les plus liberticides.

Voyez comment les foules lynchent facilement — sans preuve — toute personne accusée de blasphème au Pakistan et en Malaisie. Rappelons également que Raïf Badawi a dû faire face à une telle accusation pour avoir ridiculisé le clergé obscurantiste de son pays.

Bref, ceux qui se dissocient de ce slogan défendent, souvent sans le savoir, la soumission à une vision étouffante du monde où les violences interpersonnelles sont exacerbées par les privations sexuelles et la misogynie.

Références :
La rumeur meurtrière
Les blasphèmes de Raïf Badawi

Détails techniques : Olympus OM-D e-m5, objectif M.Zuiko 12-40mm F/2,8 — 1/1250 sec. — F/2,8 — ISO 200 — 19 mm

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Radicalisme : Couillard s’en lave les mains

28 juin 2017


 
Interrogé au sujet de ce Québécois musulman accusé récemment d’un acte terroriste commis au Michigan, le premier ministre du Québec a déclaré : « Unfortunately, we cannot disconnect these kinds of events — terrorism — from Islam in general.» (traduction : L’Islam ne peut être dissocié des actes terroristes).

Évidemment, un grand nombre de personnes ont été surprises de l’entendre suggérer que le terrorisme est inhérent à la religion musulmane.

De plus, M. Couillard a cité Emmanuel Macron, le nouveau président français, qui a souligné la double responsabilité de l’État et de la communauté musulmane dans la lutte au terrorisme.

Précisant sa pensée, M. Couillard a demandé aux dirigeants des communautés musulmanes de désavouer sans équivoque toute perversion de l’Islam à des fins violentes.

Ce que M. Couillard oublie de dire, c’est que l’État français a posé un certain nombre d’actes concrets pour s’attaquer à la radicalisation islamiste en France. Par exemple, à la suite de la promulgation de l’état d’urgence, le gouvernement français a fait fermer vingt-sept (27) mosquées soupçonnées de radicalisation.

Une fois ces actions prises, le gouvernement français pouvait aller plus loin et demander aux Français musulmans de mettre eux aussi la main à la pâte en invoquant cette double responsabilité.

En comparaison, qu’a fait M. Couillard dans la partie qui lui incombe de cette double responsabilité ? Il s’est contenté d’accuser ses adversaires de souffler sur les braises de l’intolérance lorsque ceux-ci le pressaient d’agir.

Résumons.

Après les déclarations outrageantes des imams Chaoui et Charkaoui, et après le départ de collégiens québécois pour faire le djihad en Syrie, M. Couillard a promis de s’attaquer à la radicalisation au Québec.

À Montréal, si l’imam Chaoui a été incapable d’ouvrir son centre communautaire musulman, c’est parce que la ville l’en a empêché (et non le gouvernement provincial).

Par ailleurs, les pouvoirs publics ont créé un centre de déradicalisation à Montréal. Il s’agit d’une bonne mesure mais qui n’a jamais fait ses preuves nulle part au monde.

De plus, le gouvernement Couillard a présenté le projet de loi no 59 — retiré depuis parce que liberticide — mais qui était de toute façon une passoire quant à la prévention de la radicalisation.

Depuis, rien de concret. Des mots. Que des paroles. Parfois rassembleuses, parfois incendiaires.

Et pour excuser ce laxisme, il nous dit en substance : « Ce n’est pas de ma faute. C’est de la faute des Musulmans; c’est à eux de faire le ménage dans leur religion.»

En somme, M. Couillard nous dit que le prosélytisme saoudien, il s’en lave les mains. Le financement étranger des mosquées et des imams, il s’en lave les mains. La prédication salafiste au Québec, il s’en lave les mains. Etc.

En faisant porter le blâme de la radicalisation islamiste sur le dos des porte-paroles musulmans, M. Couillard tente de détourner l’attention de l’électorat sur son bilan nul quant à la lutte contre la radicalisation au Québec.

Or cette radicalisation touche non seulement une minuscule partie des Québécois musulmans, mais un nombre beaucoup plus grand de sympathisants de groupes d’extrême droite (qui semblent être le cadet de ses soucis).

