Le multiculturalisme et la guerre des diasporas au Canada

Publié le 12 septembre 2024 | Temps de lecture du texte : 7 minutes

Introduction

Chaque fois que de la violence éclate dans les banlieues parisiennes, la presse britannique s’empresse d’en imputer la cause à la laïcité française, accusée d’être antimusulmane.

En contrepartie, lorsque des conflits interethniques surgissent dans les villes ouvrières de Grande-Bretagne, les quotidiens français en concluent que c’est la preuve de l’échec du multiculturalisme à assurer la coexistence pacifique des groupes ethniques de ce pays.

Dans tous les cas, c’est souvent une bavure policière ou une exaspération profonde liée au profilage racial exercé par les forces de l’ordre qui est à l’origine du conflit. Bref, la cause est interne à ces pays.

Ce qui est nouveau depuis quelque temps, ce sont les conflits interethniques qui résultent de guerres à l’Étranger.

Plus précisément, le conflit israélo-palestinien et, dans une moindre mesure, la guerre russo-ukrainienne alimentent des affrontements entre concitoyens canadiens.

Contenir la haine

L’expérience des deux Guerres mondiales nous enseigne que lorsque deux pays s’affrontent militairement, la diabolisation de l’autre n’est pas limitée aux dirigeants du pays ennemi, mais s’étend à toute sa population.

Parce qu’au final, le soldat doit obéir aveuglément à l’ordre de tirer ou de bombarder, sans le filtre de sa conscience. Et pour qu’il devienne une simple machine à tuer, cette détestation doit s’étendre à chacun des soldats du pays ennemi, voire à n’importe quel de ses citoyens.

Israël et l’Ukraine sont des alliés militaires du Canada aux prises avec un conflit armé. Pour faire accepter aux contribuables les sommes que le Canada consacre à les aider, Ottawa doit diaboliser leurs adversaires. Ce qui s’appelle la fabrication du consentement.

Mais voilà que cette stratégie dérape.

La haine des Russes et de leur culture

Au lieu de simplement haïr Vladimir Poutine, une certaine partie des Canadiens se sont mis à haïr également leurs concitoyens de descendance russe et à s’attaquer aux entreprises qu’ils possèdent au pays.

De plus, sous la menace d’internautes anonymes, le milieu de la culture se voit dans l’obligation d’annuler des spectacles mettant en vedette des Russes ou des artistes canadiens de descendance russe.

Au lieu d’en appeler au calme, les dirigeants canadiens poussent leur aveuglement jusqu’à applaudir au Parlement un ex-soldat d’une division ukrainienne pro-nazie.

Plus grave encore, la vice-première ministre du Canada réclamait récemment qu’un documentaire portant sur l’armée russe soit retiré de la programmation du Festival international du film de Toronto.

En raison de son sujet pointu et de sa durée de plus de deux heures, ce film n’était pas destiné à intéresser un large public, même en temps de paix.

Si la projection, prévue demain, devait être maintenue, le cri de ralliement hostile de Chrystia Freeland, propagée sur les médias sociaux, mettra en danger la sécurité des festivaliers qui choisiront de le voir.

Par cette tactique, la vice-première ministre canadienne accepte à l’avance de porter l’odieux de la violence qu’elle aura suscitée. De cette manière, elle se montre digne de son grand-père pro-nazi. Ce dernier n’a jamais tué de Slaves; il a simplement encouragé les autres à le faire.

La haine contre les Canadiens de descendance juive

Depuis l’attaque du Hamas en Israël et la réplique massive de ce dernier, plus d’une centaine d’institutions juives au pays ont été la cible de méfaits.

De plus, sur un bon nombre de campus à travers le pays, des manifestants palestiniens, appuyés par des sympathisants, crient des injures à l’égard de manifestants de descendance israélienne. Et inversement. Comme s’ils étaient citoyens de pays différents.

Ici encore, la haine entre Canadiens est inacceptable. Peu importe l’ethnie concernée et ses sympathies légitimes à l’égard de ses co-religionnaires à l’Étranger.

Il y a deux semaines, cinquante-deux membres arabes et musulmans du Parti libéral du Canada ont annoncé publiquement leur refus d’aider leur parti à gagner une prochaine élection partielle au Québec. C’est leur choix.

Ceux-ci écrivent : « Vous ne pouvez pas profiter de notre travail au pays tout en perpétuant notre déshumanisation à l’étranger.»

Aucun Arabe et aucun Musulman canadien n’est déshumanisé à l’Étranger.

Quand les signataires parlent de leur déshumanisation à l’Étranger, ils parlent en tant que membres du peuple palestinien ou d’un des peuples arabes dont ils se réclament.

En somme, ils se voient d’abord et avant tout comme des membres d’une diaspora au Canada.

De la même manière, les Palestiniens qui protestent à McGill sont en bonne partie des étudiants américains ou canadiens-anglais dont la loyauté première est à l’égard de leur peuple au Proche-Orient et non à l’égard des Québécois qui subventionnent niaiseusement leurs études.

Conclusion

Depuis toujours, les recensements des États-Unis dénombrent les diverses ‘races’ qui peuplent son territoire (ci-dessous).

De manière générale, l’appartenance ethnique est la fondation sur laquelle sont édifiées les sociétés anglo-saxonnes; ce sont des sociétés inégalitaires et racistes au sein desquelles chacun doit demeurer à sa place.

Le multiculturalisme est la façade idéologique de ce tribalisme; il consiste à encourager les citoyens, non pas à se définir comme Canadiens avant tout, mais comme membres de sa tribu ethnique.

Plutôt que de promouvoir l’égalité de tous les citoyens aux yeux de l’État, le multiculturalisme exacerbe la tendance naturelle au repli ethnique et renforce le sentiment d’appartenance à sa tribu.

Comme en Inde, on aboutit donc à une série de castes régies par des tabous, dont l’interdiction d’accomplir des tâches réservées aux gens d’une caste différente de la sienne.

Par exemple, se porter à la défense des peuples autochtones est inacceptable pour les metteurs en scène (ex.: Robert Lepage), les enseignants universitaires (ex.: Alexandra Lorange) et les cinéastes (ex.: Michelle Latimer) qui n’appartiennent pas à la tribu appropriée.

Et puisque la politique d’Équité, de diversité et d’inclusion du fédéral est basée (entre autres) sur des considérations raciales, il est essentiel de débusquer ceux qui n’ont pas la pureté du sang requise.

Depuis un demi-siècle, le multiculturalisme se pare des attributs de la Vertu et de la Justice.

Mais il a suffi qu’éclatent des guerres beaucoup plus proches de nous, des guerres auxquelles certains Canadiens peuvent d’identifier, pour que le multiculturalisme mène à des affrontements tribaux entre Canadiens, voire à une fragmentation sociétale.

Ce n’est une coïncidence si les campements pro-palestiniens sont apparus d’abord aux États-Unis pour se répandre ailleurs en Occident et que la détermination des protestataires y a été plus grande; c’est qu’il s’agit d’une société fragmentée où le patriotisme ostentatoire n’est que de façade.

Comme en Ukraine, combien de millions de jeunes Américains préfèreraient se réfugier à l’Étranger (au Canada, par exemple) plutôt que de défendre leur pays s’il était attaqué ?

C’est ça, le multiculturalisme.

