La Havane-II : Miramar

31 janvier 2015

 
Miramar — qui veut dire regarde la mer — est le plus à l’ouest des quartiers touristiques de La Havane.

Ses deux principales attractions sont l’Aquarium national et le célèbre cabaret Tropicana.

C’est dans ce quartier verdoyant et agréable, le long de la cinquième avenue, que se concentrent les ambassades de la capitale. On y rencontre également un grand nombre d’hôtels modernes.

La vidéo débute par un aperçu de l’Instituto Superior de Arte ou École des Beaux-Arts (de 0:05 à 0:12). Né d’une idée de Che Guevara et construit au début des années 1960 d’après les plans de Ricardo Porro, de Roberto Gottardi, et de Vittorio Garatti, ce complexe est considéré comme le chef-d’oeuvre de l’architecture révolutionnaire cubaine. Aucune visite touristique n’y est permise.

De 0:29 à 1:10, nous visitons la basilique Jésus de Miramar, construite de 1948 à 1953. C’est la deuxième plus grande église de la capitale cubaine. Cesareo Marciano Hombrados y de Onativia (1909-1977) y a peint les personnages de ses fresques sous les traits de ses commanditaires.

Immédiatement à l’Est de cette église, on trouve l’hôtel Quinta Avenida (de 1:12 à 1:22). Puis, en se dirigeant vers le détroit de Floride, on rencontre successivement le Centre de commerce de Miramar (de 1:23 à 1:30) et l’hôtel Meliá Habana (de 1:31 à 2:17).

Suivent à l’Est, l’hôtel Occidental Miramar (de 2:18 à 2:23) et l’hôtel Panorama (de 2:24 à 2:50). Situé dans ce dernier, le restaurant Don Alfredo doit son décor somptueux à l’artiste cubain Vicente Bonachea (1957-2012).

De 3:14 à 3:27, c’est le restaurant Casa Española.

Parmi les ambassades du quartier, signalons celle de France, située dans un édifice néo-classique austère auquel on accède sur rendez-vous seulement (à 4:06).

Le théâtre Karl-Marx (de 4:16 à 5:03) est la plus importante salle de spectacle de la capitale cubaine. Il possède une capacité de 5 500 sièges.

Parmi les autres édifices du quartier, signalons l’ambassade russe (à 5:04) et l’église Santa Clara de Casia (de 5:52 à 6:04). Conçue par l’architecte Victor Morales, cette dernière a été construite de 1940 à 1942 : au moment de son inauguration, son style avant-gardiste avait suscité la controverse.


Voir aussi :
Liste des diaporamas du premier voyage à La Havane
Liste des diaporamas du second voyage à La Havane

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Les blasphèmes de Raïf Badawi

28 janvier 2015

Raïf Badawi est ce blogueur saoudien condamné dans son pays à dix ans de prison, à mille coups de fouet, à une amende de 266 000 dollars, et à une interdiction de voyage de dix ans à l’expiration de son emprisonnement.

Les chefs d’accusation qui justifient sa condamnation sont la désobéissance à son père, le cybercrime (pour avoir mis en place un site web qui compromet la sécurité du pays par la promotion de la tolérance religieuse), et l’insulte à l’Islam (pour avoir ridiculisé le pouvoir ecclésiastique de son pays).

Afin de juger du caractère blasphématoire de M. Badawi, voici la traduction française d’extraits des écrits de M. Badawi que le quotidien The Guardian a publiés.

Les textes ont été traduits de l’arabe à l’anglais par Mona Mahmood (d’Amnistie Internationale), Ian Black, Raya Jalabi et l’Institut Gatestone.

« Dès qu’un intellectuel commence à émettre ses idées, des centaines de fatwas surgissent, l’accusant d’être un incroyant lorsqu’il a simplement eu le courage de discuter de sujets sacrés. Je crains que les intellectuels arabes aient à quitter le pays pour s’exprimer librement et échapper au sabre des autorités religieuses » (Note : ceci est une allusion au fait qu’en Arabie saoudite, la peine capitale est la décapitation par sabre).

