Forcer la gouverneure générale à parler français : une lutte futile

Publié le 2 octobre 2024 | Temps de lecture : 4 minutes

Madame Mary Simon est la première Autochtone à occuper le poste de gouverneur général du Canada. Sa nomination a suscité la controverse parce qu’elle ne parle pas le français.

Entre nous, si elle ne parlait ni le français ni l’anglais, si elle était même sourde et muette, est-ce que cela changerait quelque chose ? Du moment qu’elle peut voir le doigt qui pointe vers l’endroit où elle doit apposer la signature royale, c’est bien suffisant.

Le ‘scandale’ de sa méconnaissance du français, même trois ans après sa nomination, est essentiellement une indignation limitée à ceux qui n’ont pas encore compris ce qu’est le gouvernement canadien.

Pour ces derniers, ce qui leur vient à l’esprit lorsqu’on parle du fédéral, ce sont les traits de Justin Trudeau, de Mélanie Joly, de Pablo Rodriquez, de François-Philippe Champagne, entre autres.

Tous des Québécois à la mine sympathique.

En réalité, ces gens ne sont que l’interface ministérielle de l’État canadien. Derrière cette façade se cache une fonction publique qui, dans la capitale du pays, travaille en anglais.

Elle travaille en anglais parce qu’à Ottawa, elle est majoritairement composée d’Anglophones unilingues. Secondairement, on y trouve des Francophones bilingues et finalement des Anglophones bilingues. Tous ces fonctionnaires ont une chose en commun; la connaissance de l’anglais, leur langue de travail.

À la commission Rouleau (au sujet du ‘Convoi de la liberté’), tous les fonctionnaires francophones, sans exception, ont préféré témoigner en anglais, la langue qu’ils connaissent le mieux pour parler de leur travail.

Précisons que dans les portes satellites du fédéral au Québec, la majorité des employés sont des Francophones bilingues et secondairement des Anglophones (bilingues ou unilingues). Tous ces gens ont une chose en commun; la connaissance de l’anglais anglais puisque leurs rapports, destinés aux décideurs à Ottawa, doivent être rédigés dans cette langue.

Avant 1969, presque tous les jugements de la Cour suprême du Canada étaient publiés exclusivement en anglais. C’est l’élection d’un gouvernement indépendantiste à Québec en 1976 qui a sonné le réveil du plus haut tribunal du pays à l’importance du bilinguisme.

Depuis 1867, 17 des 30 gouverneurs généraux provenaient de la noblesse anglaise. Et à ce jour, tous les représentants de la monarchie britannique au pays (dont Mme Simon) ont une chose en commun : la connaissance de l’anglais.

L’adoption d’une nouvelle constitution canadienne en 1982 était une belle occasion d’abolir ce poste inutile. Mais puisqu’il a été reconduit, laissons donc cette pauvre Mary Simon terminer son mandat en paix.

À l’heure où un déluge migratoire voulu par Ottawa risque d’entrainer le déclin irréversible du français au Québec — et conséquemment, l’extinction du peuple francoQuébécois — il y a des combats plus importants que celui-là.

Références :
Anciens gouverneurs généraux
Aperçu du fonctionnement interne de l’État canadien
Français: la Cour suprême devrait être exemplaire
Incapable de parler français après trois ans comme gouverneure générale: les libéraux défendent leur nomination de Mary Simon
Incapacité à parler le français: le Bloc va demander à la gouverneure générale de témoigner en comité
La façade ministérielle de l’État canadien

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Un premier ministre indigne

Publié le 20 septembre 2024 | Temps de lecture : 6 minutes

Introduction

Une des leçons de l’Histoire, c’est qu’il est très dangereux de faire croire faussement à une majorité ethnique qu’elle est menacée par une de ses minorités.

Il y a sept jours, sur les ondes de la station CJAD, le premier ministre du Canada déclarait en anglais ce qui suit :

Legault a décidé que la meilleure façon de protéger le français est d’attaquer les Canadiens anglais. Et cela n’a aucun sens. L’idée que quelqu’un va à l’hôpital pour un test ou quelque chose comme ça, anxieux (il pourrait avoir un cancer), anxieux (il pourrait être malade) et là, il va devoir s’inquiéter de savoir s’il peut ou non se faire soigner en anglais parce que son français n’est pas très solide… c’est mal, tout simplement.

Il n’a jamais été question au Québec de priver le peuple angloQuébécois de son droit de recevoir des services médicaux dans sa langue.

Justin Trudeau ment.

La loi fédérale sur les langues officielles

Selon le point de vue, il y a deux manières de considérer les angloQuébécois.

La première consiste à les voir comme la plus importante minorité ethnique du Québec. La deuxième les voit plutôt comme l’annexe québécoise de la majorité anglo-canadienne.

Appelé à se prononcer à ce sujet, le Comite des droits de la Personne de l’ONU statuait en 1993 :

To summarize, the United Nations Human Rights Committee ruled […] that Quebec’s English community does not qualify for protection as a minority language group, because it forms part of the Canadian English-speaking majority.

En d’autres mots, les Québécois anglophones ne peuvent pas être considérés comme une minorité linguistique dans le contexte canadien où ils sont majoritaires.

Depuis toujours, Ottawa soutient le contraire. Sa loi sur les langues officielles trace un parallèle entre d’une part, les minorités francophones hors Québec et d’autre part, la minorité anglophone au Québec.

En réalité, les miettes qu’Ottawa verse aux premières servent d’alibi pour justifier le financement généreux de la colonisation anglaise au Québec.

À titre d’exemple, en 2017-8, Ottawa versait 302 millions$ à McGill, mais seulement 184 millions$ à l’Université de Montréal, et 177 millions$ à l’université Laval.

Au Québec, Ottawa verse 2 663$ par étudiant anglophone à plein temps et 1 430$ pour un étudiant francophone à plein temps.

Le résultat, c’est que les Cégeps et universités anglaises ont 56 % plus d’argent pour former chacun de leurs étudiants. Cela signifie des classes plus spacieuses, des laboratoires mieux équipés, et plus de moyens pour favoriser la réussite des travaux de recherche.

Depuis la pandémie, Ottawa a fait entrer au Québec plus d’un demi-million d’immigrants dont la majorité ne parle pas français.

Le ministère fédéral de l’immigration approuve 92 % des demandes de requérants étrangers pour étudier à l’université McGill. Par contre, il refuse la moitié des demandes pour étudier à l’université Laval. Le pourcentage des refus grimpe même à 72 % dans le cas des établissements scolaires francophones lorsqu’il s’agit de demandeurs provenant d’Afrique.

Dans leur immense majorité, les néoQuébécois expulsés du Québec par Ottawa, ce sont des Francophones parfaitement bien intégrés dans leur milieu d’accueil que le fédéral expulse sous le moindre prétexte; une case à cocher oubliée ou un formulaire qu’on prétend ne pas avoir reçu.


 
Et pendant que l’anglicisation de Montréal s’accélère, Ottawa finance, par le biais de son Programme de contestation judiciaire, la contestation juridique de toutes lois québécoises visant à défendre le français.

Pour couronner le tout, voilà que le premier ministre du pays souffle sur les braises de l’intolérance en faisant croire aux angloQuébécois qu’ils sont attaqués par le gouvernement québécois.

Conclusion

En écrivant la biographie de Justin Trudeau, un auteur pourrait nous présenter une multitude d’anecdotes intéressantes. Mais s’il devait consacrer un chapitre sur la ‘pensée’ de Justin Trudeau, ce chapitre ne devrait pas dépasser trois paragraphes.

La comparaison avec le père fait ressortir l’indigence intellectuelle du fils.

Justin Trudeau aura été le premier ministre du clivage ethnique.

Au cours de ses huit années au pouvoir, il n’a pas cessé de promouvoir le multiculturalisme.

Sans se douter un seul instant que le multiculturalisme était le tribalisme des sociétés anglo-saxonnes; en enracinant l’appartenance ethnique en tant un marqueur identitaire, le multiculturalisme a contribué à faire du Canada un ensemble de tribus.

Ces tribus peuvent très bien se côtoyer harmonieusement en temps de paix. Mais dès que de violents conflits inter-ethniques éclatent à l’Étranger, ces affrontements se transposent en terre canadienne.

D’autre part, en forçant les organismes financés par Ottawa à se soumettre à ses politiques d’ÉDI (Équité, Diversité et Inclusion), Justin Trudeau y a répandu un wokisme polarisant qui jauge le citoyen à sa pigmentation cutanée, son identité de genre, son orientation sexuelle, son ethnie ou sa religion.