Références :
Des menaces et des alertes à la bombe visent plus d’une centaine de groupes juifs au pays
Détecter les « faux Autochtones » dans les universités
Documentaire sur des soldats russes en Ukraine : Chrystia Freeland s’indigne
Équité, diversité et inclusion : la nouvelle discrimination multiculturelle
Gaza : des employés du PLC menacent de boycotter la partielle
La convergence culturelle : communion et symbiose
La fabrication du consentement politique : un exemple américain
La guerre a changé la vie de Canadiens d’origine russe
Le grand-père de la vice-première ministre du Canada, un collabo nazi
Le marécage du multiculturalisme canadien
Le multiculturalisme ou le tribalisme des sociétés anglo-saxonnes
Un historien du génocide face à Israël

Paru depuis : Le TIFF invoque des raisons de sécurité pour suspendre les projections de Russians at War (2024-09-13)

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Les cinq prisonniers canadiens en Arabie

Publié le 10 septembre 2024 | Temps de lecture du texte : 4 minutes

Introduction

À l’époque où le blogueur Raïf Badawi purgeait sa peine en Arabie saoudite, Washington prévenait ses citoyens que s’ils devaient être emprisonnés dans ce pays, les États-Unis ne pourraient pas faire grand-chose pour eux.

Par contre, le ministre des Affaires étrangères du Canada préférait susciter l’espoir. Le jovialiste François-Philippe Champagne ne ratait jamais une occasion de dire qu’il était en discussion avec le ‘gouvernement’ (sic) d’Arabie saoudite et qu’il avait bon espoir qu’il serait libéré bientôt par ‘Sa Majesté’ (sic) le prince Mohammed ben Salmane (ou MBS, surnommé ‘Mister Bone Saw’).

Évidemment, le Canada exerçait ses pressions par voie diplomatique. De toute évidence, si cela avait été par la poste, le ministre Champagne n’aurait pas hésité à lécher le derrière des timbres à l’effigie du Prince.

Dès que le public s’est désintéressé du cas de Badawi, on n’a plus entendu parler des pourparlers canado-saoudiens à son sujet. Si bien que Badawi a purgé ses dix ans de prison.

Les cinq Canadiens

Mélanie Joly, ministre des Affaires étrangères du Canada

On apprend ce matin que cinq Canadiens sont présentement détenus en Arabie saoudite.

L’un d’eux est un citoyen canadien, né en Arabie saoudite, mais qui ne possède pas la citoyenneté de ce pays. Depuis un an et demi, ce Canadien pâtit dans les geôles saoudiennes sans procès ni jugement.

Les cinq auraient ‘J’aimé’ ou retransmis des messages écrits par d’autres sur X, le média social d’Elon Musk. Ces messages accusaient le régime saoudien d’être une dictature.

Or l’Arabie n’a jamais hésité à incarcérer et à fouetter tous ceux qui soutiennent cela, dut-elle les débiter à la tronçonneuse pour leur faire entendre raison.

Parmi les commentaires publiés en réponse au texte de Radio-Canada, on voit quelques personnes qui aimeraient savoir, parmi les cinq prisonniers canadiens, combien sont nés au pays.

À mon avis, cela n’a pas d’importance; tous les Canadiens, nés ici ou ailleurs, paient des impôts à Ottawa et conséquemment, ont le même droit à la protection du Canada.

Jusqu’ici, la ministre actuelle des Affaires étrangères du Canada, Mme Mélanie Joly, est demeurée discrète à leur sujet.

Elle a raison; les pourparlers diplomatiques de m’importe quel pays se font toujours derrière des portes closes.

Conclusion

Il y eut une époque, encore récente, où les pays occidentaux étaient craints.

Mais en adoptant des sanctions économiques contre la Russie qui se sont retournées contre l’Europe, et en réduisant dangereusement leur arsenal militaire afin d’aider vainement l’Ukraine, les pays occidentaux ont saboté l’effet dissuasif de leur puissance économique et militaire.

Si bien que de nos jours, les pays qui sont candidats à l’adhésion à l’Otan sont des pays pauvres d’Europe de l’Est ou du Caucase, alors que les pays les plus riches du Sud global se pressent aux portes des BRICS.

Le Canada doit assumer la place qu’il occupe maintenant dans les affaires mondiales; celle d’une puissance mineure au sein d’un Occident en déclin.

Conséquemment, le Canada doit prévenir explicitement toute personne qui veut se rendre dans la dictature saoudienne; si vous êtes arrêtée (peu importe les motifs) dans ce pays, le Canada ne pourra rien faire pour vous.

À Ottawa, aura-t-on enfin le courage de dire la vérité ?

Références :
Cinq Canadiens détenus en Arabie saoudite, Ottawa discret sur leur sort
La guerre russo-ukrainienne et la vassalisation de l’Europe
La leçon du fiasco occidental en Ukraine
Le ministre François-Philippe Champagne, paillasson de l’Arabie saoudite
Les députés conservateurs bloquent la citoyenneté d’honneur pour Raif Badawi
Un Canadien en prison en Arabie saoudite depuis plus d’un an… pour des tweets

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Écrit par Jean-Pierre Martel


La surtaxe canadienne de 100 % sur les voitures chinoises

Publié le 8 septembre 2024 | Temps de lecture du texte : 6 minutes

Introduction

À la suite de Washington, Ottawa a décidé d’imposer une surtaxe qui doublera le prix canadien des véhicules électriques (VE) chinois.

Cette mesure entrera en application dans deux mois et s’appliquera aux VE importés de Chine et non aux VE fabriqués en Amérique du Nord par des fabricants chinois.

Le message est clair : « Si vous voulez éviter la surtaxe, venez fabriquer vos voitures chez nous.»

Dans sa chronique dans le Journal de Montréal, Michel Girard critique cette guerre commerciale, lui reprochant de se faire sur le dos des consommateurs.

Le chroniqueur suggère également qu’Ottawa a pris cette décision en se basant sur la considération suivante.

En 2023, nos échanges commerciaux avec les États-Unis représentaient 595 milliards$ d’exportations et 374 milliards$ d’importations.

Alors qu’en Chine, ces échanges étaient de 30,5 milliards$ d’exportations (vingt fois moins) et 89 milliards$ d’importations (quatre fois moins).

Évidemment, cela ne tient pas compte du fait que beaucoup des produits américains que nous importons sont des produits chinois portant une étiquette américaine qui nous sont revendus beaucoup plus cher.

Les raisons officielles d’Ottawa

Malgré sa manière toute ‘trumpienne’ de faire de la politique, le chef de l’opposition officielle s’est bien gardé de critiquer le premier ministre Justin Trudeau.

Pour la simple et bonne raison que s’il était au pouvoir, il ferait pareil.

Officiellement, Ottawa justifie sa décision en accusant la Chine de subventionner la fabrication de ses VE et conséquemment, de surproduire.

De plus, la surtaxe canadienne serait une bonne chose puisqu’elle servirait à protéger les emplois des travailleurs œuvrant dans l’industrie automobile.

Protéger nos emplois

Le protectionnisme crée un marché captif qui protège nos industries de la concurrence étrangère.

Toutefois, classé selon la taille de sa population, le Canada occupe le 39e rang mondial. La petitesse de son marché intérieur ne permet pas à nos industries de profiter d’économies d’échelle. Pour ce faire, le Canada doit exporter.

Voilà pourquoi le Canada est un apôtre de la libre circulation des biens et des services.

Ceci étant dit, il y a souvent de très bonnes raisons pour faire exception à une règle, si bonne soit-elle.

À l’époque encore récente où nos politiciens de droite niaient la réalité des changements climatiques et soutenaient que les gaz à effet de serre aidaient les plantes à mieux pousser (sic), la Chine misait sur la voiture électrique.

Lorsque les pays occidentaux ont été confrontés, concrètement, aux effets couteux des changements climatiques et ont tardivement décidé de décarboner leur économie, la Chine était prête à leur fournir ce qu’il leur fallait pour y parvenir, dont des VE.

Pour pallier leur retard industriel dans ce domaine, les États-Unis ont donc décidé d’ériger des barrières commerciales derrière lesquelles ils peuvent tenter de rattraper la Chine. Une fois qu’ils se sentiront moins menacés, on peut s’attendre à ce qu’ils baissent la garde.

D’ici là, semer l’idée selon laquelle il faut recourir au protectionnisme pour protéger nos emplois alimente les milieux qui prêchent le repli sur soi.

