Afghanistan : l’échec américain

Publié le 16 août 2021 | Temps de lecture : 4 minutes

Deux siècles de colonisation n’ont réussi à faire de nous des Anglais. De la même manière, deux décennies d’occupation militaire américaine n’ont pas suffi à faire de l’Afghanistan un pays différent de ce qu’il a toujours été; très attaché à ses traditions, hyperreligieux, et où la poésie occupe une place centrale dans la vie culturelle.

Avec n’importe laquelle des trois grandes religions monothéistes, plus une société est religieuse, plus elle est machiste et misogyne.

Afin d’éviter un soulèvement populaire contre leur occupation du pays, les Américains y ont toléré le port généralisé de la burka, les mariages arrangés, et les crimes d’honneur. Toujours impunis.

Chaque année depuis deux décennies, une vingtaine de jeunes Afghanes s’immolent par le feu, désespérées d’être forcées d’épouser un mari dont elles ne veulent pas.

C’est cet aspect de l’Afghanistan que les médias occidentaux nous cachent depuis vingt ans.

Ils ont préféré mettre en évidence une poignée d’écoles clandestines pour fillettes, écoles peu fréquentées qui doivent leur existence à du financement étranger et qui disparaitront bientôt comme des châteaux de sable à la marée.

Après les attentats du 11 septembre 2001, les États-Unis se devaient de répliquer à la déclaration de guerre implicite d’Al-Qaïda.

Mais plutôt que d’installer un nouveau gouvernement en Afghanistan, puis de quitter le pays — comme ils l’ont fait en Italie et au Japon après la Deuxième Guerre mondiale — ils ont choisi l’occupation militaire comme en Allemagne.

Le but était d’empêcher le retour des camps d’entrainement d’Al-Qaïda. Comme si l’Afghanistan était le seul endroit au monde où on pouvait entrainer des terroristes. Depuis ce temps, Al-Qaïda entraine plutôt ses guerriers ailleurs, notamment au Pakistan, au Yémen et en Somalie.

Pour empêcher le retour au pouvoir des Talibans, ils ont financé la constitution d’une armée nationale forte officiellement de 300 000 hommes, équipés du meilleur matériel. Une armée qui a pris la poudre d’escampette quand 75 000 Talibans ont lancé leur dernière offensive pour reconquérir le pays en quelques jours.

Les premiers motivés par l’argent. Les seconds par la foi, par la promesse d’une récompense céleste et par patriotisme.

La leçon de cette occupation militaire est simple; un peuple qui n’est pas prêt à défendre la Démocratie de son propre sang ne la mérite pas.

Mais pas plus qu’au Vietnam, les Américains ne retiendront cette leçon parce que, comme tous les peuples Anglo-Saxons, ils sont incapables de résister à la tentation d’imposer leurs valeurs morales à ceux qui ne les partagent pas.

En vingt ans, cette occupation militaire a couté 2 000 000 000 000$ (deux-mille-milliards de dollars). Inutilement.

On peut penser que si cet argent avait été dépensé pour améliorer le sort du peuple américain, il n’y aurait pas aujourd’hui :
• deux-millions de familles américaines menacées d’éviction, parce que trop endettées,
• des dizaines de millions d’adolescents américains qui renoncent à des études supérieures parce qu’ils n’en ont pas les moyens, et
• plus de neuf-millions d’Américains qui ont perdu leur couverture médicale en perdant leur emploi alors que sévit la pire pandémie depuis un siècle.

Plus qu’un échec militaire, la guerre en Afghanistan est un échec moral.

Paru depuis :
Lives lost, poverty, an arms race, rights destroyed … the continuing cost of 9/11 (2021-09-12)

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Écrit par Jean-Pierre Martel