Son appel démagogique à la rébellion des Canadiens anglais attaqués par le gouvernement du Québec entache définitivement la réputation de ce petit premier ministre sans envergure.

Références :
L’anglicisation du Québec et la Caisse de dépôt et placement
Décision de l’Onu
Le multiculturalisme et la guerre des diasporas au Canada
Le multiculturalisme ou le tribalisme des sociétés anglo-saxonnes
Le PCJ, annexe de la machine coloniale canadienne
Partir ou rester dans le goulag québécois? L’étrange débat du «Montreal Gazette»

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Le multiculturalisme et la guerre des diasporas au Canada

Publié le 12 septembre 2024 | Temps de lecture : 8 minutes

Introduction

Chaque fois que de la violence éclate dans les banlieues parisiennes, la presse britannique s’empresse d’en imputer la cause à la laïcité française, accusée d’être antimusulmane.

En contrepartie, lorsque des conflits interethniques surgissent dans les villes ouvrières de Grande-Bretagne, les quotidiens français en concluent que c’est la preuve de l’échec du multiculturalisme à assurer la coexistence pacifique des groupes ethniques de ce pays.

Dans tous les cas, c’est souvent une bavure policière ou une exaspération profonde liée au profilage racial exercé par les forces de l’ordre qui est à l’origine du conflit. Bref, la cause est interne à ces pays.

Ce qui est nouveau depuis quelque temps, ce sont les conflits interethniques qui résultent de guerres à l’Étranger.

Plus précisément, le conflit israélo-palestinien et, dans une moindre mesure, la guerre russo-ukrainienne alimentent des affrontements entre concitoyens canadiens.

Contenir la haine

L’expérience des deux Guerres mondiales nous enseigne que lorsque deux pays s’affrontent militairement, la diabolisation de l’autre n’est pas limitée aux dirigeants du pays ennemi, mais s’étend à toute sa population.

Parce qu’au final, le soldat doit obéir aveuglément à l’ordre de tirer ou de bombarder, sans le filtre de sa conscience. Et pour qu’il devienne une simple machine à tuer, cette détestation doit s’étendre à chacun des soldats du pays ennemi, voire à n’importe quel de ses citoyens.

Israël et l’Ukraine sont des alliés militaires du Canada aux prises avec un conflit armé. Pour faire accepter aux contribuables les sommes que le Canada consacre à les aider, Ottawa doit diaboliser leurs adversaires. Ce qui s’appelle la fabrication du consentement.

Mais voilà que cette stratégie dérape.

La haine des Russes et de leur culture

Au lieu de simplement haïr Vladimir Poutine, une certaine partie des Canadiens se sont mis à haïr également leurs concitoyens de descendance russe et à s’attaquer aux entreprises qu’ils possèdent au pays.

De plus, sous la menace d’internautes anonymes, le milieu de la culture se voit dans l’obligation d’annuler des spectacles mettant en vedette des Russes ou des artistes canadiens de descendance russe.

Au lieu d’en appeler au calme, les dirigeants canadiens poussent leur aveuglement jusqu’à applaudir au Parlement un ex-soldat d’une division ukrainienne pro-nazie.

Plus grave encore, la vice-première ministre du Canada réclamait récemment qu’un documentaire portant sur l’armée russe soit retiré de la programmation du Festival international du film de Toronto.

En raison de son sujet pointu et de sa durée de plus de deux heures, ce film n’était pas destiné à intéresser un large public, même en temps de paix.

Si la projection, prévue demain, devait être maintenue, le cri de ralliement hostile de Chrystia Freeland, propagée sur les médias sociaux, mettra en danger la sécurité des festivaliers qui choisiront de le voir.

Par cette tactique, la vice-première ministre canadienne accepte à l’avance de porter l’odieux de la violence qu’elle aura suscitée. De cette manière, elle se montre digne de son grand-père pro-nazi. Ce dernier n’a jamais tué de Slaves; il a simplement encouragé les autres à le faire.

La haine contre les Canadiens de descendance juive

Depuis l’attaque du Hamas en Israël et la réplique massive de ce dernier, plus d’une centaine d’institutions juives au pays ont été la cible de méfaits.

De plus, sur un bon nombre de campus à travers le pays, des manifestants palestiniens, appuyés par des sympathisants, crient des injures à l’égard de manifestants de descendance israélienne. Et inversement. Comme s’ils étaient citoyens de pays différents.

Ici encore, la haine entre Canadiens est inacceptable. Peu importe l’ethnie concernée et ses sympathies légitimes à l’égard de ses co-religionnaires à l’Étranger.

Il y a deux semaines, cinquante-deux membres arabes et musulmans du Parti libéral du Canada ont annoncé publiquement leur refus d’aider leur parti à gagner une prochaine élection partielle au Québec. C’est leur choix.

Ceux-ci écrivent : « Vous ne pouvez pas profiter de notre travail au pays tout en perpétuant notre déshumanisation à l’étranger.»

Aucun Arabe et aucun Musulman canadien n’est déshumanisé à l’Étranger.

Quand les signataires parlent de leur déshumanisation à l’Étranger, ils parlent en tant que membres du peuple palestinien ou d’un des peuples arabes dont ils se réclament.

En somme, ils se voient d’abord et avant tout comme des membres d’une diaspora au Canada.

De la même manière, les Palestiniens qui protestent à McGill sont en bonne partie des étudiants américains ou canadiens-anglais dont la loyauté première est à l’égard de leur peuple au Proche-Orient et non à l’égard des Québécois qui subventionnent niaiseusement leurs études.

Conclusion

Depuis toujours, les recensements des États-Unis dénombrent les diverses ‘races’ qui peuplent son territoire (ci-dessous).

De manière générale, l’appartenance ethnique est la fondation sur laquelle sont édifiées les sociétés anglo-saxonnes; ce sont des sociétés inégalitaires et racistes au sein desquelles chacun doit demeurer à sa place.

Le multiculturalisme est la façade idéologique de ce tribalisme; il consiste à encourager les citoyens, non pas à se définir comme Canadiens avant tout, mais comme membres de sa tribu ethnique.

Plutôt que de promouvoir l’égalité de tous les citoyens aux yeux de l’État, le multiculturalisme exacerbe la tendance naturelle au repli ethnique et renforce le sentiment d’appartenance à sa tribu.

Comme en Inde, on aboutit donc à une série de castes régies par des tabous, dont l’interdiction d’accomplir des tâches réservées aux gens d’une caste différente de la sienne.

Par exemple, se porter à la défense des peuples autochtones est inacceptable pour les metteurs en scène (ex.: Robert Lepage), les enseignants universitaires (ex.: Alexandra Lorange) et les cinéastes (ex.: Michelle Latimer) qui n’appartiennent pas à la tribu appropriée.

Et puisque la politique d’Équité, de diversité et d’inclusion du fédéral est basée (entre autres) sur des considérations raciales, il est essentiel de débusquer ceux qui n’ont pas la pureté du sang requise.

Depuis un demi-siècle, le multiculturalisme se pare des attributs de la Vertu et de la Justice.

Mais il a suffi qu’éclatent des guerres beaucoup plus proches de nous, des guerres auxquelles certains Canadiens peuvent d’identifier, pour que le multiculturalisme mène à des affrontements tribaux entre Canadiens, voire à une fragmentation sociétale.

Ce n’est une coïncidence si les campements pro-palestiniens sont apparus d’abord aux États-Unis pour se répandre ailleurs en Occident et que la détermination des protestataires y a été plus grande; c’est qu’il s’agit d’une société fragmentée où le patriotisme ostentatoire n’est que de façade.

Comme en Ukraine, combien de millions de jeunes Américains préfèreraient se réfugier à l’Étranger (au Canada, par exemple) plutôt que de défendre leur pays s’il était attaqué ?

C’est ça, le multiculturalisme.

Références :
Des menaces et des alertes à la bombe visent plus d’une centaine de groupes juifs au pays
Détecter les « faux Autochtones » dans les universités
Documentaire sur des soldats russes en Ukraine : Chrystia Freeland s’indigne
Équité, diversité et inclusion : la nouvelle discrimination multiculturelle
Gaza : des employés du PLC menacent de boycotter la partielle
La convergence culturelle : communion et symbiose
La fabrication du consentement politique : un exemple américain
La guerre a changé la vie de Canadiens d’origine russe
Le grand-père de la vice-première ministre du Canada, un collabo nazi
Le marécage du multiculturalisme canadien
Le multiculturalisme ou le tribalisme des sociétés anglo-saxonnes
Un historien du génocide face à Israël

Parus depuis :
Manifestations propalestiniennes sur les campus: Amira Elghawaby veut plus de profs musulmans (2024-09-13)
Le TIFF invoque des raisons de sécurité pour suspendre les projections de Russians at War (2024-09-13)

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Postes Canada : langue de service vs langue de travail

Publié le 22 août 2024 | Temps de lecture : 4 minutes

Introduction

Lundi dernier, on apprenait l’intention de Postes Canada d’offrir davantage de services en anglais au Québec.