Les subventions

Il est vrai que la Chine subventionne les secteurs de pointe voués à assurer sa suprématie commerciale, dont la construction des VE.

De leur côté, les pays riches d’Occident se sont lancés dans une surenchère aux subventions pour attirer chez eux les constructeurs de VE ou de batteries électriques.

De plus, jusqu’à tout récemment, les pays occidentaux subventionnaient l’achat d’un VE.

Lorsque Canada pointe un doigt accusateur et fronce les sourcils contre les pays qui accordent des subventions à leurs carrossiers, il aurait intérêt à ne pas le faire devant un miroir.

La surproduction chinoise

Tous les pays exportateurs au monde produisent au-delà des besoins de leur marché intérieur. Lorsqu’on limite la production aux besoins de ses propres consommateurs, cela s’appelle la gestion de l’offre.

Pour les États-Unis, la gestion de l’offre, c’est du communisme.

Voilà pourquoi, à chaque nouveau traité de libre-échange avec nos voisins du Sud ou avec l’Union européenne, le Canada ampute toujours un peu plus la gestion de l’offre sur l’autel du néolibéralisme.

Mais surprise ! Voilà que nos dirigeants politiques aimeraient que la Chine — déjà communiste selon la rumeur — le devienne davantage en adoptant la gestion de l’offre. Mao Zedong serait ravi…

Ce qui montre bien qu’il ne s’agit pas des vrais motifs de la surtaxe canadienne.

Les vraies raisons

Face à la possibilité que la Chine interdise l’importation de canola canadien — ce qui représenterait des pertes d’un milliard de dollars pour nos agriculteurs — on s’inquiète.

En réalité, le Canada n’a pas le choix.

Les voitures électriques chinoises offrent beaucoup plus pour le même prix.

Le Canada ne peut pas se permettre de servir de lieu de transit à la contrebande de voitures chinoises destinées aux États-Unis. Ce qui obligerait Washington à appliquer ses mesures protectionnistes antichinoises contre le Canada.

Ce serait alors une catastrophe pour l’industrie nord-américaine de la construction automobile, dont l’intégration nous est très profitable.

La géographie détermine l’histoire des peuples.

Nous profitons grandement du voisinage de la plus grande économie du monde, soit le marché américain.

Ce qui comporte d’immenses avantages, mais parfois quelques inconvénients. Comme quoi on ne peut pas tout avoir dans la vie.

Si la Chine ferme ses frontières au canola canadien, Ottawa pourra toujours gémir et entretenir sa belle relation sadomasochiste avec la Chine depuis l’affaire Huawei.

En réalité, nous devons assumer notre destin. Si on regarde ailleurs dans le monde, sommes-nous tant à plaindre ?

Références :
Des pressions chinoises sur le canola pourraient coûter 1 G$
L’affaire Huawei : dure pour le Canada, la vie de caniche américain
La guerre aux véhicules électriques chinois se fait sur le dos des consommateurs
Liste des pays par population
Pendant ce temps en Chine : la construction automobile
Tarifs de 100% sur les véhicules chinois: «J’ai peur que ça augmente le prix de beaucoup»

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Postes Canada : langue de service vs langue de travail

Publié le 22 août 2024 | Temps de lecture du texte : 4 minutes

Introduction

Lundi dernier, on apprenait l’intention de Postes Canada d’offrir davantage de services en anglais au Québec.

Cela est normal; la région montréalaise s’anglicise et conséquemment, la clientèle anglophone augmente. Postes Canada, comme toutes les entreprises qui offrent leurs services directement à la population, doit faire face à cette demande accrue.

La langue de service

La Loi 101 a pour but d’assurer qu’on puisse vivre en français au Québec, ce qui implique le droit d’un francophone d’être servi dans sa langue. Cette loi n’a jamais eu pour but d’empêcher un angloQuébécois d’être servi dans la sienne.

Parmi les locuteurs anglophones, l’État québécois peut distinguer entre les angloQuébécois ‘de souche’ et les autres.

Mais on ne doit pas s’attendre à ce qu’il soit nécessaire d’apporter son certificat de naissance pour pouvoir acheter un timbre en anglais au Québec.

Il en est autrement de la langue de travail.

La langue de travail


 
Plus de quatre-millions de Québécois sont unilingues français. Évidemment, ceux-ci peuvent baragouiner quelques mots d’anglais, mais ne peuvent pas postuler pour un poste où le bilinguisme est exigé.

Donc, toute exigence de la connaissance de l’anglais lorsque cela n’est pas nécessaire correspond à une discrimination à l’embauche exercée contre la moitié de la population québécoise.

Prenons un cas concret. Il est normal que les employés à la réception d’un hôtel montréalais soient tous bilingues. Et il est normal d’avoir une personne bilingue à la comptabilité au cas où un touriste voudrait des détails sur sa facture.

Mais il n’est pas normal d’exiger le bilinguisme à tout le personnel de son département de comptabilité au cas où il recevrait un appel en anglais : si cela arrive, on passera plutôt l’appel à la personne bilingue.

L’exigence abusive de l’anglais, c’est ce que font généralement les sociétés fédérales lors de l’embauche de leur personnel. Et c’est le cas à Postes Canada, que ce soit à l’embauche de personnes pour livrer le courrier que pour travailler à ses centres de tri.

Lorsqu’on apprend que Postes Canada viole la Loi 101 à l’embauche, il ne lui suffit pas de s’excuser; elle doit congédier la personne embauchée par erreur et la remplacer, selon le cas, par un francoQuébécois unilingue ou par un Québécois (francophone ou anglophone) bilingue.

Ce congédiement est un service qu’on rend à l’employé unilingue anglais puisque c’est la meilleurs manière de le motiver à apprendre la langue commune du Québec.

Règle générale, il faut parler la langue de Shakespeare pour s’épanouir dans les provinces anglaises du pays. De manière similaire, il n’y a pas de place pour l’unilinguisme anglais sur le marché du travail au Québec.

À preuve, la Loi 101 oblige même l’employeur anglophone à s’adresser en français à son personnel francophone. Donc, même un patron doit savoir parler français : à plus forte raison un employé.

Conclusion

La controverse au sujet de l’augmentation de l’offre de services en anglais par Postes Canada est une tempête dans un verre d’eau. Le problème est ailleurs.

Par contre, il est regrettable que nos taxes à Ottawa (qui épongent les déficits colossaux de Postes Canada) servent à angliciser le Québec, notamment par la discrimination à l’embauche exercée par les entreprises fédérales contre la moitié de la population québécoise.

C’est entre autres par ce moyen que s’exerce la colonisation anglaise du Québec.

Références :
Anglicisation de Montréal depuis quinze ans
Année 2023 – Postes Canada enregistre une perte de 748 millions avant impôt
Emplois «in English» à Postes Canada: «Une nouvelle preuve du mépris du gouvernement fédéral»
«C’est bourré d’unilingues»: pas besoin de parler français pour être facteur au Québec en 2024
Postes Canada offrira davantage de services en anglais au Québec

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Faire disparaitre la pollution par magie

Publié le 17 juillet 2024 | Temps de lecture du texte : 5 minutes
Lac Louise, en Alberta

La restauration de sites miniers abandonnés

L’article 101 de la loi sur les mines permet la création d’une mine si un plan de réaménagement et de restauration minière a été préalablement approuvé par le ministère des Ressources naturelles et de la Faune.

L’article 232.4 de cette loi oblige la compagnie minière à fournir une garantie dont le montant correspond aux couts anticipés de ce plan.

Mais restaurer coute cher.

La magie au service de l’environnement

Depuis des mois, les démarcheurs des compagnies minières se relaient aux antichambres ministérielles afin de les convaincre d’une brillante idée.