En France, Emmanuel Macron suggère que l’État ne peut pas tout faire et que les croyants musulmans doivent soutenir et prolonger l’action de l’État.

Au Québec, toute la politique du gouvernement Couillard à ce sujet est plutôt de croire que les croyances religieuses — même les plus extrêmes — sont du domaine privé et que cela ne le regarde pas. D’où son inaction.

Interrogé à brule-pourpoint au sujet du terrorisme (après 44 minutes d’une entrevue portant sur le rôle de la France au cours du siège de Sarajevo et du génocide au Rwanda), le lieutenant-colonel Guillaume Ancel déclare :

Le sentiment de peur, d’agressivité, que (le terrorisme) peut développer est extrêmement dangereux.

Moi, ce que je crains le plus dans les attentats terroristes, c’est les idiots (…) qui vont décider de se protéger tout seuls, d’aller s’en prendre aux autres, que c’est le boulanger du coin qui est responsable de ça.

C’est eux qui me font peur.

À mon avis, la vraie menace du terrorisme, c’est sur le fonctionnement de notre société.

L’attentat terroriste de Québec nous a appris que nous en sommes là. Or non seulement M. Couillard semble totalement inconscient de la montée de l’extrême droite au Québec, mais il y contribue en pointant un doigt accusateur vers l’ensemble des Musulmans du Québec.

Voilà la dernière chose qu’on doit s’attendre d’un chef d’État.

Références :
After Michigan attack, Quebec Premier calls on Muslim community to play role in preventing terrorism
Bilan de la déradicalisation islamiste dans le Nord de l’Europe
Couillard appelle la communauté musulmane à l’action
Financement des mosquées : le gouvernement en terrain miné
Ftouhi says he has no mental problems: court hearing
Huit questions sur les fermetures de mosquées soupçonnées de radicalisation
Intégrisme et radicalisation : de retour à la case départ
L’islam ne peut être dissocié des gestes commis en son nom, dit Couillard
Philippe Couillard’s tone shift on Islam stuns Quebec Muslims

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Religion et ségrégation sexuelle

15 septembre 2016

Dans nos sociétés, la ségrégation sexuelle est légale. On la voit dans les toilettes publiques, les clubs sportifs et certains établissements scolaires.

Toutes les religions ont pratiqué ou pratiquent encore différentes formes de ségrégation sexuelle.

Il y a d’abord l’accès à la prêtrise, réservée aux hommes dans la majorité des confessions religieuses.

Puis il y a l’accès aux lieux de culte.

À la cathédrale Saint-Étienne de Vienne, il y a une entrée pour les femmes (à gauche) et une autre pour les hommes (à droite) parce qu’autrefois, femmes et hommes y assistaient à la messe chacun de son côté.

Abandonnée depuis dans toutes les églises catholiques, la séparation de l’assistance selon le sexe existe toujours dans les lieux de culte grecs orthodoxes, juifs, musulmans et sikhs.

De nos jours, ce qui choque est moins la ségrégation sexuelle en tant que telle que la manière avec laquelle elle s’exerce.

Dans une église, que les femmes soient à gauche et les hommes à droite (ou l’inverse), cela importe beaucoup moins que de savoir qu’il existe des lieux de culte (des mosquées, notamment) où les hommes assistent à un rituel sans qu’aucune barrière physique ne les sépare de l’officiant alors que les femmes sont à l’écart, cachées derrière une grille, un rideau ou une cloison amovible quand elles ne sont pas reléguées à l’entresol relié à un hautparleur.

Lorsque l’aménagement physique des lieux suggère symboliquement que la Volonté de Dieu est à l’effet que les femmes ne soient que des subalternes, cela apparait incompatible aux valeurs occidentales, y compris aux yeux de nombreuses Musulmanes.

Les religions pratiquées en Occident ont traversé diverses révolutions, dont la révolution féministe du XXe siècle. Ailleurs, les sociétés ont été beaucoup moins exposées à cette révolution, ce qui se reflète dans les mentalités religieuses qui y prévalent.