Cela est normal; la région montréalaise s’anglicise et conséquemment, la clientèle anglophone augmente. Postes Canada, comme toutes les entreprises qui offrent leurs services directement à la population, doit faire face à cette demande accrue.

La langue de service

La Loi 101 a pour but d’assurer qu’on puisse vivre en français au Québec, ce qui implique le droit d’un francophone d’être servi dans sa langue. Cette loi n’a jamais eu pour but d’empêcher un angloQuébécois d’être servi dans la sienne.

Parmi les locuteurs anglophones, l’État québécois peut distinguer entre les angloQuébécois ‘de souche’ et les autres.

Mais on ne doit pas s’attendre à ce qu’il soit nécessaire d’apporter son certificat de naissance pour pouvoir acheter un timbre en anglais au Québec.

Il en est autrement de la langue de travail.

La langue de travail


 
Plus de quatre-millions de Québécois sont unilingues français. Évidemment, ceux-ci peuvent baragouiner quelques mots d’anglais, mais ne peuvent pas postuler pour un poste où le bilinguisme est exigé.

Donc, toute exigence de la connaissance de l’anglais lorsque cela n’est pas nécessaire correspond à une discrimination à l’embauche exercée contre la moitié de la population québécoise.

Prenons un cas concret. Il est normal que les employés à la réception d’un hôtel montréalais soient tous bilingues. Et il est normal d’avoir une personne bilingue à la comptabilité au cas où un touriste voudrait des détails sur sa facture.

Mais il n’est pas normal d’exiger le bilinguisme à tout le personnel de son département de comptabilité au cas où il recevrait un appel en anglais : si cela arrive, on passera plutôt l’appel à la personne bilingue.

L’exigence abusive de l’anglais, c’est ce que font généralement les sociétés fédérales lors de l’embauche de leur personnel. Et c’est le cas à Postes Canada, que ce soit à l’embauche de personnes pour livrer le courrier que pour travailler à ses centres de tri.

Lorsqu’on apprend que Postes Canada viole la Loi 101 à l’embauche, il ne lui suffit pas de s’excuser; elle doit congédier la personne embauchée par erreur et la remplacer, selon le cas, par un francoQuébécois unilingue ou par un Québécois (francophone ou anglophone) bilingue.

Ce congédiement est un service qu’on rend à l’employé unilingue anglais puisque c’est la meilleurs manière de le motiver à apprendre la langue commune du Québec.

Règle générale, il faut parler la langue de Shakespeare pour s’épanouir dans les provinces anglaises du pays. De manière similaire, il n’y a pas de place pour l’unilinguisme anglais sur le marché du travail au Québec.

À preuve, la Loi 101 oblige même l’employeur anglophone à s’adresser en français à son personnel francophone. Donc, même un patron doit savoir parler français : à plus forte raison un employé.

Conclusion

La controverse au sujet de l’augmentation de l’offre de services en anglais par Postes Canada est une tempête dans un verre d’eau. Le problème est ailleurs.

Par contre, il est regrettable que nos taxes à Ottawa (qui épongent les déficits colossaux de Postes Canada) servent à angliciser le Québec, notamment par la discrimination à l’embauche exercée par les entreprises fédérales contre la moitié de la population québécoise.

C’est entre autres par ce moyen que s’exerce la colonisation anglaise du Québec.

Références :
Anglicisation de Montréal depuis quinze ans
Année 2023 – Postes Canada enregistre une perte de 748 millions avant impôt
Emplois «in English» à Postes Canada: «Une nouvelle preuve du mépris du gouvernement fédéral»
«C’est bourré d’unilingues»: pas besoin de parler français pour être facteur au Québec en 2024
Postes Canada offrira davantage de services en anglais au Québec

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Écrit par Jean-Pierre Martel


La mauvaise foi du juge Galiatsatos

Publié le 28 mai 2024 | Temps de lecture : 7 minutes

Introduction

Le 15 aout 2018, soit huit jours avant de déclencher des élections générales, le gouvernement libéral de Philippe Couillard faisait accéder cinq avocats à la magistrature. L’un d’eux est Dionisios (ou Dennis) Galiatsatos.

Depuis, l’honorable Galiatsatos a acquis une renommée internationale pour avoir, dans un de ses jugements, écrit qu’adresser un doigt d’honneur était un droit constitutionnel au Canada.

De quoi s’agissait-il ?

Un jugement hors sujet

Dans cette affaire, après avoir entendu le témoignage irréfutable de l’accusé, l’avocate de la poursuite, réalisant que sa cause était perdue, invitait elle-même le juge Galiatsatos à innocenter l’accusé.

Le magistrat aurait pu rejeter la plainte séance tenante. Mais il a plutôt décidé de prendre le tout en délibéré et de s’allouer deux semaines pour écrire un jugement dans lequel il déclare, effectivement, qu’adresser un doigt d’honneur est un droit constitutionnel.

Malheureusement, cette décision est hors sujet puisque ce qu’on reprochait à l’accusé, ce n’était pas d’avoir adressé un doigt d’honneur à ses voisins, mais de les avoir menacés de mort.

Voilà pourquoi il s’agissait d’une cause criminelle.

Alors pourquoi écrire 26 pages inutilement ?

Meubler son temps

À l’époque, le juge Galiatsatos — comme tous les juges de la Cour du Québec — avaient beaucoup de temps libre.

Un an avant le jugement en question, Me Lucie Rondeau, juge en chef de la Cour du Québec, ordonnait une grève du zèle des juges sous son autorité.

Pour forcer le ministre de la Justice du Québec à nommer plus de juges bilingues, Me Rondeau était prête à provoquer artificiellement une thrombose judiciaire pour parvenir à ses fins.

Zélé, le juge Galiatsatos avait décidé de se trainer les pieds.

Une ‘injustice’ tirée par les cheveux

Depuis l’adoption de la loi 96 — qui renforce timidement la Loi 101 — un grand nombre de juges ultra-fédéralistes trépignent à l’idée d’invalider une ou plusieurs de ses dispositions. Comme on l’a déjà fait pour des pans entiers de la Loi 101, devenue l’ombre d’elle-même.

Parmi ces juges ultra-fédéralistes, on compte l’honorable Galiatsatos.

Le premier paragraphe de l’article 10 de la loi 96 se lit comme suit :

Une version française doit être jointe immédiatement et sans délai à tout jugement rendu par écrit en anglais par un tribunal judiciaire lorsqu’il met fin à une instance ou présente un intérêt pour le public.

En d’autres mots, lorsqu’un jugement est rendu en anglais au Québec, il doit être accompagné de sa traduction française. De plus, leur publication conjointe doit se faire promptement.

Concrètement, il ajoute une nouvelle tâche aux magistrats; celle de s’assurer de la traduction française d’une décision en anglais afin de publier les deux conjointement.

Traduire officiellement une décision juridique prend habituellement quelques jours.

Dans un jugement de 34 pages rendu en anglais plus tôt ce mois-ci, le juge Galiatsatos a estimé que ce retard prolongera l’anxiété des Anglophones en attente d’un jugement puisqu’ils devront attendre la traduction française avant de connaitre la décision du tribunal rédigée en anglais.

Selon la traduction de Radio-Canada, le juge écrit :

Ultimement, dans un monde réel, les accusés anglophones seront moins bien traités que les accusés francophones puisqu’ils devront attendre plus longtemps avant de connaitre leur sort.

Dans cette cause, une automobiliste anglophone était accusée d’avoir entrainé la mort d’une cycliste francophone.

Puisque le décompte pour porter un jugement en appel commence à partir de la date du jugement (le 24 mai, dans ce cas-ci), et non de la date de sa traduction (qu’on attend toujours), pourquoi la famille francophone de la cycliste décédée devrait-elle avoir moins de temps que l’accusée anglophone pour analyser le jugement et pour décider ou non de porter la cause en appel ?

À partir du 1er juin prochain, l’article 10 de la loi 96 entrera en vigueur. Dans une cause semblable à celle-ci, cet article ne corrigera-t-il pas l’injustice dont nous venons de parler puisqu’alors, les deux parties prendront connaissance du jugement en même temps ?

Quant à savoir pourquoi cette exigence ne s’applique pas aux jugements en français, c’est que si tous les jugements étaient systématiquement accompagnés de leur traduction, le Québec serait une province bilingue. Ce qui n’est pas le cas.