Au lieu d’enfouir des résidus miniers dans des réservoirs souterrains imperméables, puis de les recouvrir de manière à redonner au site minier un aspect ‘présentable’, ne serait-il pas beaucoup plus économique de jeter tous ces résidus dans nos lacs afin de les faire disparaitre instantanément ? Comme par magie…

L’idée vous fait sourire ? Lisez bien ce qui suit.

Après une bataille juridique de quinze ans contre deux organismes de défense de l’environnement, le gouvernement norvégien a reçu en début d’année la bénédiction des tribunaux du pays pour autoriser Nordic Mining à déverser 170 millions de tonnes de résidus toxiques dans le fjord Førde.

Selon l’Institut norvégien de recherche marine (Havforskninginstituttet), cette décharge sera située à proximité d’un des sites dont la biodiversité marine est parmi les plus riches du pays.

Après la Turquie et la Papouasie—Nouvelle-Guinée, la Norvège devenait ainsi le troisième pays au monde à permettre le déversement maritime des déchets miniers.

Trente-sept lacs à polluer

Il y a deux ans, le gouvernement de la CAQ autorisait Minerai de fer Québec (filiale d’une minière australienne) à jeter ses résidus miniers dans des lacs. Et ce, malgré l’avis contraire du Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE) et malgré l’opposition des groupes environnementalistes.

Mais il restait à obtenir l’appui d’Ottawa.

C’est fait. Le fédéral vient d’accorder à cette minière la permission de jeter 408 millions de mètres cubes de résidus miniers dans trente-sept lacs du Québec.

Toutefois, cette permission est assortie d’une contrepartie, soit l’obligation de dépolluer, ailleurs, un territoire d’une superficie équivalente à ces 37 lacs, 1,56 km².

On connait la chanson.

Au cours de la campagne électorale fédérale de 2019, Justin Trudeau promettait de faire planter deux-milliards d’arbres en contrepartie de la construction d’un pipeline traversant les montagnes Rocheuses.

Cinq ans plus tard, le pipeline est construit. Mais la contrepartie se fait attendre; en avril dernier, Ottawa annonçait que la plantation (embryonnaire jusqu’ici) des deux-milliards d’arbres commencerait véritablement bientôt.

La nature d’un lac

La mine de fer en question est située à proximité du lac Bloom, à 747 mètres d’altitude.

Les 37 lacs qui serviront de dépôts de résidus miniers ne sont pas des bassins d’eau morte. L’eau s’y renouvèle par le biais de sources qui les alimentent ou qui en font la vidange, et enfin par le biais de canaux aquifères qui relient ces lacs à des nappes phréatiques situées au travers du roc.

Lorsque des résidus miniers s’accumulent hors du sol, l’eau de pluie n’a que quelques secondes pour solubiliser ce qui se trouve à leur surface. Baignant dans un lac, les mêmes résidus offrent à l’eau la possibilité de se minéraliser pendant un temps considérable.

Jeter de grandes quantités de roches dans un lac libère les acides et les solvants utilisés par le processus d’extraction et de raffinage. Inévitablement, ces lacs pollueront les nappes phréatiques auxquelles ils sont reliés, de même que les cours d’eau en surface que ces nappes phréatiques alimentent.

La loi québécoise sur les mines permet l’exploitation minière des cours d’eau à faible débit et des plans d’eau (lacs et étangs). Les minières peuvent y faire ce qu’elles veulent à la condition de restaurer le site à la fin de l’exploitation minière.

La permission accordée à Minerai de fer Québec est une exemption implicite de l’obligation de restaurer.

On voit mal le ministère des Ressources naturelles s’équiper de scaphandres pour vérifier si, à la fermeture du site, cette multinationale a oublié une roche au fond d’un lac.

Les résidus engloutis seront donc là pour de bon.

Conclusion

Selon le ministre fédéral de l’Environnement, la destruction des 37 lacs québécois est nécessaire (sic) puisque les métaux extraits de cette mine seront utiles à la transition énergétique. Bref, leur destruction est un sacrifice sur l’autel de l’environnement.

C’est aussi la chanson utilisée par la CAQ pour faire accepter aux citoyens de Limoilou le sacrifice de respirer cinq fois plus de poussière de nickel, probablement cancérigène. Parce que ce métal est utile à la transition énergétique.

En d’autres mots, pour combattre la pollution de l’air et les bouleversements climatiques qui en découlent, il est nécessaire d’empoisonner l’eau et le sol.

Alors, il reste quoi ?

Références :
Historic lawsuit to save the Førdefjord
La destruction de 37 lacs est nécessaire, selon Steven Guilbeault
La plantation de deux milliards d’arbres commencera ce printemps
Norway to allow mining waste to be dumped in fjords
Seuls 8,5 millions des 2 milliards d’arbres promis par Justin Trudeau ont été plantés

Détails techniques : Olympus OM-D e-m5 mark II + objectif M.Zuiko 7-14mm F/2,8 — 1/4000 sec. — F/2,8 — ISO 200 — 7 mm

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Écrit par Jean-Pierre Martel


La mauvaise foi du juge Galiatsatos

Publié le 28 mai 2024 | Temps de lecture du texte : 7 minutes

Introduction

Le 15 aout 2018, soit huit jours avant de déclencher des élections générales, le gouvernement libéral de Philippe Couillard faisait accéder cinq avocats à la magistrature. L’un d’eux est Dionisios (ou Dennis) Galiatsatos.

Depuis, l’honorable Galiatsatos a acquis une renommée internationale pour avoir, dans un de ses jugements, écrit qu’adresser un doigt d’honneur était un droit constitutionnel au Canada.

De quoi s’agissait-il ?

Un jugement hors sujet

Dans cette affaire, après avoir entendu le témoignage irréfutable de l’accusé, l’avocate de la poursuite, réalisant que sa cause était perdue, invitait elle-même le juge Galiatsatos à innocenter l’accusé.

Le magistrat aurait pu rejeter la plainte séance tenante. Mais il a plutôt décidé de prendre le tout en délibéré et de s’allouer deux semaines pour écrire un jugement dans lequel il déclare, effectivement, qu’adresser un doigt d’honneur est un droit constitutionnel.

Malheureusement, cette décision est hors sujet puisque ce qu’on reprochait à l’accusé, ce n’était pas d’avoir adressé un doigt d’honneur à ses voisins, mais de les avoir menacés de mort.

Voilà pourquoi il s’agissait d’une cause criminelle.

Alors pourquoi écrire 26 pages inutilement ?

Meubler son temps

À l’époque, le juge Galiatsatos — comme tous les juges de la Cour du Québec — avaient beaucoup de temps libre.

Un an avant le jugement en question, Me Lucie Rondeau, juge en chef de la Cour du Québec, ordonnait une grève du zèle des juges sous son autorité.

Pour forcer le ministre de la Justice du Québec à nommer plus de juges bilingues, Me Rondeau était prête à provoquer artificiellement une thrombose judiciaire pour parvenir à ses fins.

Zélé, le juge Galiatsatos avait décidé de se trainer les pieds.

Une ‘injustice’ tirée par les cheveux

Depuis l’adoption de la loi 96 — qui renforce timidement la Loi 101 — un grand nombre de juges ultra-fédéralistes trépignent à l’idée d’invalider une ou plusieurs de ses dispositions. Comme on l’a déjà fait pour des pans entiers de la Loi 101, devenue l’ombre d’elle-même.

Parmi ces juges ultra-fédéralistes, on compte l’honorable Galiatsatos.

Le premier paragraphe de l’article 10 de la loi 96 se lit comme suit :

Une version française doit être jointe immédiatement et sans délai à tout jugement rendu par écrit en anglais par un tribunal judiciaire lorsqu’il met fin à une instance ou présente un intérêt pour le public.

En d’autres mots, lorsqu’un jugement est rendu en anglais au Québec, il doit être accompagné de sa traduction française. De plus, leur publication conjointe doit se faire promptement.