Contrairement au Christianisme et au Judaïsme, dont l’épicentre est situé en Occident, l’Islam tel que pratiqué chez nous est déchiré entre son enracinement séculaire dans nos sociétés et son enseignement dogmatique financé principalement par l’Arabie saoudite, un pays qui a échappé à cette révolution féministe et qui s’entête à promouvoir un Islam dominé par les mentalités qui prévalaient aux premiers siècles qui suivirent la mort de Mahomet.

Puisque le Dieu des Musulmans est le même que le nôtre, on comprend mal que Sa Volonté puisse être différente selon les confessions religieuses qui se réclament de Lui.

Conséquemment, un nombre croissant d’observateurs réclament que soit interdit le financement étranger des mosquées afin que la religion musulmane puisse se libérer du carcan que lui impose notamment le takfirisme saoudien, c’est-à-dire sa tendance à excommunier et condamner à mort tous ceux qui ont une interprétation de l’Islam le moindrement différente de la sienne.

Références :
Islam en France
Istanbul souhaite mieux accueillir les femmes dans les mosquées
Le prosélytisme de l’Arabie saoudite
La femme dans les religions monothéistes
Mosquée – Trudeau accusé de cautionner la ségrégation des sexes
Quelle place ont les femmes dans les mosquées ?
Une mosquée réservée aux femmes ouvre ses portes à Los Angeles

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Écrit par Jean-Pierre Martel


La rumeur meurtrière

23 mars 2015

L’affaire Asia Bibi

De religion chrétienne, Asia Bibi est une travailleuse agricole pakistanaise d’une quarantaine d’années.

En juin 2009, en cueillant des baies de phalsa, elle suscita la colère de ses collègues musulmanes qui l’accusèrent d’avoir souillé l’eau potable qui leur était destinée, contaminée parce qu’une infidèle en aurait bu.

Ses collègues ont ensuite porté plainte à l’imam du village, accusant Mme Bibi d’avoir manqué de respect à l’égard du prophète Mahomet au cours de leur dispute (une accusation que l’accusée réfute).

Peu après, des hommes de son village se rendirent dans sa maison dans le but de la battre à mort. Elle échappa au lynchage grâce à l’intervention de la police.

Arrêtée, elle est condamnée à mort en novembre 2010. Au cours des procédures en appel, un clerc musulman a annoncé une récompense équivalente à 10 000$ pour quiconque assassinerait Asia Bibi.

L’imam du village, à l’origine de cette affaire, a déclaré que si Asia Bibi devait être ultimement innocentée ou graciée, ceux qui choisiront de rendre justice eux-mêmes auront raison.

Depuis, les deux ministres pakistanais qui lui ont témoigné de leur appui ont été assassinés respectivement en janvier 2011 et mars de cette année-là.

L’affaire est encore pendante devant les tribunaux.

L’affaire Rimsha Masih

En aout 2012, un imam pakistanais du nom de Hafiz-Mohammed Khalid-Chishti demande à un complice d’intercepter et de lui apporter un sac à ordures que transporte Rimsha Masih, une Pakistanaise chrétienne de 14 ans.

L’imam y ajoute quelques pages du Coran et la dénonce aussitôt aux autorités policières pour blasphème. Deux semaines après de début de l’enquête, un assistant du l’imam cède sous la pression et avoue le complot.

Innocentée en novembre 2012, Rimsha Masih (et sa famille) a immigré l’année suivante au Canada.

De son côté, en aout 2013, l’imam Khalid-Chishti a été libéré des accusations portées contre lui après que six des huit témoins de la poursuite aient modifié leurs versions des faits.

Le cas de Farkhunda

En Afghanistan, une Musulmane de 27 ans a été lynchée le 19 mars dernier après qu’on ait répandu à son sujet la rumeur voulant qu’elle ait brulé un exemplaire du Coran.

Récemment diplômée d’une école coranique, elle s’apprêtait à y entreprendre un poste d’enseignante.

Toutefois, en visite guidée à la mosquée du Roi des deux épées, à Kaboul, elle a déconseillé aux femmes d’y acheter des amulettes et a qualifié leurs vendeurs de parasites.

Pour se venger, ceux-ci ont répandu la rumeur selon laquelle Mme Farkhunda aurait brulé un exemplaire du Coran.

