Vienne — Saint-Léopold-du-Steinhof

Le 24 juillet 2012

 
En 1903, Otto Wagner (1841-1918) — l’architecte en chef et le plus prolifique bâtisseur de Vienne — se voit confier le mandat de concevoir une église au profit des patients et du personnel soignant d’un hôpital psychiatrique (appelé Steinhof). Celui-ci était construit dans une banlieue à l’Ouest de Vienne (annexée depuis à la capitale autrichienne). À l’époque, c’était l’hôpital psychiatrique le plus moderne d’Europe.

De style Art Nouveau (et d’inspiration néo-byzantine), l’église fut construite de 1904 à 1907 au sommet de la colline sur laquelle est situé l’asile.

Dédiée à saint Léopold (le saint patron de Basse-Autriche), c’est le seul édifice de l’institution psychiatrique qui soit visible au loin; les autres pavillons sont disséminés sur cette colline boisée et conséquemment, cachés par la verdure. L’église symbolise donc les lumières de l’esprit qui s’élèvent au-dessus des sombres dessous de l’irrationnel et de la maladie mentale.

Avec l’église parisienne de Saint-Jean-de-Montmartre, l’église Saint-Léopold-du-Steinhof est un des premiers temples en béton au monde. L’édifice est coiffé d’une coupole en cuivre doré, et recouvert de plaques de marbre blanc rivées par des clous de cuivre.

La façade est flanquée de deux clochetons au sommet desquels trônent des statues dues au sculpteur Richard Luksch (1872-1936) : Saint Léopold à gauche et Saint Séverin à droite (assis sur des sièges dessinés par l’architecte). Quatre colonnes en pierre forment le portail, surmonté d’anges recueillis en bronze doré, œuvres de Othmar Schimkowitz (1864-1947).

À l’intérieur, l’architecte a également dessiné les bancs, les luminaires et le maitre-autel. La décoration intérieure ne compte aucune toile.

La forme des fenêtres principales, de chaque côté de l’édifice, rappelle la silhouette de l’autel surmonté de son baldaquin : c’est aussi la forme du retable qui les surplombe au fond de l’église. Ce dernier occupe la même surface (75 m²) que chacune de ces fenêtres.

Les mosaïques furent créées par Remigius Geyling (1878-1974) et les vitraux par Koloman Moser (1868-1918). Les mosaïques des autels latéraux sont de Rudolf Jettmar (1869-1939) : l’autel latéral de droite montre l’Annonciation, tandis que celui de gauche, l’archange Gabriel. Construit en 1907, l’orgue pneumatique est de Franz-Josef Swoboda.

Le choix de Koloman Moser pour les vitraux avait suscité une vive controverse puisque cet artiste s’était converti au protestantisme. Lorsque autorités religieuses catholiques apprirent que celui-ci devait également réaliser le retable qui surplombe le maitre-autel, c’en était trop.

Si bien que cette tâche fut confiée d’abord à Carl Ederer (1875-1951) — accusé à tort de plagiat par Moser — puis à Remigius Geyling, et finalement à Léopold Forstner (1878-1936). Intitulé « L’accueil au paradis », on y voit le Christ entouré de deux anges et de saints : devant eux est agenouillé saint Léopold. Le visage, les mains et les pieds des personnages sont en céramique peinte. Les vêtements sont des plaques de marbre et les halos, de l’étain doré.

L’architecte a pris soin des aspects pratiques de son œuvre. Les trois premiers mètres des murs sont recouverts de marbre sans rivet afin de faciliter leur nettoyage. Le sol est légèrement incliné pour la même raison. Le maitre-autel est surélevé afin d’être visible de tous les fidèles. Les bancs ne présentent aucune arrête vive qui pourrait blesser les malades. Au lieu d’être de simples bassins, les bénitiers sont alimentés goutte à goutte en eau bénite à partir de réservoirs dorés, afin de réduire le risque d’infection. Le dôme est fermé d’un faux-plafond, ce qui améliore l’acoustique des lieux.

Contrairement à tous ces temples sombres, propices au recueillement, l’église Saint-Léopold-du-Steinhof est inondée de lumière, comme un minuscule avant-goût du paradis. Véritable œuvre d’art, elle est aujourd’hui considérée comme la plus belle église Art nouveau au monde.