Concrètement, il ajoute une nouvelle tâche aux magistrats; celle de s’assurer de la traduction française d’une décision en anglais afin de publier les deux conjointement.

Traduire officiellement une décision juridique prend habituellement quelques jours.

Dans un jugement de 34 pages rendu en anglais plus tôt ce mois-ci, le juge Galiatsatos a estimé que ce retard prolongera l’anxiété des Anglophones en attente d’un jugement puisqu’ils devront attendre la traduction française avant de connaitre la décision du tribunal rédigée en anglais.

Selon la traduction de Radio-Canada, le juge écrit :

Ultimement, dans un monde réel, les accusés anglophones seront moins bien traités que les accusés francophones puisqu’ils devront attendre plus longtemps avant de connaitre leur sort.

Dans cette cause, une automobiliste anglophone était accusée d’avoir entrainé la mort d’une cycliste francophone.

Puisque le décompte pour porter un jugement en appel commence à partir de la date du jugement (le 24 mai, dans ce cas-ci), et non de la date de sa traduction (qu’on attend toujours), pourquoi la famille francophone de la cycliste décédée devrait-elle avoir moins de temps que l’accusée anglophone pour analyser le jugement et pour décider ou non de porter la cause en appel ?

À partir du 1er juin prochain, l’article 10 de la loi 96 entrera en vigueur. Dans une cause semblable à celle-ci, cet article ne corrigera-t-il pas l’injustice dont nous venons de parler puisqu’alors, les deux parties prendront connaissance du jugement en même temps ?

Quant à savoir pourquoi cette exigence ne s’applique pas aux jugements en français, c’est que si tous les jugements étaient systématiquement accompagnés de leur traduction, le Québec serait une province bilingue. Ce qui n’est pas le cas.

Pour terminer, le juge estime que c’est Ottawa qui a autorité sur le Code criminel et conséquemment, que le Québec a outrepassé ses pouvoirs en exigeant la traduction française systématique des jugements en anglais rendus dans des causes criminelles.

En réalité, c’est Ottawa qui détermine ce qui constitue un crime en vertu du Code criminel. Mais ce sont les provinces qui administrent l’appareil judiciaire et régissent son fonctionnement.

Conclusion

L’an dernier, le juge Galiatsatos se trainait les pieds dans le but de contribuer au combat corporatiste mené par la juge Rondeau. Le voilà maintenant soucieux de rendre jugement le plus rapidement possible.

S’il est vrai qu’il n’est jamais trop tard pour bien faire, il arrive parfois que ce soit prématuré.

Puisque l’article 10 entrera en vigueur dans quelques jours, la charge du juge Galiatsatos contre cet article de loi est tout simplement prématurée et hors sujet.

Évidemment, le juge Galiatsatos aurait pu se trainer les pieds au-delà de cette date pour rendre son jugement. Et là, évidemment, il aurait pu accuser la loi 96 de retarder la justice.

Mais il n’a pas pu résister à l’envie de faire parler de lui.

Si bien que sa décision à ce sujet est aussi futile que sa décision de reconnaitre le doigt d’honneur comme un droit fondamental au Canada.

Dans ce cas-ci, cela oblige le procureur général à porter ce jugement en appel. Ce qui pénalise l’accusée anglophone qui devra assumer de nouveaux honoraires afin que son avocat plaide pour elle devant la Cour d’appel du Québec. En plus d’avoir à attendre pour connaitre la décision définitive des tribunaux.

Le regard tourné vers son nombril, le juge Galiatsatos ne se rend pas compte qu’il nuit à la cause qu’il croit défendre.

En faisant prématurément flèche de tout bois, la mauvaise foi de ce juge contribue au préjugé selon lequel une partie des magistrats au Québec sont de petits soldats du colonialisme canadian et à ce titre, ne ratent jamais l’occasion d’essayer de saboter les efforts légitimes que nous entreprenons pour assurer la pérennité du français au Québec.

Références :
Anglicisation du Québec : l’omelette de la loi 96
Bilinguisme des magistrats : la capitulation du ministre Simon Jolin-Barrette
Les familles Caïn et Abel
Juge et partie
Présenter un doigt d’honneur constitue un droit fondamental, estime un juge québécois
Prosecutor who convicted Richard Henry Bain nominated as judge
Texte final de la loi 96
Un juge du Québec décrète que la loi 96 est incompatible avec le Code criminel

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Les collabos du colonialisme canadian (2e partie) : l’ensemble des députés libéraux à Ottawa

Publié le 15 mai 2024 | Temps de lecture du texte : 11 minutes

L’adoption de la constitution de 1982

À la suite d’une séance ultime de négociation tenue secrètement en l’absence du Québec, les provinces anglophones du Canada et le gouvernement canadien ont adopté une nouvelle constitution, entrée en vigueur en 1982.

On verrait mal la Grande-Bretagne se doter d’une constitution sans l’assentiment de l’Écosse, du pays de Galles ou de l’Ulster. Mais la députation québécoise à Ottawa — composée à l’époque de 74 députés libéraux et d’un seul député conservateur — n’ont pas vu de problème à changer la loi fondamentale du pays sans l’assentiment du Québec.

Rien n’est plus révélateur du statut colonial du Québec au sein du Canada que l’adoption de cette constitution par l’ethnie dominante du pays. Tout comme n’importe quelle métropole n’hésite pas à imposer sa volonté à ses colonies.

Mais pourquoi Ottawa a-t-il soudainement senti la nécessité d’adopter une nouvelle constitution alors que, jusque-là, celle de 1867 semblait convenir ?

C’est qu’en 1977, le parlement québécois adoptait la Loi 101. Or celle-ci introduisait une nouvelle notion juridique, celle des droits collectifs, plus précisément ceux nécessaires à la protection du français au Québec.

D’où l’urgence, pour Ottawa, d’adopter une constitution qui, au contraire, proclamerait la suprématie absolue des droits individuels, dont celui de s’assimiler au groupe ethnique de son choix.

Pour défendre la légitimité de cette camisole de force constitutionnelle, Ottawa s’est servi des députés fédéraux du Québec comme caution morale.

Puisque 74 députés du Parti libéral du Canada (PLC) couvraient la presque totalité du territoire québécois, Ottawa estimait que ceux-ci étaient aussi représentatifs de la volonté populaire que les députés de l’Assemblée nationale du Québec puisque la population québécoise avait à la fois voté pour les uns et les autres.

En réalité, le parlementarisme d’inspiration britannique soumet les députés à la discipline du parti. Cette discipline s’exerce en privant le député dissident de la rémunération rattachée à la représentation de son parti sur les comités du parlement.

Or à Ottawa, les députés libéraux du Québec sont toujours minoritaires au sein de leur formation politique. Quand vient le temps de défendre les intérêts du Québec, ils le peuvent seulement dans la mesure où leurs collègues anglophones, majoritaires, y consentent.

Ce qui signifie que lorsque le Parti libéral du Canada est au pouvoir, ses députés québécois sont condamnés à défendre ses politiques, même si cela les oblige à trahir les intérêts du Québec.

Ce fut le cas en 1982.

La nouvelle loi sur les langues officielles

De 2006 à 2016, l’usage du français a reculé parmi les 185 500 travailleurs québécois qui œuvrent dans les 3 210 entreprises privées de compétence fédérale établies au Québec.

Au cours de cette période, alors que l’usage du français reculait légèrement dans l’ensemble du marché du travail au Québec (passant de 82,9 % à 80,7 %), ce recul a été beaucoup plus accentué au sein des entreprises de compétence fédérale, chutant de 77,9 % à 71,9 % en une décennie.

Ce recul a été particulièrement marqué dans les secteurs des télécommunications, de la défense, et du transport ferroviaire.