Peu de temps après, une foule presque exclusivement composée de jeunes hommes s’en est pris à elle, la hissant sur le toit incliné d’une maisonnette à un étage de laquelle elle glissa après y avoir reçu des coups. Puis, tombée au sol, elle fut violemment piétinée, rouée de coups de bâtons, lapidée, et trainée sur les berges de la rivière peu profonde qui traverse la capitale afghane où son corps fut brulé.

Le principal enquêteur dans cette affaire, le général Mohammed Zahir, a déclaré qu’il n’y avait pas l’ombre d’une preuve que la victime a détruit un exemplaire du Coran.

La télévision afghane a toutefois diffusé des images de pages brulées du Coran, trouvées à proximité de son domicile, ce qui suggère qu’on ait brulé un exemplaire du Coran afin de justifier les accusations calomnieuses portées contre elle.

Treize personnes ont été arrêtées en marge de cette affaire, dont deux vendeurs d’amulettes. Un certain nombre de policiers ont été suspendus de leurs fonctions pour s’être abstenus d’intervenir alors qu’ils étaient présents sur les lieux du crime.

Références :
Affaire Asia Bibi
Afghan protesters demand justice for woman killed by mob
Afghan woman killed by mob in Kabul was innocent, says investigator
How to commit blasphemy in Pakistan
Pakistani Christian Asia Bibi ‘has price on her head’
Rimsha Masih blasphemy case
Women break with tradition in Afghanistan to help bury ‘completely innocent’ Farkhunda who was beaten to death by Kabul mob

Parus depuis :
Afghanistan: peine de mort annulée pour les meurtriers de la jeune Farkhunda (2015-07-02)
Flawed Justice After a Mob Killed an Afghan Woman (2015-12-26)
Quashing of Asia Bibi’s blasphemy charge will not end her suffering (2018-10-31)
Man tortured and killed in Pakistan over alleged blasphemy (2021-12-03)

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Les boucs-émissaires

5 janvier 2012
Centre islamique de l’Outaouais

Construit en 2008 à partir des économies personnelles de ses cinq cents membres, le Centre islamique de l’Outaouais est un édifice de trois étages situé dans un quartier résidentiel de Hull, à quelques rues de l’Université du Québec en Outaouais.

Vers 1h30 dans la nuit de dimanche à lundi dernier, des vitres de la mosquée du centre ont été fracassées. Il s’agit du troisième acte de vandalisme en cinq mois. Toutefois, cette fois-ci, le coupable — capté par une caméra de surveillance — s’en est pris également à deux voitures dans le stationnement (à gauche de la photo) dont il a fracassé les vitres avant de tenter d’y mettre le feu. Le tout a duré près d’une heure. Les voisins n’ont rien vu et n’ont rien entendu.

À mon avis, il n’y a pas de place dans ce pays pour les actes haineux dirigés contre une minorité religieuse, peu importe laquelle. Le Canada est un pays libre et doit le demeurer.

J’entends parfois des collègues de travail me dire : « Oui, mais quand on va dans leurs pays (d’origine), on est bien obligé de se plier à leurs coutumes : pourquoi ils ne se soumettent pas aux nôtres ? »

Ma réponse est toujours la même : « Depuis quand ces pays servent de modèles au Canada ? Voulons-nous vraiment devenir un pays intolérant simplement parce qu’on accepte ici des gens qui proviennent de pays qui le sont ? »

Pour les citoyens canadiens qui sont croyants, édifier des églises, s’y réunir pour prier a toujours fait partie des coutumes authentiques du Canada. Alors les musulmans qui élèvent des mosquées et qui y prient observent scrupuleusement les coutumes canadiennes. Sauf que Dieu, ils l’appellent Allah : grooooosse différence !

Quand à ceux qui font l’association entre « terroristes » et « Musulmans », je leur rappelle que les membres du Ku Klux Klan étaient tous des terroristes blancs et chrétiens. Or cela ne fait pas de moi un terroriste parce que je suis blanc et d’éducation chrétienne comme eux. La même chose est vraie pour les Musulmans.