Pour terminer, le juge estime que c’est Ottawa qui a autorité sur le Code criminel et conséquemment, que le Québec a outrepassé ses pouvoirs en exigeant la traduction française systématique des jugements en anglais rendus dans des causes criminelles.

En réalité, c’est Ottawa qui détermine ce qui constitue un crime en vertu du Code criminel. Mais ce sont les provinces qui administrent l’appareil judiciaire et régissent son fonctionnement.

Conclusion

L’an dernier, le juge Galiatsatos se trainait les pieds dans le but de contribuer au combat corporatiste mené par la juge Rondeau. Le voilà maintenant soucieux de rendre jugement le plus rapidement possible.

S’il est vrai qu’il n’est jamais trop tard pour bien faire, il arrive parfois que ce soit prématuré.

Puisque l’article 10 entrera en vigueur dans quelques jours, la charge du juge Galiatsatos contre cet article de loi est tout simplement prématurée et hors sujet.

Évidemment, le juge Galiatsatos aurait pu se trainer les pieds au-delà de cette date pour rendre son jugement. Et là, évidemment, il aurait pu accuser la loi 96 de retarder la justice.

Mais il n’a pas pu résister à l’envie de faire parler de lui.

Si bien que sa décision à ce sujet est aussi futile que sa décision de reconnaitre le doigt d’honneur comme un droit fondamental au Canada.

Dans ce cas-ci, cela oblige le procureur général à porter ce jugement en appel. Ce qui pénalise l’accusée anglophone qui devra assumer de nouveaux honoraires afin que son avocat plaide pour elle devant la Cour d’appel du Québec. En plus d’avoir à attendre pour connaitre la décision définitive des tribunaux.

Le regard tourné vers son nombril, le juge Galiatsatos ne se rend pas compte qu’il nuit à la cause qu’il croit défendre.

En faisant prématurément flèche de tout bois, la mauvaise foi de ce juge contribue au préjugé selon lequel une partie des magistrats au Québec sont de petits soldats du colonialisme canadian et à ce titre, ne ratent jamais l’occasion d’essayer de saboter les efforts légitimes que nous entreprenons pour assurer la pérennité du français au Québec.

Références :
Anglicisation du Québec : l’omelette de la loi 96
Bilinguisme des magistrats : la capitulation du ministre Simon Jolin-Barrette
Les familles Caïn et Abel
Juge et partie
Présenter un doigt d’honneur constitue un droit fondamental, estime un juge québécois
Prosecutor who convicted Richard Henry Bain nominated as judge
Texte final de la loi 96
Un juge du Québec décrète que la loi 96 est incompatible avec le Code criminel

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Les collabos du colonialisme canadian (2e partie) : l’ensemble des députés libéraux à Ottawa

Publié le 15 mai 2024 | Temps de lecture : 11 minutes

L’adoption de la constitution de 1982

À la suite d’une séance ultime de négociation tenue secrètement en l’absence du Québec, les provinces anglophones du Canada et le gouvernement canadien ont adopté une nouvelle constitution, entrée en vigueur en 1982.

On verrait mal la Grande-Bretagne se doter d’une constitution sans l’assentiment de l’Écosse, du pays de Galles ou de l’Ulster. Mais la députation québécoise à Ottawa — composée à l’époque de 74 députés libéraux et d’un seul député conservateur — n’ont pas vu de problème à changer la loi fondamentale du pays sans l’assentiment du Québec.

Rien n’est plus révélateur du statut colonial du Québec au sein du Canada que l’adoption de cette constitution par l’ethnie dominante du pays. Tout comme n’importe quelle métropole n’hésite pas à imposer sa volonté à ses colonies.

Mais pourquoi Ottawa a-t-il soudainement senti la nécessité d’adopter une nouvelle constitution alors que, jusque-là, celle de 1867 semblait convenir ?

C’est qu’en 1977, le parlement québécois adoptait la Loi 101. Or celle-ci introduisait une nouvelle notion juridique, celle des droits collectifs, plus précisément ceux nécessaires à la protection du français au Québec.

D’où l’urgence, pour Ottawa, d’adopter une constitution qui, au contraire, proclamerait la suprématie absolue des droits individuels, dont celui de s’assimiler au groupe ethnique de son choix.

Pour défendre la légitimité de cette camisole de force constitutionnelle, Ottawa s’est servi des députés fédéraux du Québec comme caution morale.

Puisque 74 députés du Parti libéral du Canada (PLC) couvraient la presque totalité du territoire québécois, Ottawa estimait que ceux-ci étaient aussi représentatifs de la volonté populaire que les députés de l’Assemblée nationale du Québec puisque la population québécoise avait à la fois voté pour les uns et les autres.

En réalité, le parlementarisme d’inspiration britannique soumet les députés à la discipline du parti. Cette discipline s’exerce en privant le député dissident de la rémunération rattachée à la représentation de son parti sur les comités du parlement.

Or à Ottawa, les députés libéraux du Québec sont toujours minoritaires au sein de leur formation politique. Quand vient le temps de défendre les intérêts du Québec, ils le peuvent seulement dans la mesure où leurs collègues anglophones, majoritaires, y consentent.

Ce qui signifie que lorsque le Parti libéral du Canada est au pouvoir, ses députés québécois sont condamnés à défendre ses politiques, même si cela les oblige à trahir les intérêts du Québec.

Ce fut le cas en 1982.

La nouvelle loi sur les langues officielles

De 2006 à 2016, l’usage du français a reculé parmi les 185 500 travailleurs québécois qui œuvrent dans les 3 210 entreprises privées de compétence fédérale établies au Québec.

Au cours de cette période, alors que l’usage du français reculait légèrement dans l’ensemble du marché du travail au Québec (passant de 82,9 % à 80,7 %), ce recul a été beaucoup plus accentué au sein des entreprises de compétence fédérale, chutant de 77,9 % à 71,9 % en une décennie.

Ce recul a été particulièrement marqué dans les secteurs des télécommunications, de la défense, et du transport ferroviaire.

Pour contrer ce déclin, l’Assemblée nationale du Québec a adopté en mars 2021 la loi 96. Parmi ses dispositions, l’une d’elles assujettit les entreprises privées de compétence fédérale à la Loi 101.

Aussitôt, Ottawa a été saisi de l’urgence de moderniser sa propre loi sur les langues officielles. Cette modernisation a pris la forme de la loi C-13, adoptée par le parlement canadien en juin 2023.

Au sujet de la langue de travail, la loi fédérale laisse aux entreprises privées de compétence fédérale le choix de se soumettre soit à la loi C-13 fédérale ou soit à la loi 96 québécoise.

Au niveau des principes régissant la langue de travail, l’une et l’autre sont assez semblables.

La différence fondamentale est dans l’application concrète de la loi.

Au sujet des entreprises privées soumises à son autorité, le fédéral fonctionne sur le principe de l’auto-règlementation; Ottawa exige seulement que les entreprises se dotent de procédures vertueuses et compte sur elles pour les mettrent en application.

C’est ce qui fait que le transporteur ferroviaire MMA, par exemple, a pu opérer de manière très dangereuse pendant des années sans être inquiété par le fédéral, jusqu’à la catastrophe de Lac-Mégantic, conséquence inévitable du laisser-faire d’Ottawa.

Pour revenir au respect du français par une entreprise de compétence fédérale, lorsque celle-ci sera l’objet d’une plainte — du public au sujet de la langue de service ou d’un employé quant à la langue de travail — cette plainte subira un sort bien différent selon que cette plainte sera adressée à Ottawa ou à Québec.

Au sein de la fonction publique québécoise, tous les fonctionnaires parlent français, qu’ils soient francoQuébécois ou angloQuébécois. Dans la fonction publique fédérale, il en est autrement.

La fonction publique fédérale

Avec ses 357 000 fonctionnaires, le gouvernement canadien est, de loin, le principal employeur du pays.

Les fonctionnaires fédéraux se répartissent en deux groupes; ceux qui travaillent dans la capitale nationale (42,6 %) et ceux qui travaillent dans les postes satellites répartis un peu partout sur le territoire canadien.

Dans les postes satellites (ou régionaux)

Ceux qui travaillent dans les postes satellites sont ceux à qui le public s’adresse, par exemple, lorsqu’il appelle ou écrit au ministère fédéral du Revenu ou au ministère de l’Immigration.

Dans d’autres cas, ces fonctionnaires n’ont pas de contact avec le public.

Les postes satellites du Québec sont bilingues au sens où toute personne qui recourt à leurs services sera servie dans la langue officielle de son choix.