Pour contrer ce déclin, l’Assemblée nationale du Québec a adopté en mars 2021 la loi 96. Parmi ses dispositions, l’une d’elles assujettit les entreprises privées de compétence fédérale à la Loi 101.

Aussitôt, Ottawa a été saisi de l’urgence de moderniser sa propre loi sur les langues officielles. Cette modernisation a pris la forme de la loi C-13, adoptée par le parlement canadien en juin 2023.

Au sujet de la langue de travail, la loi fédérale laisse aux entreprises privées de compétence fédérale le choix de se soumettre soit à la loi C-13 fédérale ou soit à la loi 96 québécoise.

Au niveau des principes régissant la langue de travail, l’une et l’autre sont assez semblables.

La différence fondamentale est dans l’application concrète de la loi.

Au sujet des entreprises privées soumises à son autorité, le fédéral fonctionne sur le principe de l’auto-règlementation; Ottawa exige seulement que les entreprises se dotent de procédures vertueuses et compte sur elles pour les mettrent en application.

C’est ce qui fait que le transporteur ferroviaire MMA, par exemple, a pu opérer de manière très dangereuse pendant des années sans être inquiété par le fédéral, jusqu’à la catastrophe de Lac-Mégantic, conséquence inévitable du laisser-faire d’Ottawa.

Pour revenir au respect du français par une entreprise de compétence fédérale, lorsque celle-ci sera l’objet d’une plainte — du public au sujet de la langue de service ou d’un employé quant à la langue de travail — cette plainte subira un sort bien différent selon que cette plainte sera adressée à Ottawa ou à Québec.

Au sein de la fonction publique québécoise, tous les fonctionnaires parlent français, qu’ils soient francoQuébécois ou angloQuébécois. Dans la fonction publique fédérale, il en est autrement.

La fonction publique fédérale

Avec ses 357 000 fonctionnaires, le gouvernement canadien est, de loin, le principal employeur du pays.

Les fonctionnaires fédéraux se répartissent en deux groupes; ceux qui travaillent dans la capitale nationale (42,6 %) et ceux qui travaillent dans les postes satellites répartis un peu partout sur le territoire canadien.

Dans les postes satellites (ou régionaux)

Ceux qui travaillent dans les postes satellites sont ceux à qui le public s’adresse, par exemple, lorsqu’il appelle ou écrit au ministère fédéral du Revenu ou au ministère de l’Immigration.

Dans d’autres cas, ces fonctionnaires n’ont pas de contact avec le public.

Les postes satellites du Québec sont bilingues au sens où toute personne qui recourt à leurs services sera servie dans la langue officielle de son choix.

Dans les bureaux québécois, les employés se répartissent en trois groupes ethniques; on y rencontre des Francophones bilingues, des Anglophones bilingues et des Anglophones unilingues.

On n’y embauche jamais de Francophones unilingues (soit la moitié de la population du Québec) puisque les fonctionnaires qui y travaillent prennent rarement des décisions importantes; leur rôle est d’étoffer en anglais les dossiers qui seront transmis à Ottawa pour décision.

Dans une cause où un fonctionnaire francophone s’était plaint de n’avoir jamais pu travailler en français, le tribunal a reconnu que la prime au bilinguisme que le fédéral accorde à ses fonctionnaires francophones bilingues correspond en réalité à une somme qui leur est allouée pour la renonciation à leur droit de travailler en français.

Dans la capitale nationale

À Ottawa, les principaux groupes ethniques sont, en ordre décroissant : les Anglophones unilingues, des Francophones bilingues et des Anglophones bilingues.

Les Anglophones unilingues y sont majoritaires pour une raison très simple; le fédéral puise ses effectifs dans la population du pays, majoritairement unilingue anglaise. Autrement, il exercerait une discrimination à l’embauche à l’égard de sa propre population.

Parmi les groupes minoritaires, les Francophones bilingues sont plus nombreux que les Anglophones bilingues parce que c’est également le cas au sein de la population canadienne.

À chaque fonctionnaire francophone qui s’est présenté à la barre des témoins de la commission Rouleau — au sujet du ‘Convoi de la Liberté’ — les commissaires prenaient soin de préciser, dès le départ, que celui-ci était libre de s’exprimer dans sa langue. Pourtant tous ces fonctionnaires francophones ont témoigné en anglais.

Ils ont préféré l’anglais parce que c’est la langue qu’ils parlent habituellement au travail et conséquemment, c’est la langue dans laquelle ils sont le plus familiers pour parler de ce qu’ils font.

De manière générale, il est impossible de faire fonctionner une entreprise lorsqu’on met ensemble des travailleurs qui ne se comprennent pas. D’où la nécessité d’avoir une langue commune. Cette langue est l’anglais à Ottawa et c’est le français à Québec.

Au parlement canadien, on a beau mettre en évidence un conseil des ministres qui reflète la diversité culturelle du pays, dans les faits ceux-ci ne sont que l’interface ministérielle derrière laquelle se cache une machine étatique majoritairement unilingue anglaise et qui fonctionne essentiellement en anglais.

Les plaines relatives aux infractions à la nouvelle loi fédérale sur les langues officielles seront reçues par des fonctionnaires fédéraux, majoritairement unilingues anglais. Pouvez-vous imaginer leur zèle à sanctionner la ‘méchante’ compagnie qui fait travailler ses employés en anglais. What’s the problem ?

Conclusion

Dès que le gouvernement du Québec se dote de moyens législatifs destinés à assurer la pérennité du français au Québec, Ottawa s’empresse de changer la constitution ou d’adopter des lois afin de rendre les lois québécoises inopérantes.

Dans son désir de saboter les efforts du Québec, le gouvernement canadien — toujours dirigé dans ces moments-là par le Parti libéral — peut compter sur sa députation servile du Québec, liée par la ‘discipline du parti’.

En 2016, quand la députée libérale Mélanie Joly, à titre de ministre du Patrimoine canadien, déclare que le premier ministre John-A. Macdonald était un visionnaire qui ‘valorisait la diversité’ alors qu’il a mis en place les politiques génocidaires du Canada à l’égard des Autochtones, il est clair qu’elle ne pensait pas un traitre mot de ce qu’elle disait.

Mais c’est ce que ses fonctionnaires ont écrit pour elle. Alors, au risque de se couvrir de ridicule, elle a obéi. Parce qu’elle est payée pour ça.

La députée libérale Emmanuella Lambropoulos niait récemment le déclin du français au Québec. Quelques jours plus tard, elle en rajoutait en racontant cette histoire invraisemblable du refus d’un médecin de prodiguer des soins en anglais à une angloQuébécoise.

Au fédéral, quand des députés nient le déclin du français au Québec, comment se fait-il que les ‘négationnistes’ soient toujours des libéraux et jamais des députés d’autres formations politiques ?

C’est que les députés québécois du Parti libéral du Canada n’hésitent jamais à servir de façade aux attaques de l’État canadian contre les mesures que nous prenons pour défendre notre langue.

Ils sont les équivalents québécois des hommes de paille du maréchal Pétain au cours de la Deuxième Guerre mondiale.