Par contre, ceux qui tentent d’intimider les minorités religieuses et qui saccagent leurs biens sont clairement des terroristes et devraient être poursuivis devant les tribunaux comme tels.

Photo : © 2011 — Google

Référence :
La mosquée de Gatineau encore vandalisée

Compléments de lecture :
Arabes vs Musulmans
Impopularité d’Al-Qaida chez les Musulmans
La lapidation ou la barbarie participative
Nourriture halal : controverses futiles

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Arabes vs Musulmans

16 février 2011

Être Arabe, ce n’est pas une question de religion, ni de race : c’est une question de langue. Toute personne dont la langue maternelle ou dont la langue principale est l’arabe, se définit comme un Arabe.

De manière analogue, les pays dont la langue officielle est l’arabe (en vert foncé sur la carte ci-dessus) et ceux dont l’arabe est une des langues officielles (en vert pâle) constituent les pays arabes.

© 2008 — Keteracel (pour Wikipedia)

En Turquie, on parle le turc : ce n’est donc pas un pays arabe, malgré le fait que la très grande majorité de sa population soit musulmane. Alors qu’on parle arabe en Irak, ce n’est pas le cas en Iran. Dans celui-ci, on parle perse : l’Iran n’est donc pas un pays arabe non plus.

À l’est de l’Iran se trouve l’Afghanistan. Ce pays n’est pas un pays arabe puisque les Afghans parlent l’afghan. Cette langue correspond au perse classique alors que la langue perse moderne, celle parlée en Iran, est truffée de très nombreux mots étrangers dont celui pour dire merci et qui se prononce : « merci » (exactement comme en français).

Tous les pays arabes sont musulmans. Mais l’inverse n’est pas vrai. De nombreux pays sont musulmans sans qu’on y parle l’arabe. En plus de la Turquie, de l’Iran, du Pakistan et de l’Afghanistan, c’est notamment le cas de l’Indonésie.

Au total, l’Islam comptait 1,57 milliard de fidèles en 2009. Dans la carte ci-dessous, en vert sont représentés les pays à majorité sunnite, et en brun ceux à majorité chiite.

© 2010 — MacedonianBoy (pour Wikipedia)

Dans une vingtaine d’années, alors que cette planète sera partagée entre deux clans rivaux (pays occidentaux vs Chine), l’immense population musulmane pourrait très bien jouer un rôle déterminant. Si tel est le cas, de quel côté penchera-t-elle ?

Compléments de lecture :
Impopularité d’Al-Qaida chez les Musulmans
La lapidation ou la barbarie participative
Les boucs-émissaires
Nourriture halal : controverses futiles

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Impopularité d’Al-Qaida chez les Musulmans

9 février 2011

Lorsque je repense aux attentats du 11 septembre 2001, trois images me reviennent à l’esprit. Premièrement, le moment précis où un deuxième avion percute une tour du World Trade Center de New York et grave son profil dans l’immeuble. Deuxièmement, l’air abruti de G.W. Bush à qui on vient de souffler à l’oreille : «  Sir, America is under attack » et qui reste là, pétrifié pendant un long moment, devant cette classe d’élèves de Floride. Et la dernière image, c’est l’explosion de joie de Palestiniens des territoires occupés en apprenant la nouvelle.

À l’époque, je ne savais pas dans quelle mesure le sentiment de ces Palestiniens était partagé par l’ensemble des Arabes. Mais présentées en boucle par toutes les chaines d’information de la planète, ces images sont maintenant gravées dans la mémoire de ceux qui les ont vues et symbolisent respectivement l’attaque, l’Amérique stupéfaite et les Arabes triomphants.

On présume que ce jour-là, Oussama Bin Laden cristallisait tout le ressentiment envers les États-Unis. Mais une décennie plus tard, qu’en est-il de la popularité d’Al-Qaida dans le monde arabe ?

J’ai déjà abordé cette question dans un billet publié il y a quelques jours. Voici les chiffres.

Le Pew Research Center (PRC) est un organisme américain sans but lucratif créé en 1948 par le fondateur de la Sun Oil Company, Joseph-N. Pew, et son épouse Mary Anderson-Pew. Le Centre a effectué divers sondages qui permettent de suivre l’évolution des mentalités dans les pays musulmans.