« La laïcité de l’État respecte chaque citoyen et n’offense personne. La laïcité est le moyen par lequel des pays comme le nôtre sortiront du tiers-monde pour accéder au statut de pays développé. »

« Les États basés sur une idéologie religieuse n’ont rien à offrir à part la crainte de la Colère divine et l’incapacité à affronter le réel. Voyez ce qui est advenu des pays européens après qu’ils aient instauré la séparation de l’État et de l’Église, et relégué le pouvoir religieux à ses lieux du culte : ils ont répandu l’éveil des consciences, la créativité et la rébellion. Les théocraties (Note : l’Arabie saoudite en est une) emprisonnent leurs sujets dans le cercle vicieux de la foi et la peur. »

« …les Musulmans d’Arabie saoudite méprisent les croyances religieuses des autres; ils qualifient d’incroyants les non-Musulmans et considèrent comme hérétiques les Musulmans qui croient en un Islam différents du leur. Avec une telle mentalité, comment peut-on créer des relations harmonieuses avec d’autres peuples quand, sur les six milliards d’êtres humains, quatre milliards et demi ne sont pas Musulmans ? »

Ironisant au sujet d’un ecclésiastique qui suggérait que les astronomes soient punis si leurs découvertes sont en contradiction avec l’interprétation littérale de la Charia : « Ce vénérable prédicateur m’a fait découvrir l’astronomie religieuse. Je ne connaissais pas l’existence de cette discipline. Je conseille donc à la NASA de se départir de ses télescopes démodés, et d’étudier plutôt la Charia. En fait, il serait souhaitable que tous les chercheurs du monde abandonnent leurs laboratoires et leurs centres de recherche afin de tirer profit de l’enseignement de nos prédicateurs dans des domaines aussi divers que la médecine, l’ingénierie, la chimie, la microbiologie, la géologie, la physique nucléaire, les sciences maritimes, la pharmacologie, l’anthropologie, etc. Que Dieu bénisse notre clergé : il est devenu la référence incontournable en tout, et devant laquelle nous devons nous incliner et obéir sans discussion. »

Commentaires

N’importe quel Musulman peut se proclamer imam; en effet, devenir imam n’exige pas de compétence particulière. Aussi est-il fréquent qu’un imam confonde le Coran, les exigences de la Charia, et les coutumes préislamiques de son pays (en matière de modestie vestimentaire, notamment).

Voilà pourquoi, toute critique des coutumes arriérées d’un pays musulman est considérée comme blasphématoire au sein de ce pays.

Par exemple, critiquer l’excision là où elle se pratique (en Afrique), les crimes d’honneur et les mariages forcés, sont tous des insultes à l’Islam aux yeux des imams des pays concernés. Précisons que les mariages forcés sont fréquents dans les pays asiatiques, qu’ils soient musulmans ou non.

En Afghanistan, entre 20 et 50 jeunes femmes s’immolent par le feu chaque année pour éviter un mariage forcé. Dévoiler ce tabou est considéré — à tort évidemment — comme préjudiciable à l’Islam. Voilà pourquoi les journalistes occidentaux qui ont publié des données à ce sujet ont du fuir ce pays, menacés de mort.

L’Arabie saoudite est une théocratie (tout comme le Vatican). Remettre en question ce statut est considéré comme une hérésie. De plus, y critiquer l’absolutisme religieux — comme l’a fait Raïf Badawi — est blasphématoire.

S’il n’est pas sage de provoquer futilement la colère des Musulmans à l’étranger, on doit réaliser que toute tentative d’empêcher ici la pratique de coutumes arriérées est considérée comme une persécution religieuse aux yeux des croyants de pays où ces pratiques sont courantes.

Tout cela doit nous faire comprendre l’importance des Musulmans qui habitent nos pays. En effet, les Musulmans qui vivent en Occident sont des pionniers en train d’inventer sans le vouloir un Islam moderne, compatible avec les valeurs occidentales et en opposition totale avec l’obscurantisme financé notamment par l’Arabie saoudite.