« Nous serons toujours là pour défendre les droits des minorités » aime à répéter le premier ministre canadien. Depuis toujours, son parti feint d’ignorer que la plus importante minorité du pays, c’est le peuple francoQuébécois et non l’annexe québécoise de la majorité anglo-canadienne, sujette de tous les soins d’Ottawa…

Références :
Aperçu du fonctionnement interne de l’État canadien
Déclaration de la ministre Joly
109 000 fonctionnaires de plus sous Trudeau
Des entreprises à charte fédérale esquiveront la loi 96
Des libéraux fédéraux montent aux barricades pour les anglophones du Québec
Emmanuella Lambropoulos revient à la charge avec des propos controversés
GRC : de hauts gradés unilingues à des postes bilingues
Immigration Canada recrute des agents uniquement anglophones au Québec
La Commission Rouleau : là où le français relève de l’utopie
La façade ministérielle de l’État canadien
La faillite de la dérèglementation ferroviaire du gouvernement fédéral
Les fonctionnaires fédéraux mal à l’aise d’utiliser le français au bureau
Loi constitutionnelle de 1982
L’OQLF déjà prêt à imposer la loi 101 dans les entreprises de compétence fédérale
L’unilinguisme anglais à Immigration Canada
Le bilinguisme, « l’affaire des francophones » dans la fonction publique fédérale

Paru depuis : Rendre le Québec officiellement bilingue, une idée qui ne passe pas au BQ et au PCC (2024-05-31)

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Les collabos du colonialisme canadian (1re partie) : Francis Drouin, député fédéral libéral

Publié le 12 mai 2024 | Temps de lecture du texte : 6 minutes

Introduction

Le 6 mai dernier, le chercheur Frédéric Lacroix et le professeur Nicolas Bourdon se présentaient devant le Comité permanent sur les langues officielles d’Ottawa afin de soutenir la thèse — basée sur les données de Statistique Canada — selon laquelle faire ses études dans un Cégep ou une université anglophone augmentait statistiquement la probabilité de mener par la suite sa vie en anglais.

Prenant la parole, le député libéral Francis Drouin les a qualifiés d’extrémistes et de ‘pleins de marde’.

Les faits

L’assimilation linguistique s’opère principalement par le biais du marché du travail et de l’école.

Au sujet de l’école, si la Loi 101 oblige les francoQuébécois et les néoQuébécois à fréquenter l’école publique française au primaire et au secondaire, cette loi est muette au post-secondaire, c’est-à-dire au niveau des Cégeps et des universités.

Malheureusement, après avoir été scolarisés en français au primaire et au secondaire, une proportion croissante de jeunes francoQuébécois font leurs études post-secondaires en anglais.

Chez les adolescents de langue maternelle française qui ont entrepris un parcours scolaire destiné à les mener à l’université — en somme, ceux qui ne sont pas inscrits à un DEC technique — 80 % de ceux qui font leurs études collégiales en anglais s’inscrivent à une université anglaise alors que ce pourcentage est de 13 % chez ceux qui ont fait leurs études collégiales en français.

En somme, le Cégep anglais constitue un choix de vie définitif; la plupart des adolescents inscrits à un Cégep anglais espèrent travailler en anglais à la suite de la remise de leurs diplômes.

Cela s’explique facilement. Les détenteurs d’une formation collégiale ou universitaire seront plus à l’aise, pour le reste de leur vie, de s’exprimer en anglais dans leur domaine de compétence puisque les termes techniques, les concepts et les notions apprises l’auront été dans cette langue.

Dans son premier rapport annuel, le nouveau commissaire à la langue française note que l’utilisation de l’anglais par les francoQuébécois et les néoQuébécois est liée au fait d’avoir étudié dans un Cégep ou dans une université anglaise.

Le mécanisme de l’assimilation

En 2009, plus de 3 200 étudiants provenant principalement de sept Cégeps de l’ile de Montréal ont répondu à un questionnaire comptant plus de quarante questions et portant leurs comportements linguistiques.

Pour ce qui est de leurs préférences cinématographiques, les collégiens anglophones ne sont pas intéressés par les films en français (d’ici ou d’ailleurs), peu importe la langue de leurs études.

Toutefois, autant chez les collégiens francophones qu’allophones, l’intérêt pour le cinéma en français chutait de manière importante chez ceux qui fréquentent les Cégeps anglais.

Ce phénomène se retrouvait également (mais avec une chute d’intérêt moindre) quant aux émissions de télévision.

On peut présumer que ce qui était vrai pour la télévision en 2009 est probablement vrai de nos jours pour les sites internet.

Les auteurs de cette étude concluaient que la fréquentation d’un Cégep anglais est fortement corrélée avec l’utilisation prédominante de l’anglais dans l’ensemble des situations quotidiennes.

Une fois diplômés, une bonne partie de ceux qui fréquentaient les Cégeps ou les universités anglaises sont devenus indifférents à être servis dans une autre langue que le français.

En d’autres mots, ils se désolidarisent des francoQuébécois unilingues qui sont victimes de discrimination à l’embauche, ceux-ci étant vus comme des pleurnichards qui n’ont qu’à apprendre l’anglais.

Les quelques années qui sont nécessaires pour effectuer des études post-secondaires en anglais ne sont pas suffisantes pour transformer un étudiant francoQuébécois en angloQuébécois.

Mais cette formation anglaise est associée à une propension plus grande à écouter par la suite des films en anglais, à assister à des spectacles en anglais, à lire des livres en anglais, à consulter des quotidiens anglais, et à écouter les actualités en anglais.

Une fois diplômé, le cercle d’amis d’un Francophone qui a fait ses études en anglais est habituellement composé de collègues avec lesquels il a étudié, soit des personnes bilingues et des angloQuébécois unilingues, c’est-à dire un groupe au sein duquel l’anglais est la seule langue commune.

À s’exposer à l’idéologie qui prévaut chez les angloCanadiens, on en vient peu à peu à penser comme un angloQuébécois, au fur et à mesure que son vocabulaire en français — de moins en moins utilisé — se rétrécit au point qu’on devient plus à l’aise de s’exprimer dans la langue de Shakespeare.

N’est-ce pas ce qu’on appelle l’assimilation ?

Conclusion

Le ‘distingué’ député Drouin souffre d’aveuglement volontaire en refusant de croire les faits, c’est-à-dire que les Cégeps et universités anglophones de Montréal — ces dernières grassement financées par Ottawa — sont au cœur de la machine assimilatrice à l’anglais.

Au Québec, Ottawa verse 2 663$ par étudiant anglophone à plein temps et 1 430$ pour un étudiant francophone à plein temps.

Le résultat, c’est que les Cégeps et universités anglaises ont 56 % plus d’argent pour former chacun de leurs étudiants. Cela entraine des classes plus spacieuses, des laboratoires mieux équipés, et plus de moyens pour favoriser la réussite des travaux de recherche.

Pas étonnant qu’un nombre croissant d’adolescents francoQuébécois choisissent un parcours scolaire qui conduira à leur assimilation linguistique.

Tant que le peuple francoQuébécois paiera des taxes et des impôts à Ottawa — autrement dit tant que Québec ne deviendra pas un pays indépendant — notre argent servira à favoriser notre lente extinction.

Merci au député Drouin de nous donner l’occasion d’y réfléchir…

Références :
Le défilé des Rhodésiens
Les cégeps français à Montréal : le début de la fin ?
Protection du français : Témoins « pleins de marde » : « Non, je ne m’excuse pas », dit le député
Québec préfère les universités anglaises
Rapport d’activités 2022-2023 – Commissaire à la langue française
Sans l’indépendance, pas d’avenir pour le français comme langue nationale
Une analyse des comportements linguistiques des étudiants du collégial sur l’ile de Montréal
Universités anglophones: 200 M$ par année pour angliciser le Québec

Paru depuis : Le député libéral Francis Drouin annonce qu’il ne se représente pas (2024-07-25)

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Écrit par Jean-Pierre Martel


La peur de l’indépendance

Publié le 18 avril 2024 | Temps de lecture du texte : 6 minutes


 
Introduction

Le moteur des révolutions est le sentiment d’injustice. En contrepartie, le moteur des contre-révolutions, c’est la peur.

Dans ce second cas, ce peut être la peur de la mitraille ou la peur de l’inconnu. Pour paraphraser Machiavel, on peut dire qu’un peuple consentira aveuglément à sa domination tant qu’il sera habité par de la peur de tout perdre en dépit du fait qu’il ne possède rien…

Depuis un demi-siècle, chaque fois que le peuple francoQuébécois s’apprêtait à poser un geste de rupture, ceux qui n’y avaient pas intérêt ont invoqué la peur.