Dans les bureaux québécois, les employés se répartissent en trois groupes ethniques; on y rencontre des Francophones bilingues, des Anglophones bilingues et des Anglophones unilingues.

On n’y embauche jamais de Francophones unilingues (soit la moitié de la population du Québec) puisque les fonctionnaires qui y travaillent prennent rarement des décisions importantes; leur rôle est d’étoffer en anglais les dossiers qui seront transmis à Ottawa pour décision.

Dans une cause où un fonctionnaire francophone s’était plaint de n’avoir jamais pu travailler en français, le tribunal a reconnu que la prime au bilinguisme que le fédéral accorde à ses fonctionnaires francophones bilingues correspond en réalité à une somme qui leur est allouée pour la renonciation à leur droit de travailler en français.

Dans la capitale nationale

À Ottawa, les principaux groupes ethniques sont, en ordre décroissant : les Anglophones unilingues, des Francophones bilingues et des Anglophones bilingues.

Les Anglophones unilingues y sont majoritaires pour une raison très simple; le fédéral puise ses effectifs dans la population du pays, majoritairement unilingue anglaise. Autrement, il exercerait une discrimination à l’embauche à l’égard de sa propre population.

Parmi les groupes minoritaires, les Francophones bilingues sont plus nombreux que les Anglophones bilingues parce que c’est également le cas au sein de la population canadienne.

À chaque fonctionnaire francophone qui s’est présenté à la barre des témoins de la commission Rouleau — au sujet du ‘Convoi de la Liberté’ — les commissaires prenaient soin de préciser, dès le départ, que celui-ci était libre de s’exprimer dans sa langue. Pourtant tous ces fonctionnaires francophones ont témoigné en anglais.

Ils ont préféré l’anglais parce que c’est la langue qu’ils parlent habituellement au travail et conséquemment, c’est la langue dans laquelle ils sont le plus familiers pour parler de ce qu’ils font.

De manière générale, il est impossible de faire fonctionner une entreprise lorsqu’on met ensemble des travailleurs qui ne se comprennent pas. D’où la nécessité d’avoir une langue commune. Cette langue est l’anglais à Ottawa et c’est le français à Québec.

Au parlement canadien, on a beau mettre en évidence un conseil des ministres qui reflète la diversité culturelle du pays, dans les faits ceux-ci ne sont que l’interface ministérielle derrière laquelle se cache une machine étatique majoritairement unilingue anglaise et qui fonctionne essentiellement en anglais.

Les plaines relatives aux infractions à la nouvelle loi fédérale sur les langues officielles seront reçues par des fonctionnaires fédéraux, majoritairement unilingues anglais. Pouvez-vous imaginer leur zèle à sanctionner la ‘méchante’ compagnie qui fait travailler ses employés en anglais. What’s the problem ?

Conclusion

Dès que le gouvernement du Québec se dote de moyens législatifs destinés à assurer la pérennité du français au Québec, Ottawa s’empresse de changer la constitution ou d’adopter des lois afin de rendre les lois québécoises inopérantes.

Dans son désir de saboter les efforts du Québec, le gouvernement canadien — toujours dirigé dans ces moments-là par le Parti libéral — peut compter sur sa députation servile du Québec, liée par la ‘discipline du parti’.

En 2016, quand la députée libérale Mélanie Joly, à titre de ministre du Patrimoine canadien, déclare que le premier ministre John-A. Macdonald était un visionnaire qui ‘valorisait la diversité’ alors qu’il a mis en place les politiques génocidaires du Canada à l’égard des Autochtones, il est clair qu’elle ne pensait pas un traitre mot de ce qu’elle disait.

Mais c’est ce que ses fonctionnaires ont écrit pour elle. Alors, au risque de se couvrir de ridicule, elle a obéi. Parce qu’elle est payée pour ça.

La députée libérale Emmanuella Lambropoulos niait récemment le déclin du français au Québec. Quelques jours plus tard, elle en rajoutait en racontant cette histoire invraisemblable du refus d’un médecin de prodiguer des soins en anglais à une angloQuébécoise.

Au fédéral, quand des députés nient le déclin du français au Québec, comment se fait-il que les ‘négationnistes’ soient toujours des libéraux et jamais des députés d’autres formations politiques ?

C’est que les députés québécois du Parti libéral du Canada n’hésitent jamais à servir de façade aux attaques de l’État canadian contre les mesures que nous prenons pour défendre notre langue.

Ils sont les équivalents québécois des hommes de paille du maréchal Pétain au cours de la Deuxième Guerre mondiale.

« Nous serons toujours là pour défendre les droits des minorités » aime à répéter le premier ministre canadien. Depuis toujours, son parti feint d’ignorer que la plus importante minorité du pays, c’est le peuple francoQuébécois et non l’annexe québécoise de la majorité anglo-canadienne, sujette de tous les soins d’Ottawa…

Références :
Aperçu du fonctionnement interne de l’État canadien
Déclaration de la ministre Joly
109 000 fonctionnaires de plus sous Trudeau
Des entreprises à charte fédérale esquiveront la loi 96
Des libéraux fédéraux montent aux barricades pour les anglophones du Québec
Emmanuella Lambropoulos revient à la charge avec des propos controversés
GRC : de hauts gradés unilingues à des postes bilingues
Immigration Canada recrute des agents uniquement anglophones au Québec
La Commission Rouleau : là où le français relève de l’utopie
La façade ministérielle de l’État canadien
La faillite de la dérèglementation ferroviaire du gouvernement fédéral
Les fonctionnaires fédéraux mal à l’aise d’utiliser le français au bureau
Loi constitutionnelle de 1982
L’OQLF déjà prêt à imposer la loi 101 dans les entreprises de compétence fédérale
L’unilinguisme anglais à Immigration Canada
Le bilinguisme, « l’affaire des francophones » dans la fonction publique fédérale

Paru depuis : Rendre le Québec officiellement bilingue, une idée qui ne passe pas au BQ et au PCC (2024-05-31)

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Les collabos du colonialisme canadian (1re partie) : Francis Drouin, député fédéral libéral

Publié le 12 mai 2024 | Temps de lecture : 6 minutes

Introduction

Le 6 mai dernier, le chercheur Frédéric Lacroix et le professeur Nicolas Bourdon se présentaient devant le Comité permanent sur les langues officielles d’Ottawa afin de soutenir la thèse — basée sur les données de Statistique Canada — selon laquelle faire ses études dans un Cégep ou une université anglophone augmentait statistiquement la probabilité de mener par la suite sa vie en anglais.

Prenant la parole, le député libéral Francis Drouin les a qualifiés d’extrémistes et de ‘pleins de marde’.

Les faits

L’assimilation linguistique s’opère principalement par le biais du marché du travail et de l’école.

Au sujet de l’école, si la Loi 101 oblige les francoQuébécois et les néoQuébécois à fréquenter l’école publique française au primaire et au secondaire, cette loi est muette au post-secondaire, c’est-à-dire au niveau des Cégeps et des universités.

Malheureusement, après avoir été scolarisés en français au primaire et au secondaire, une proportion croissante de jeunes francoQuébécois font leurs études post-secondaires en anglais.

Chez les adolescents de langue maternelle française qui ont entrepris un parcours scolaire destiné à les mener à l’université — en somme, ceux qui ne sont pas inscrits à un DEC technique — 80 % de ceux qui font leurs études collégiales en anglais s’inscrivent à une université anglaise alors que ce pourcentage est de 13 % chez ceux qui ont fait leurs études collégiales en français.

En somme, le Cégep anglais constitue un choix de vie définitif; la plupart des adolescents inscrits à un Cégep anglais espèrent travailler en anglais à la suite de la remise de leurs diplômes.

Cela s’explique facilement. Les détenteurs d’une formation collégiale ou universitaire seront plus à l’aise, pour le reste de leur vie, de s’exprimer en anglais dans leur domaine de compétence puisque les termes techniques, les concepts et les notions apprises l’auront été dans cette langue.

Dans son premier rapport annuel, le nouveau commissaire à la langue française note que l’utilisation de l’anglais par les francoQuébécois et les néoQuébécois est liée au fait d’avoir étudié dans un Cégep ou dans une université anglaise.

Le mécanisme de l’assimilation

En 2009, plus de 3 200 étudiants provenant principalement de sept Cégeps de l’ile de Montréal ont répondu à un questionnaire comptant plus de quarante questions et portant leurs comportements linguistiques.

Pour ce qui est de leurs préférences cinématographiques, les collégiens anglophones ne sont pas intéressés par les films en français (d’ici ou d’ailleurs), peu importe la langue de leurs études.