Références :
A look at the writings of Saudi blogger Raif Badawi – sentenced to 1,000 lashes
Raif Badawi
Raif Badawi’s Blog

Parus depuis :
Comment devient-on imam? (2015-02-02)
Couillard doit expliquer ses liens avec l’Arabie saoudite, dit Khadir (2015-02-03)
Droits de l’Homme: Raif Badawi; fosses communes à Chypre; Bob Rugurika (2015-02-12)
Raif Badawi: Québec exhorte Ottawa de «changer de vitesse» (2015-06-07)
Washington demande à Riyad de renoncer à fouetter Raif Badawi (2015-06-08)

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Les principes asymétriques de M. Couillard

27 janvier 2015

Le premier ministre du Québec a confirmé aujourd’hui s’être entretenu il y a quelques jours avec l’ambassadeur d’Arabie saoudite au sujet du cas de Raïf Badawi.

Précisant qu’il ne croit pas à l’usage de sanctions à l’endroit du régime saoudien, M. Couillard ajoute : « La plus certaine façon de les rendre encore plus radicaux et éloignés de nos valeurs, c’est de les maintenir dans l’isolement ».

Alors si je comprends bien, il ne faut pas hésiter à condamner les violations des droits de l’homme des régimes de gauche (Chine, Russie, Corée du Nord, Cuba). Mais dans le cas d’une dictature de droite, il faut se taire afin de ne pas l’effaroucher car elle risquerait de se braquer et devenir encore plus radicale. Wow !

J’aurais préféré entre M. Couillard nous dire comment il entend obtenir la libération de Raïf Badawi. Si M. Couillard n’a pas la moindre idée de la manière de s’y prendre, je trouve odieux qu’il tente de décourager ceux qui, au contraire de lui, se tiennent debout face à l’obscurantisme.

Le quotidien britannique The Guardian a publié une traduction anglaise d’extraits des écrits de M. Badawi. Ceux-ci illustrent leur caractère anodin.

Dans ses écrits, M. Badawi ose remettre en question le caractère théocratique de l’Arabie saoudite : cela équivaut à une hérésie selon n’importe quel imam de ce pays. Voilà pourquoi l’un d’entre eux, proche de la famille royale, a émis une fatwa contre M. Badawi, invitant les croyants à l’assassiner s’il ne se repentait pas.

Selon ces imams d’influence saoudienne, il est du devoir de chaque croyant de venger l’Islam. Par l’assassinat s’il le faut. En d’autres mots, ce qu’ils prêchent, c’est que le meurtre, les crimes d’honneur et le terrorisme sont non seulement normaux, mais sont du devoir du croyant. De plus, la volonté de Dieu a priorité sur les lois des hommes.

La très grande majorité des imams français s’opposent à cette conception. Il suffit de lire les quotidiens et hebdomadaires français pour prendre connaissance des nombreux témoignages d’imams découragés parce qu’un nombre croissant de leurs paroissiens — jeunes, notamment — préfèrent croire l’idéologie intégriste saoudienne. Tout comme n’importe quel Catholique préférait croire une encyclique de Rome plutôt que l’opinion divergente d’un curé de paroisse.

La frivolité avec laquelle M. Couillard associe l’intégrisme à un simple choix religieux personnel est consternante et sape les efforts des imams d’ici à inventer un Islam moderne, compatible avec les valeurs occidentales et en opposition totale avec l’obscurantisme de l’Arabie saoudite.

Références :
L’Arabie saoudite et le financement d’Al-Qaida
L’intégrisme est un choix personnel, juge le premier ministre

Paru depuis : Couillard doit expliquer ses liens avec l’Arabie saoudite, dit Khadir (2015-02-03)

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Première femme évêque en Angleterre

26 janvier 2015

L’Église d’Angleterre est la principale dénomination religieuse au Royaume-Uni avec des fidèles représentant le cinquième de la population.