Les camions de la Brink’s

Au cours de la campagne électorale québécoise de 1970, les sondages révélaient que deux partis politiques étaient presque à égalité dans les intentions de vote : le Parti libéral du Québec (d’allégeance fédéraliste) et un tout nouveau parti indépendantiste, le Parti Québécois. Loin derrière eux se trouvait l’Union nationale, un parti nationaliste au pouvoir jusque-là.

Trois jours avant le scrutin, neuf camions blindés de la Brink’s partaient des bureaux montréalais du Royal Trust en direction de Toronto. À leur bord, une quantité présumée importante de titres financiers.

Le tout devait démontrer le risque de fuite des capitaux hors du Québec si le Parti Québécois devait prendre le pouvoir.

Selon Wikipédia, l’opération était une tentative de manipulation de l’opinion publique orchestrée par le premier ministre canadien de l’époque, Pierre-Elliott Trudeau (le père de Justin Trudeau).

Publiée en exclusivité par le quotidien montréalais The Gazette (avisé à l’avance par un appel anonyme), la primeur sera reprise le lendemain — soit l’avant-veille du vote — par tous les journaux du Québec.

Le résultat fut que seuls sept députés du PQ furent élus deux jours plus tard.

La perte de la péréquation fédérale

Il existe plusieurs programmes en vertu desquels le gouvernement fédéral verse de l’argent aux provinces dans leurs champs de compétence constitutionnelle; santé, infrastructures, logement, garderies, etc.

En gros, les sommes versées par Ottawa correspondent à l’importance démographique ou économique de chaque province.

Toutefois, il existe un programme où le Québec semble recevoir bien davantage que sa ‘juste part’; c’est la péréquation.

Celle-ci est un mécanisme de redistribution de la richesse entre les provinces riches du pays vers les provinces qui le sont moins, dont le Québec.

C’est ainsi que le gouvernement québécois reçoit annuellement environ treize-milliards de dollars d’Ottawa.

À chacun des deux référendums sur l’indépendance tenus jusqu’ici, l’argument massue du camp fédéraliste a toujours été que si le Québec se sépare, il perdra les milliards de dollars qu’Ottawa a la bonté de lui verser, plongeant l’économie du Québec dans le marasme et la misère.

Il y a plusieurs années, ce blogue avait publié une analyse économique qui démontrait que le Québec souffrait d’un sous-investissement chronique d’Ottawa dans l’économie québécoise. Un sous-investissement qui était presque totalement corrigé par la péréquation.

En somme, l’argent de nos taxes et de nos impôts qu’Ottawa n’investit pas dans l’économie du Québec, il le verse annuellement sous forme de péréquation en nous faisant croire qu’il nous fait la charité.

Précisons que cette analyse ne tient pas compte des gouffres financiers que sont devenus l’aménagement des chutes Muskrat à Terre-Neuve, la construction du pipeline Trans-Mountain en Colombie-Britannique et la construction des frégates canadiennes en Nouvelle-Écosse.

Par contre, le fédéral fait valoir que depuis des années, il dépense plus au Québec que ce qu’il y perçoit. Ce qui est vrai. Mais n’est-ce pas contradictoire avec ce que nous venons de dire ?

En réalité, lorsque le fédéral fait des déficits colossaux (ce qui est le cas depuis que Justin Trudeau est au pouvoir), Ottawa dépense plus dans chaque province que ce qu’il perçoit. C’est justement pour cela qu’il fait un déficit.

Toutefois, lorsqu’on tient compte du partage de la dette canadienne que le Québec aura à payer lorsqu’il fera son indépendance, cet argument fédéraliste s’effondre.

En présentant le budget de l’an 1, le Parti Québécois a fait la démonstration que l’État québécois, même privé totalement de péréquation, serait mieux financé dans un Québec souverain.

Conclusion

On ne peut pas faire la promotion de l’indépendance sans critiquer le colonialisme canadian.

En effet, le Canada est une puissance coloniale qui, à la différence des autres, ne possède pas ses colonies sous les tropiques. Les siennes sont incrustées dans son territoire.

D’une part, ce sont des dizaines de réserves indiennes régies par un apartheid juridique. Et d’autre part, c’est le Québec dont on favorise l’anglicisation, entre autres par un déluge migratoire qui dépasse largement ses capacités d’intégration.

La preuve la plus irréfutable de ce statut colonial est l’adoption d’une nouvelle constitution sans le Québec par l’ethnie dominante du pays en 1982. Tout comme n’importe quelle métropole coloniale n’hésite pas à imposer sa volonté à ses colonies.

En disant tout haut ce qu’une bonne partie du peuple francoQuébécois pense tout bas, Paul Saint-Pierre Plamondon abandonne brièvement cette image positive et rose bonbon dans lequel les forces fédéralistes aimeraient le voir se limiter.

En réalité, les chemins qui mènent à la liberté sont parsemés d’embuches. Pour être guidé vers l’indépendance, ce que nous avons besoin, c’est d’un chef qui, tout en étant fondamentalement bienveillant envers son peuple, peut également froncer les sourcils et élever le ton lorsque nécessaire.

Il est rassurant de voir que c’est le cas du chef péquiste.

Références :
Coup de la Brink’s
Le colonialisme économique ‘canadian’
Le coût de l’oléoduc Trans Mountain explose à nouveau
Le référendum de la dernière chance, dit St-Pierre Plamondon
Les chutes Muskrat : un éléphant blanc à nos frais
Les miettes fédérales au chantier maritime Davie
Le texte de ‘refondation’ du PQ : le paroxysme de l’insignifiance
L’indépendance permettrait au Québec d’économiser 12 milliards sur 7 ans, selon le PQ
Péréquation fédérale au Canada
Québec solidaire reproche à St-Pierre Plamondon de verser dans le « catastrophisme »

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Le mépris

Publié le 15 avril 2024 | Temps de lecture du texte : 2 minutes


 
Le député libéral René Arsenault est acadien. En 1992, à l’époque où il était fraichement diplômé en droit, son ordre professionnel lui avait refusé le pouvoir d’exercer sa profession parce qu’il ne voulait pas prêter allégeance à la couronne britannique.

Après une bataille qui a duré plusieurs mois, il a finalement pu exercer sa profession sans prêter ce serment.

On doit savoir qu’entre 1755 et 1763, l’armée coloniale anglaise a confisqué les terres et incendié les fermes de douze-mille des dix-huit-mille Francophones d’Acadie parce qu’ils refusaient de prêter allégeance à la couronne britannique.

Ceux-ci furent déportés manu militari en prenant soin d’envoyer séparément les membres d’une même famille dans différentes colonies anglaises.

Pour les Acadiens, prêter serment au roi d’Angleterre est une humiliation et un rappel de leur douloureux passé.

Voilà pourquoi, à la suite de l’abolition au parlement québécois du serment d’allégeance à la monarchie britannique, le député René Arsenault a eu l’idée de présenter un projet de loi semblable à Ottawa.

Le Canada étant ce qu’il est, son projet de loi a été rejeté par une écrasante majorité.

À l’issue du vote, pour ajouter à la déconvenue du député acadien, une bonne partie des députés de la Chambre des communes ont spontanément entonné l’hymne national britannique ‘God save the King’.

À l’instar des défilés orangistes traversant les quartiers catholiques de Belfast. Pour les narguer.

Dans un pays où on retire des bibliothèques le livre ‘N… blancs d’Amérique’ parce que son titre heurte la sensibilité d’une poignée de personnes, on n’hésite pas à soumettre les députés francophones de tout le pays à l’humiliation de prêter allégeance au souverain de leurs conquérants.

Le tout, conformément aux politiques tartufardes d’équité, de diversité et d’inclusion d’Ottawa.

Références :
Déportation des Acadiens
Serment optionnel au roi : le moment de vérité pour un député acadien

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Écrit par Jean-Pierre Martel