Toutefois, autant chez les collégiens francophones qu’allophones, l’intérêt pour le cinéma en français chutait de manière importante chez ceux qui fréquentent les Cégeps anglais.

Ce phénomène se retrouvait également (mais avec une chute d’intérêt moindre) quant aux émissions de télévision.

On peut présumer que ce qui était vrai pour la télévision en 2009 est probablement vrai de nos jours pour les sites internet.

Les auteurs de cette étude concluaient que la fréquentation d’un Cégep anglais est fortement corrélée avec l’utilisation prédominante de l’anglais dans l’ensemble des situations quotidiennes.

Une fois diplômés, une bonne partie de ceux qui fréquentaient les Cégeps ou les universités anglaises sont devenus indifférents à être servis dans une autre langue que le français.

En d’autres mots, ils se désolidarisent des francoQuébécois unilingues qui sont victimes de discrimination à l’embauche, ceux-ci étant vus comme des pleurnichards qui n’ont qu’à apprendre l’anglais.

Les quelques années qui sont nécessaires pour effectuer des études post-secondaires en anglais ne sont pas suffisantes pour transformer un étudiant francoQuébécois en angloQuébécois.

Mais cette formation anglaise est associée à une propension plus grande à écouter par la suite des films en anglais, à assister à des spectacles en anglais, à lire des livres en anglais, à consulter des quotidiens anglais, et à écouter les actualités en anglais.

Une fois diplômé, le cercle d’amis d’un Francophone qui a fait ses études en anglais est habituellement composé de collègues avec lesquels il a étudié, soit des personnes bilingues et des angloQuébécois unilingues, c’est-à dire un groupe au sein duquel l’anglais est la seule langue commune.

À s’exposer à l’idéologie qui prévaut chez les angloCanadiens, on en vient peu à peu à penser comme un angloQuébécois, au fur et à mesure que son vocabulaire en français — de moins en moins utilisé — se rétrécit au point qu’on devient plus à l’aise de s’exprimer dans la langue de Shakespeare.

N’est-ce pas ce qu’on appelle l’assimilation ?

Conclusion

Le ‘distingué’ député Drouin souffre d’aveuglement volontaire en refusant de croire les faits, c’est-à-dire que les Cégeps et universités anglophones de Montréal — ces dernières grassement financées par Ottawa — sont au cœur de la machine assimilatrice à l’anglais.

Au Québec, Ottawa verse 2 663$ par étudiant anglophone à plein temps et 1 430$ pour un étudiant francophone à plein temps.

Le résultat, c’est que les Cégeps et universités anglaises ont 56 % plus d’argent pour former chacun de leurs étudiants. Cela entraine des classes plus spacieuses, des laboratoires mieux équipés, et plus de moyens pour favoriser la réussite des travaux de recherche.

Pas étonnant qu’un nombre croissant d’adolescents francoQuébécois choisissent un parcours scolaire qui conduira à leur assimilation linguistique.

Tant que le peuple francoQuébécois paiera des taxes et des impôts à Ottawa — autrement dit tant que Québec ne deviendra pas un pays indépendant — notre argent servira à favoriser notre lente extinction.

Merci au député Drouin de nous donner l’occasion d’y réfléchir…

Références :
Le défilé des Rhodésiens
Les cégeps français à Montréal : le début de la fin ?
Protection du français : Témoins « pleins de marde » : « Non, je ne m’excuse pas », dit le député
Québec préfère les universités anglaises
Rapport d’activités 2022-2023 – Commissaire à la langue française
Sans l’indépendance, pas d’avenir pour le français comme langue nationale
Une analyse des comportements linguistiques des étudiants du collégial sur l’ile de Montréal
Universités anglophones: 200 M$ par année pour angliciser le Québec

Paru depuis : Le député libéral Francis Drouin annonce qu’il ne se représente pas (2024-07-25)

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Écrit par Jean-Pierre Martel


La peur de l’indépendance

Publié le 18 avril 2024 | Temps de lecture : 6 minutes


 
Introduction

Le moteur des révolutions est le sentiment d’injustice. En contrepartie, le moteur des contre-révolutions, c’est la peur.

Dans ce second cas, ce peut être la peur de la mitraille ou la peur de l’inconnu. Pour paraphraser Machiavel, on peut dire qu’un peuple consentira aveuglément à sa domination tant qu’il sera habité par de la peur de tout perdre en dépit du fait qu’il ne possède rien…

Depuis un demi-siècle, chaque fois que le peuple francoQuébécois s’apprêtait à poser un geste de rupture, ceux qui n’y avaient pas intérêt ont invoqué la peur.

Les camions de la Brink’s

Au cours de la campagne électorale québécoise de 1970, les sondages révélaient que deux partis politiques étaient presque à égalité dans les intentions de vote : le Parti libéral du Québec (d’allégeance fédéraliste) et un tout nouveau parti indépendantiste, le Parti Québécois. Loin derrière eux se trouvait l’Union nationale, un parti nationaliste au pouvoir jusque-là.

Trois jours avant le scrutin, neuf camions blindés de la Brink’s partaient des bureaux montréalais du Royal Trust en direction de Toronto. À leur bord, une quantité présumée importante de titres financiers.

Le tout devait démontrer le risque de fuite des capitaux hors du Québec si le Parti Québécois devait prendre le pouvoir.

Selon Wikipédia, l’opération était une tentative de manipulation de l’opinion publique orchestrée par le premier ministre canadien de l’époque, Pierre-Elliott Trudeau (le père de Justin Trudeau).

Publiée en exclusivité par le quotidien montréalais The Gazette (avisé à l’avance par un appel anonyme), la primeur sera reprise le lendemain — soit l’avant-veille du vote — par tous les journaux du Québec.

Le résultat fut que seuls sept députés du PQ furent élus deux jours plus tard.

La perte de la péréquation fédérale

Il existe plusieurs programmes en vertu desquels le gouvernement fédéral verse de l’argent aux provinces dans leurs champs de compétence constitutionnelle; santé, infrastructures, logement, garderies, etc.

En gros, les sommes versées par Ottawa correspondent à l’importance démographique ou économique de chaque province.

Toutefois, il existe un programme où le Québec semble recevoir bien davantage que sa ‘juste part’; c’est la péréquation.

Celle-ci est un mécanisme de redistribution de la richesse entre les provinces riches du pays vers les provinces qui le sont moins, dont le Québec.

C’est ainsi que le gouvernement québécois reçoit annuellement environ treize-milliards de dollars d’Ottawa.

À chacun des deux référendums sur l’indépendance tenus jusqu’ici, l’argument massue du camp fédéraliste a toujours été que si le Québec se sépare, il perdra les milliards de dollars qu’Ottawa a la bonté de lui verser, plongeant l’économie du Québec dans le marasme et la misère.

Il y a plusieurs années, ce blogue avait publié une analyse économique qui démontrait que le Québec souffrait d’un sous-investissement chronique d’Ottawa dans l’économie québécoise. Un sous-investissement qui était presque totalement corrigé par la péréquation.

En somme, l’argent de nos taxes et de nos impôts qu’Ottawa n’investit pas dans l’économie du Québec, il le verse annuellement sous forme de péréquation en nous faisant croire qu’il nous fait la charité.

Précisons que cette analyse ne tient pas compte des gouffres financiers que sont devenus l’aménagement des chutes Muskrat à Terre-Neuve, la construction du pipeline Trans-Mountain en Colombie-Britannique et la construction des frégates canadiennes en Nouvelle-Écosse.

Par contre, le fédéral fait valoir que depuis des années, il dépense plus au Québec que ce qu’il y perçoit. Ce qui est vrai. Mais n’est-ce pas contradictoire avec ce que nous venons de dire ?

En réalité, lorsque le fédéral fait des déficits colossaux (ce qui est le cas depuis que Justin Trudeau est au pouvoir), Ottawa dépense plus dans chaque province que ce qu’il perçoit. C’est justement pour cela qu’il fait un déficit.

Toutefois, lorsqu’on tient compte du partage de la dette canadienne que le Québec aura à payer lorsqu’il fera son indépendance, cet argument fédéraliste s’effondre.

En présentant le budget de l’an 1, le Parti Québécois a fait la démonstration que l’État québécois, même privé totalement de péréquation, serait mieux financé dans un Québec souverain.

Conclusion

On ne peut pas faire la promotion de l’indépendance sans critiquer le colonialisme canadian.

En effet, le Canada est une puissance coloniale qui, à la différence des autres, ne possède pas ses colonies sous les tropiques. Les siennes sont incrustées dans son territoire.

