Nickel : la CAQ se laisse emplir par Glencore

Publié le 9 novembre 2025 | Temps de lecture : 4 minutes

D’abord hausser la norme

Il y a plus d’une décennie, des analyses effectuées sur la poussière qui se déposait sur le quartier ouvrier de Limoilou (situé près du port de Québec) révélaient que cette poussière contenait du nickel, un métal dont les sels sont cancérigènes.

En 2013, le gouvernement du Parti Québécois adoptait une norme maximale de 14 nanogrammes de nickel par mètre cube d’air. C’était la norme la plus sévère au monde. On était l’époque où les gouvernements étaient fiers de dire qu’ils protégeaient leur population.

Mais cette époque est révolue.

En 2022, Glencore — la minière qui transborde le nickel dans le port de Québec — a demandé que la norme québécoise soit assouplie prétextant être victime de discrimination puisqu’ailleurs dans le monde, les minières rivales sont assujetties à des normes moins rigoureuses.

Si le gouvernement de la CAQ était autre chose que la carpette sur laquelle les grandes multinationales s’essuient les pieds, il aurait répondu diplomatiquement qu’il est prêt à répondre favorablement à la demande de Glencore… À LA CONDITION que Glencore lui fasse la preuve irréfutable que cette hausse sera sans conséquence sur la santé des résidents de Limoilou.

Au lieu de cela, la CAQ a accepté d’avoir le fardeau de la preuve et a simplement commandé une petite revue de la littérature.

Malheureusement, il n’y a pas suffisamment d’études pour qu’on puisse en conclure quoi que soit quant à l’innocuité d’une hausse à 70 ng de nickel par mètre cube.

À défaut de preuves scientifiques, la CAQ aurait pu présumer que plus on respire un sel cancérigène, plus c’est néfaste. Mais c’était beaucoup lui demander…

Même haussée, la norme est impossible à respecter selon Glencore

À la suite d’un énième constat d’infraction délivré en octobre 2024 par le ministère de l’Environnement, Glencore a mandaté la firme de génie-conseil AtkinsRéalis de réaliser une étude de faisabilité.

Selon Radio-Canada, cette étude avait pour but d’évaluer la possibilité d’enfermer le processus de transbordement à l’aide d’un couvercle adapté à la configuration du navire chargé de recevoir le minerai de nickel.

Glencore utilise actuellement un système de nébulisation afin de minimiser la quantité de poussières toxiques soulevées à cette occasion.

Malheureusement, ce moyen est plutôt inefficace surtout par temps chaud, alors que les fines gouttelettes de bruine s’évaporent aussitôt.

Par ailleurs, tout le monde sait qu’une voiture qui roule à vive allure sur une route en terre battue ne soulève plus de poussière après une averse.

De la même manière, si le minerai était arrosé lors du transbordement, l’eau laverait les grosses pierres de leur poussière et cette poussière de minerai s’accumulerait au sol sous forme de boue que le vent ne pourrait plus emporter au loin.

Puisque l’étude de faisabilité d’AtkinsRéalis ne le suggère pas, est-il possible que le mandat confié par Glencore lui interdisait strictement d’émettre cette suggestion ?

Il est possible de consulter en ligne cette étude (c’est la première référence ci-dessous). Malheureusement, son avant-propos m’interdit de révéler l’information qu’elle contient.

Je me limiterai à dire que la réponse à cette question — AtkinsRéalis était-il libre de recommander l’arrosage du minerai à la place de la nébulisation — se trouve à la page 14 du rapport, au septième critère de l’étude.

Est-ce que le ministère de l’Environnement du Québec se laissera leurrer par l’étude commandée par Glencore ?

C’est à suivre…

Références :
Étude de préfaisabilité d’AtkinsRéalis
Le MELCCFP signifie une ordonnance à l’entreprise Glencore Canada Corporation
Mine Raglan
Nickel : Glencore n’a pas de solution pour couvrir ses cales, conclut une étude
Nickel : la science a le dos large

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Écrit par Jean-Pierre Martel