Voir aussi : Liste des diaporamas de Vienne

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4 commentaires à Vienne — Saint-Léopold-du-Steinhof

  1. sandy39 dit :

    INTRODUCTION

    C’est bien calme en ce moment ! Plus personne se cause !?

    Aujourd’hui, le 31, j’ai envie de faire un petit tour en arrière, juste quelques pas en arrière pour poser son destin quelque part ou même au milieu de nulle part, pour nous conduire sur le même chemin de 2013.

    Et, j’espère qu’on trouvera toujours ces quelques mots indispensables qui font qu’on se sent bien.

    Qu’on est bien dans l’Infinité des mots qui nous aide à rejoindre l’Infinité de Destins, l’Infinité des Espériences de Vie qui se partagent !…

    En attendant les voeux, j’appuie sur POWER pour commenter cette dernière vidéo de Vienne.

    A 0:14: Entrées et sorties surveillées avec gardien : Ambiance Asile ou Prison = Enfermement de l’Esprit.

    “L’Eglise symbolise donc les lumières de l’Esprit qui s’élèvent au-dessus des sombres dessous de l’Irrationnel et de la maladie mentale.” : C’est de Vous ?

    Je complèrerais ainsi : n’est-ce-pas ce qu’on fait avec les mots ?

    Avec nos phrases, ne cherchons-nous pas un symbole : celui de notre Lumière ?

    J’ai quelques idées à vous transmettre devant “Les sombres dessous de l’Irrationnel”.

    Puisque nous avons Tous une Source d’Irrationnel en Nous -on la laisse toujours couler cette partie de Nous-, c’est cette Source qui nous pousse à commettre des actes guidés par le Bien et le Mal.

    On a Tous un côté éclairé et un côté sombre. On éclaire notre côté sombre avec les mots car on est Tous capable du Meilleur comme du Pire. Cela a toujours été : c’est l’Irrationnel qui nous dirige. C’est peut-être ça le Destin ? Et lorsque nous ne sommes plus maître de nos actes, on nous met sous tutelle ou sous curatelle jusqu’au risque de se faire enfermer : Asile ou Prison, si nous devenons dangereux pour nous-mêmes ou pour la Société.

    Ainsi, c’est pour ça que certains d’entre Nous passent leur vie à écrire pour ne pas commettre le Pire ou pour ne pas finir par se flinguer…

    D’après moi, il n’y a pas que l’Eglise qui symbolise les lumières de notre Esprit. Il nous faut trouver un filtre pour laisser passer le reflet de nous-mêmes. Finalement, on est un peu comme le café…

    CONCLUSION

    Restons comme le café : NOIR et INTENSE à la fois, au goût profond et prononcé sans devenir des sombres héros…

    Non, non, chez Nous, le café n’est pas fort, ni amer : on en trouve du bon de l’autre côté de la Frontière !

    Tout ça pour garder le meilleur de notre arôme. Oui, mais je dis mieux, avec du DESIR parce que si on se retrouve dans le NOIR autant qu’il nous en reste une petite goutte au fond de la tasse…

    Alors, pour 2013, laissons couler le meilleur de nous-mêmes !

    Et si on rajoutait un morceau de chocolat pour croquer 2013 ?

    • Relativement à la phrase « L’église symbolise donc les lumières de l’esprit qui s’élèvent au-dessus des sombres dessous de l’irrationnel et de la maladie mentale », j’ai consulté tous mes guides de voyage et mes bouquins sur Vienne et je n’ai pas réussi à trouver qui aurait pu écrire cela. Donc c’est peut-être de moi.

  2. nickro dit :

    Très belle et complète description. J’ai visité il y a quelques jours cette église et j’ai été profondément impressionné.

    De toutes sortes, les informations sur l’église sur l’Internet sont assez rares. Donc je suis arrivé à votre excellent blog.

    Merci de la Roumanie.

    • C’est moi qui vous remercie pour votre commentaire élogieux.

      Sur l’Internet, on trouve tellement d’informations remarquables en anglais qu’on a tendance à croire que nos petites particularités nationales ont de moins en moins d’importance.

      Chacun à notre manière — moi en français et vous en roumain — contribuons à montrer que ce monde tire sa richesse de sa variété.

      Pour terminer, j’ai publié beaucoup de photos relativement à Vienne (plus de deux milles en haute-définition). N’hésitez pas à nous faire part des impressions que vous a laissé la capitale autrichienne.

      Et merci encore pour votre message.

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