Pourcentages d’appui aux attentats-suicides en 2002 et 2009


 
Le cas du Pakistan est intéressant puisque c’est le pays où se cache probablement Bin Laden. Le sondage de la PRC reflète surtout l’opinion des Pakistanais urbains. Tout comme les Talibans, les Pakistanais sont partisans de punitions jugées excessives en Occident.


Pakistanais, appuyez-vous les punitions suivantes ?

  Oui Non ?  
Adultères lapidés 83% 8% 9%
Voleurs fouettés ou amputés d’une main 80% 12% 9%
Peine de mort pour apostasie 71% 13% 16%


 
Malgré la similitude des mentalités, les Pakistanais sont devenus en 2009 majoritairement opposés à Al-Qaida et aux les Talibans.


Pakistanais, appuyez-vous Al-Qaida et les Talibans ?

    2008       2009  
  Oui Non ?     Oui Non ?  
Al-Qaida 25% 34% 41%   9% 61% 30%
Talibans 27% 33% 40%   10% 70% 20%


 
De manière générale, c’est en Palestine que Bin Laden est demeuré populaire. Il est à noter que le PRC n’a pas publié de données relatives à l’Afghanistan, à l’Arabie Saoudite et au Soudan (trois pays où Al-Qaida compte de très nombreux partisans).


Avez-vous confiance en Oussama Bin Laden ?

  Oui Non
Égypte 23% 68% 9%
Indonésie 24% 53% 23%
Jordanie 28% 61% 11%
Liban 2% 98% 0%
Nigéria 54% 39% 7%
Palestine 51% 47% 2%
Turquie 3% 77% 20%


 
Qu’est-ce qui explique ce déclin de la popularité d’Al-Qaida parmi les Musulmans ? Ils ont simplement réalisé que depuis des années, ce sont eux les principales des victimes d’Al-Qaida.

En effet, depuis les attentats du métro de Londres, le 7 juillet 2005, toutes les tentatives d’attentats en Occident d’Al-Qaida ont échoué, parfois à la dernière minute. Si bien qu’entretemps, ses revenus servent principalement à tuer d’autres Musulmans.

Références :
Confidence in Obama Lifts U.S. Image Around the World
Mixed Views of Hamas and Hezbollah in Largely Muslim Nations
Pakistani Public Opinion

Compléments de lecture :
Arabes vs Musulmans
La lapidation ou la barbarie participative
Les boucs-émissaires
Nourriture halal : controverses futiles

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Les Musulmans et Al-Qaida

20 janvier 2011

Avant propos : Dans le cadre de la discussion relative à une vidéo de propagande sur YouTube « prouvant » que le Président Obama est musulman, j’ai rédigé le bref message suivant (en anglais) :

« Est-ce que les États-Unis sont en guerre contre les Musulmans (1,5 milliards de personnes) ou contre Al-Qaida ? Si les bigots du Parti républicain ne peuvent faire la différence entre les deux et continuent de prêcher l’intolérance contre les Musulmans, votre pays pourrait bien avoir à se chercher des amis lorsque la Chine sera la première puissance de la planète. »

À la suite de ce message, quelqu’un m’invitait par courriel à préciser mon opinion. On trouvera ci-après la traduction française de ma réponse. Il est à noter que la première moitié du texte explique la rage antimusulmane des participants américains à la discussion relative à la vidéo.


Le racisme viscéral du sud des États-Unis

Historiquement, le sud des États-Unis était pauvre, peu instruit, religieux et rural. Il était renommé pour sa violence raciale dirigée contre les Noirs et pour sa religiosité. Les personnes qui y habitaient, y menaient une existence rude destinée à assurer leur subsistance.

Depuis, un grand nombre d’entreprises de haute technologie ou reliées au complexe militaro-industriel s’y sont établies. Si bien qu’aujourd’hui, les États du sud rivalisent de prospérité avec ceux du nord de ce pays.

Toutefois, les mentalités n’ont pas évolué. La bigoterie et l’intolérance se rencontrent encore aussi couramment.