D’une part, ce sont des dizaines de réserves indiennes régies par un apartheid juridique. Et d’autre part, c’est le Québec dont on favorise l’anglicisation, entre autres par un déluge migratoire qui dépasse largement ses capacités d’intégration.

La preuve la plus irréfutable de ce statut colonial est l’adoption d’une nouvelle constitution sans le Québec par l’ethnie dominante du pays en 1982. Tout comme n’importe quelle métropole coloniale n’hésite pas à imposer sa volonté à ses colonies.

En disant tout haut ce qu’une bonne partie du peuple francoQuébécois pense tout bas, Paul Saint-Pierre Plamondon abandonne brièvement cette image positive et rose bonbon dans lequel les forces fédéralistes aimeraient le voir se limiter.

En réalité, les chemins qui mènent à la liberté sont parsemés d’embuches. Pour être guidé vers l’indépendance, ce que nous avons besoin, c’est d’un chef qui, tout en étant fondamentalement bienveillant envers son peuple, peut également froncer les sourcils et élever le ton lorsque nécessaire.

Il est rassurant de voir que c’est le cas du chef péquiste.

Références :
Coup de la Brink’s
Le colonialisme économique ‘canadian’
Le coût de l’oléoduc Trans Mountain explose à nouveau
Le référendum de la dernière chance, dit St-Pierre Plamondon
Les chutes Muskrat : un éléphant blanc à nos frais
Les miettes fédérales au chantier maritime Davie
Le texte de ‘refondation’ du PQ : le paroxysme de l’insignifiance
L’indépendance permettrait au Québec d’économiser 12 milliards sur 7 ans, selon le PQ
Péréquation fédérale au Canada
Québec solidaire reproche à St-Pierre Plamondon de verser dans le « catastrophisme »

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Le mépris

Publié le 15 avril 2024 | Temps de lecture : 2 minutes


 
Le député libéral René Arsenault est acadien. En 1992, à l’époque où il était fraichement diplômé en droit, son ordre professionnel lui avait refusé le pouvoir d’exercer sa profession parce qu’il ne voulait pas prêter allégeance à la couronne britannique.

Après une bataille qui a duré plusieurs mois, il a finalement pu exercer sa profession sans prêter ce serment.

On doit savoir qu’entre 1755 et 1763, l’armée coloniale anglaise a confisqué les terres et incendié les fermes de douze-mille des dix-huit-mille Francophones d’Acadie parce qu’ils refusaient de prêter allégeance à la couronne britannique.

Ceux-ci furent déportés manu militari en prenant soin d’envoyer séparément les membres d’une même famille dans différentes colonies anglaises.

Pour les Acadiens, prêter serment au roi d’Angleterre est une humiliation et un rappel de leur douloureux passé.

Voilà pourquoi, à la suite de l’abolition au parlement québécois du serment d’allégeance à la monarchie britannique, le député René Arsenault a eu l’idée de présenter un projet de loi semblable à Ottawa.

Le Canada étant ce qu’il est, son projet de loi a été rejeté par une écrasante majorité.

À l’issue du vote, pour ajouter à la déconvenue du député acadien, une bonne partie des députés de la Chambre des communes ont spontanément entonné l’hymne national britannique ‘God save the King’.

À l’instar des défilés orangistes traversant les quartiers catholiques de Belfast. Pour les narguer.

Dans un pays où on retire des bibliothèques le livre ‘N… blancs d’Amérique’ parce que son titre heurte la sensibilité d’une poignée de personnes, on n’hésite pas à soumettre les députés francophones de tout le pays à l’humiliation de prêter allégeance au souverain de leurs conquérants.

Le tout, conformément aux politiques tartufardes d’équité, de diversité et d’inclusion d’Ottawa.

Références :
Déportation des Acadiens
Serment optionnel au roi : le moment de vérité pour un député acadien

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Écrit par Jean-Pierre Martel


La théorie du genre et ses excès

Publié le 16 février 2024 | Temps de lecture : 13 minutes

Le sexe biologique

Contrairement à ce qu’on lit presque partout sur l’internet, le sexe biologique n’est pas ‘attribué’ à la naissance.

Il est constaté à la naissance (si la mère n’a pas subi d’échographie au cours de sa grossesse) et déterminé neuf mois plus tôt.

La détermination du sexe se fait au moment où le spermatozoïde et l’ovule fusionnent leurs bagages génétiques respectifs pour donner naissance à la toute première cellule d’un être humain.

Si le chromosome sexuel de cette nouvelle cellule est XX, cette cellule, multipliée des milliards de fois, formera le corps d’une fillette. Si c’est XY, ce sera un garçon.

Très, très rarement, des personnes seront porteuses d’un chromosome sexuel XXX, XXY ou autre. Mais leur cas dépasse le cadre de cet article.

Le sexe biologique est un fait objectif, mesurable et constant de la naissance à la mort. On ne peut en dire autant du genre.

Le genre, du Cutex™ à la montre-bracelet

Il arrive que des gens soient convaincus d’habiter le mauvais corps. Ou plus exactement, d’habiter un corps qui ne correspond pas à leur personnalité (ou à leur identité) sexuelle.

Voilà pourquoi on a créé la notion de genre.

En réalité, cette notion est aussi arbitraire que l’attribution du genre féminin à ‘chaise’ et du genre masculin à ‘sofa’.

Selon la théorie du genre, un chef d’orchestre qui porte du Cutex™ est une personne de sexe masculin dont le genre est féminin. Mais qui a décidé que le Cutex™ est une ‘affaire de femme’?

Pourquoi ce chef n’est-il pas simplement un homme qui porte du Cutex™ et qui sera tout aussi homme le jour où il l’enlèvera ?

De manière plus générale, n’est-il pas misogyne de croire, peut-être inconsciemment, que la féminité repose sur des artifices et sur les apparences ? En somme, peut-on croire que la féminité est plus profonde que cela ?

À mon avis, sur les milliards d’hommes et de femmes à travers le monde, il y a des milliards de manières différentes (et toutes aussi valables les unes que les autres) d’être un homme ou d’être une femme.

Les montres-bracelets pour femmes existent depuis des siècles. À la fin du XIXe, lorsqu’on a voulu en faire pour hommes, ce fut un échec commercial, les hommes refusant d’en porter puisque cela faisait trop efféminé selon eux.

C’est seulement lors de la Première Guerre mondiale qu’on s’est rendu compte des inconvénients de la montre de poche.

En effet, lorsqu’on devait coordonner l’attaque simultanée de soldats de plusieurs tranchées contre des positions ennemies, chaque soldat, chargé comme un mulet, devait déboutonner son long manteau imperméable — appelé ‘Trench-coat’, issu du mot tranchée — afin de consulter sa montre de gousset, puis reboutonner son manteau d’une main, tenant peut-être son fusil de l’autre, etc.

D’où l’habitude qu’on a prise alors d’attacher, à l’aide de lanières de cuir, sa montre à son poignet. On trouve encore aujourd’hui sur eBay de ces vieilles montres, énormes, datant de cette époque. Évidemment, après la guerre, la mode de la montre-bracelet s’est imposée d’elle-même.

Bref, la théorie du genre ne sert qu’à perpétuer des clichés sexuels relatifs à ce qu’on estime être les caractéristiques d’un ‘vrai’ homme et d’une ‘vraie’ femme. Comme s’il en existait des faux.

Le retour du balancier

Il y a quinze ans, Les Trois accords composaient la chanson Elle s’appelait Serge. Celle-ci raconte l’histoire de Serge qui s’appelait ainsi avant de s’appeler Bianca…

Attiré par l’appât du gain, si ce quatuor avait fait carrière en anglais, leur album In my body serait de nos jours brulé en Floride à l’occasion d’autodafés contre les œuvres woke.

Pourquoi ce mouvement, né du désir de lutter contre les discriminations raciales et ethniques, est-il aujourd’hui la cible d’une guerre culturelle et haineuse livrée par les milieux conservateurs ? Parce qu’il est allé trop loin.

De Serge à Bianca

Il est courant que des enfants s’attribuent mutuellement des surnoms, souvent basés sur leurs défauts physiques. Mais l’école et ses représentants (dont les professeurs) continuent d’appeler ce jeune par son nom véritable.

Toutefois, si un enfant veut qu’on l’appelle par un prénom du ‘sexe opposé’, les écoles québécoises sont obligées de respecter sa volonté et d’inscrire à son dossier qu’il est très important que les parents n’en soient pas informés à moins que l’enfant y consente.

Car au Québec, dès l’âge de 14 ans, l’élève peut s’opposer à ce que ses parents le sachent.

Ceci est contre-productif.

Tout finit par se savoir. Le lien de confiance nécessaire entre les parents et l’école est irrémédiablement brisé lorsque les parents découvrent que l’école complote dans leur dos.

Au contraire, les élèves transgenres et non binaires du Nouveau-Brunswick de moins de 16 ans ont besoin du consentement parental pour qu’un autre prénom soit officiellement utilisé dans la tenue de dossiers et la gestion quotidienne à l’école.

Les toilettes mixtes

Au Québec, toutes les maisons familiales sont équipées de toilettes auxquelles accèdent, sans distinction et tour à tour, les parents et les autres membres de la famille. Peu importe leur sexe.

Arrivés à l’école, par pudeur, tous les petits garçons sont d’abord intimidés à l’idée d’utiliser des urinoirs. Puis finissent par s’y habituer.

Depuis quelque temps, certains réclament l’aménagement de toilettes mixtes à l’école. Ces lieux d’aisance sont constitués de cabines fermées du sol au plafond et de lavabos accessibles à tous.

Sur le site Je suis féministe, on y écrit les graves préjudices causés par les toilettes genrées :

Pisser debout dans un urinoir est la manifestation d’un privilège masculin cis. […] Les personnes trans et/ou non binaires ne sont pas en sécurité dans les toilettes publiques pour hommes. Ce sont des lieux qui portent une lourde charge symbolique patriarcale, hétéronormative et cisnormative et qui ne sont pas ouverts à la diversité sexuelle et de genre.

Préoccupé par des priorités plus importantes, le gouvernement de la CAQ refuse d’autoriser les écoles du Québec à dépenser des millions de dollars afin d’aménager partout des lieux d’aisance mixtes.

Mais supposons que Québec Solidaire prenne le pouvoir et abolisse l’apartheid sexuel des toilettes scolaires.

Que feront les écoliers lorsqu’ils entreront sur le marché du travail ?

Le but de l’école est de transmettre des compétences et de développer des aptitudes tout en préparant l’écolier à sa vie adulte. Or dans la vraie vie, les lieux publics sont généralement équipés de toilettes pour hommes ou pour femmes.

Dépenser des millions de dollars pour retarder une adaptation qui, ultérieurement, sera inévitable est difficilement justifiable.

Un cas fictif, mais plausible

Imaginez le cas d’un élève de 15 ans trop petit pour son âge. Inquiets de sa taille anormale, ses parents veulent consulter leur médecin de famille. Au début, l’enfant — qui en sait la cause — refuse d’y aller, mais cède aux menaces d’être privé de loisirs.

Le médecin ausculte l’enfant. Mais en consultant son dossier médical électronique, il découvre que l’école a référé secrètement l’enfant à un collègue qui lui prescrit des inhibiteurs de puberté. Selon la loi québécoise, le médecin est tenu au secret professionnel.

Afin de respecter la loi, le médecin de famille feint de ne pas savoir quelle est la cause du problème. Les parents insistent. Alors il les réfère à un spécialiste. Ce dernier fait pareil.

Les parents décident d’aller au privé. C’est alors que ce troisième médecin apprend la vérité aux parents (seul à seul puisqu’il viole ainsi la loi).

Furieux, les parents protestent auprès de la direction de l’école. Celle-ci leur répond que c’est la procédure.

Les parents en appellent au ministre de l’Éducation. Celui-ci leur répond que cette procédure est conforme aux politiques d’inclusion et de diversité du gouvernement fédéral auxquelles il ne peut déroger sans risquer des compressions dans les transferts en Santé d’Ottawa.

La clause dérogatoire devenue nécessaire

En juin 2013, le premier ministre canadien a condamné la décision de la province du Nouveau-Brunswick d’obliger l’école à obtenir le consentement des parents avant d’appeler leur enfant mineur(e) par un prénom différent de celui qu’ils ont choisi pour cet enfant à la naissance.

Quelques mois plus tard, le congrès du Parti conservateur adoptait deux résolutions dont la première s’opposait aux transitions de genre sur des mineurs et l’autre opposée aux toilettes non genrées dans les écoles.

Aussitôt, le chef du gouvernement libéral a associé cette résolution à de la haine (sic) contre les personnes trans et/ou non binaires.

Au début de cette année, l’Alberta a dévoilé sa politique sur l’identité de genre. Celle-ci prévoit que le changement de nom à l’école devra se faire avec le consentement des parents dans le cas des enfants de 15 ans ou moins.

Les Albertains de moins de 18 ans ne pourront pas avoir accès à des opérations chirurgicales de transition. Ce qui, de toute manière, ne se fait sur des mineurs dans aucune province, à l’heure actuelle.

De plus, il leur sera interdit de se faire prescrire des bloqueurs de puberté et des thérapies hormonales. Toutefois, peu avant l’accès à leur majorité, à 16 et 17 ans, les adolescents pourront accéder à ces traitements si leurs parents y consentent. Ce qui est trop tard dans le cas des blogueurs de puberté.

Plus controversée est l’obligation du professeur d’obtenir le consentement parental avant de traiter de sujets ‘sensibles’ comme l’identité de genre, l’orientation sexuelle et les relations sexuelles. Ce qui compliquera la tâche de l’enseignant et, dans les faits, poussera les écoliers désireux de parfaire leur éducation sexuelle à consulter des sites pornos.

Le sommet de la rhétorique apocalyptique du fédéral a été atteint par la ministre des Femmes et de l’Égalité des genres et de la Jeunesse. Celle-ci a déclaré qu’il fallait absolument permettre le changement de prénom d’un enfant à l’école à l’insu de ses parents puisque cela pouvait être, pour l’enfant concerné, une question de vie ou de mort (sic).

Auprès avoir appris sur les médias sociaux que menacer de se suicider est le meilleur moyen d’obtenir ce qu’on veut, si un enfant utilise une telle menace, ce qu’il faut faire, c’est de lui apporter un soutien psychologique d’urgence et non de céder immédiatement à son ultimatum.

Il est à noter que les organismes désireux de contester la constitutionnalité de lois provinciales peuvent se prévaloir des millions de dollars qu’Ottawa met à leur disposition par le biais du Programme de contestation judiciaire. Les sommes sont gérées par l’université d’Ottawa (qui sert de façade au fédéral), mais attribuées par un conseil d’administration nommé par le ministère fédéral du Patrimoine.

De fait, il est probable que toutes les lois provinciales qui pallient les excès de la théorie du genre soient contraires à la Canadian Constitution de 1982.

Dans leur empressement à s’opposer à la Loi 101, adoptée cinq ans plus tôt, les concepteurs de la nouvelle constitution ont voulu assurer la suprématie absolue des droits individuels sur les droits collectifs (notamment le droit de la nation québécoise d’assurer sa survie linguistique).

Malheureusement, cette camisole de force constitutionnelle — adoptée sans le Québec par l’ethnie dominante du pays — a érigé des caprices constitutionnels au rang de droits fondamentaux. Ces caprices vont du droit de porter des bijoux en forme de signes religieux au droit de l’enfant de s’appeler comme il veut.

Car les enfants ne sont pas des objets dont les parents sont propriétaires, mais des citoyens qui ont des droits constitutionnels dès la naissance.

Pour remettre un peu de bon sens dans cette affaire, les provinces anglophones sont obligées d’invoquer la clause dérogatoire. Celle-ci leur permet de soustraire aux exigences farfelues d’une constitution qui a très mal vieilli.

Le Québec, lui, a l’avantage d’avoir le choix de se constituer en pays souverain et d’ériger ce nouveau pays sur des bases nouvelles et modernes.

Finalement, les lecteurs intéressés à en savoir davantage au sujet des bloqueurs de puberté et des chirurgies de changement de sexe sont invités à cliquer sur ceci.

Références :
Comment nos écoles abordent-elles l’identité de genre avec les enfants?
Élèves transgenres : Ottawa surveille la Saskatchewan et le Nouveau-Brunswick
La dysphorie de genre chez l’enfant
Le PCJ, annexe de la machine coloniale canadienne
Les chirurgies de transition seront interdites pour les mineurs albertains
Les discussions sur les transgenres n’ont pas leur place au Canada, dit Trudeau
L’expérience tragique du gourou de “la théorie du genre” (1re partie)
L’expérience tragique du gourou de “la théorie du genre” (2e partie)
LGBTQ : Justin Trudeau critique les changements apportés par le N.-B. à la politique 713
Mon expérience non binaire des toilettes pour hommes
Sexe et genre: colère des libéraux et des néodémocrates contre la PM de l’Alberta
Toilettes mixtes : « L’école doit rectifier le tir », estime Bernard Drainville

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Écrit par Jean-Pierre Martel