La violence, idéalisée dans le cinéma américain et les jeux vidéos, y est endémique. Par exemple, le taux d’homicides en Floride est le triple de la moyenne américaine, qui est lui-même le triple de la moyenne européenne.

Plus de 15 millions de personnes, principalement au sud des États-Unis, croient au créationnisme et s’opposent à l’enseignement scolaire de la théorie de l’évolution des espèces de Darwin (jugée contraire à la Bible).

Même si le Klu Klux Klan n’y fait plus semer la terreur, cette organisation terroriste américaine a toujours la sympathie de plusieurs Sudistes (comme en témoignent les messages racistes au sujet de la vidéo en question).

Ils ne connaissent presque rien du monde à l’extérieur des États-Unis et un grand nombre de jeunes adultes ont de la difficulté à épeler l’anglais correctement.

C’est la clientèle idéale pour la machine de propagande du Parti républicain. Celle-ci pratique le lavage des cerveaux avec succès, réussissant à faire croire aux Américains des choses aussi stupides que :

  • Saddam Hussain possédait des armes de destruction massive,
  • il est impossible que G.W. Bush ait menti relativement aux véritables raisons de la guerre contre l’Irak puisqu’un « born-again Christian » comme lui ne ment jamais,
  • plus on baisse les impôts des riches, plus l’économie prospère (ils suffit de regarder l’état actuel de l’économie américain pour juger de la stupidité de cette idée)
  • le monde déteste les États-Unis, donc les Américains sont justifiés de détester tout le monde.

Jésus de Nazareth a dit que lorsqu’on vous frappe sur une joue, présenter l’autre. Son message de tolérance est déformé par des prédicateurs qui, en son Nom, citent des extraits de l’Ancien testament pour propager la haine et l’intolérance. Tout comme Al-Qaida déforme le Coran en faisait de ce Document une arme de haine.

Le déclin de la sympathie pour Al-Qaida

Aux États-Unis, presque personne n’est conscient qu’Al-Qaida a été marginalisé — non pas par les bombes américaines — mais plutôt par les Musulmans eux-mêmes. En effet, ceux-ci ont réalisé que la plupart des victimes d’Al-Qaida, depuis des années, sont des Musulmans et non des Américains ou des Juifs.

La plupart des combattants d’Al-Qaida en Irak sont des étrangers en provenance d’Arabie Saoudite. Pourquoi ? Parce que l’organisation terroriste peine à recruter des gens en Irak : elle doit importer ses combattants d’Arabie, où Bin Laden demeure très populaire.

Au Pakistan, le chef des opérations d’Al-Qaida, Osama Hamoud al-Shehri, est saoudien et non pakistanais.

Les organisations terroristes dont les membres ne sont pas saoudiens sont simplement « affiliées » à Al-Qaida plutôt que d’en faire partie intégralement parce que Bin Laden s’en méfie, craignant qu’elles ne soient infiltrées d’espions américains.

Depuis les attentats du métro de Londres, le 7 juillet 2005, toutes les tentatives d’attentats en Occident d’Al-Qaida ont échoué, parfois à la dernière minute. Si bien qu’entretemps, ses revenus servent principalement à tuer d’autres Musulmans.

Ses hommes expérimentés ne parvenant pas à franchir la muraille de sécurité dressée afin de protéger les pays occidentaux, Al-Qaida doit se rabattre depuis quelques temps sur de jeunes recrues, nées en Occident, qui savent à peine manier les explosifs et qui, ayant échoué et ayant été capturées, fragilisent encore plus l’organisation par leurs révélations.

Jean-Pierre Filieu, un des plus grands spécialistes français de l’islamisme, dresse déjà le post mortem d’Al-Qaida et soutient que ce sont les Musulmans eux-mêmes qui ont eu raison de l’organisation de Bin Laden.

Bref, voir dans chaque Musulman un partisan d’Al-Qaida, prêt à contribuer à la destruction de la Civilisation occidentale, c’est profondément mal connaître le monde actuel.

Référence : Filieu JP, Al-Qaïda – c’est fini, La Revue, 2010;6:32-47.

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Écrit par Jean-Pierre Martel