En 1531, le roi Henry VIII plaça l’église catholique d’Angleterre sous sa tutelle après que Rome eut refusé de lui accorder le divorce avec Catherine d’Aragon (afin d’épouser sa maitresse, Anne Boleyn).

De nos jours, les Églises anglicanes (dont fait partie l’Église d’Angleterre) se considèrent à des degrés divers à la fois catholiques et réformées.

Depuis 1985, l’Église d’Angleterre a ordonné un certain nombre de femmes au titre de diacre, puis de prêtre. Si bien que celles-ci représentent aujourd’hui près du tiers du clergé de cette Église.

Le 17 décembre 2014, l’Église d’Angleterre annonçait la nomination d’Elizabeth-Jane Holden-Lane au titre d’évêque. Elle était prêtre depuis 1994.

Son ordination a eu lieu officiellement ce matin dans la cathédrale de York (le plus grand édifice gothique d’Europe du Nord) et fut retransmise en direct sur les ondes de la BBC.

Depuis des siècles, les cinq plus importants évêques de l’Église d’Angleterre et les 21 plus anciens évêques de cette domination sont autorisés à siéger à la Chambre des Lords de Londres.

La législation britannique a été modifiée récemment pour permettre aux femmes évêques d’y accéder plus rapidement, sans respecter les règles d’ancienneté.

La nouvelle évêque est mariée à George Lane qui est aussi prêtre anglican : ils forment un des premiers couples mariés à être ordonné ensemble. Ils ont deux enfants.

Références :
Église d’Angleterre
‘Historic day’ for Church of England as its first female bishop is ordained in landmark ceremony at York Minster
L’Eglise d’Angleterre nomme sa première femme évêque
Libby Lane
First female Church of England bishop consecrated in York
Religion in the United Kingdom

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Les égouts et la drogue

23 janvier 2015

À l’Université du Québec à Trois-Rivières, André Lajeunesse est professeur de « criminalistique ». Cette discipline scientifique concerne l’ensemble des techniques d’investigation policière et de recherche de la preuve des crimes.

Depuis des décennies, on sait que nos égouts contiennent des traces d’à peu près tous les médicaments couramment utilisés, dans des proportions variables.

Après avoir découvert que cela était le cas de trois substances utilisées illicitement — la cocaïne, l’ecstasy et un stupéfiant appelé fentanyl — le professeur Lajeunesse a développé une méthode destinée à estimer les taux de consommation de drogues des habitants d’une municipalité en analysant le contenu des eaux usées de cette dernière.

De plus, lorsque la consommation persiste même après une saisie de drogue, cela indiquerait que plusieurs sources d’approvisionnement alimentent ce marché, donc que plusieurs groupes criminalisés qui se disputent le territoire.

Les policiers pourraient également déterminer le site d’un laboratoire clandestin en analysant les eaux usées rejetées par un immeuble ou les eaux d’une fosse septique (si on est en milieu rural).

Références :
Faire le portrait géographique de la consommation de drogue grâce aux eaux usées
Mise au point d’un procédé pour détecter les drogues dans les eaux usées

Sur le même sujet : Les traces de médicaments dans l’eau potable

Paru depuis : Les eaux usées révèlent des Québécois portés sur la cocaïne (2015-02-06)

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Décapitation et fouets en Arabie saoudite

20 janvier 2015

La décapitation de Laila Bint Abdul Muttalib Basim

Depuis le début de cette année, dix personnes ont été punies de la peine de mort en Arabie Saoudite. Le mode d’exécution dans ce pays est la décapitation par sabre.

Le 12 janvier dernier, le bourreau a dû s’y reprendre à trois fois avant de finalement réussir à décapiter Laila Bint Abdul Muttalib Basim. Celle-ci est une étrangère accusée d’avoir violé (à l’aide d’un manche à balai) et d’avoir tué une fillette de six ans que son mari a eue d’un autre mariage. La condamnée n’a cessé de crier son innocence.

Mais une rumeur veut que les abus sexuels dont a été victime la fillette aient été plutôt l’oeuvre de son père qui aurait rejeté le blâme sur une de ses épouses afin de s’en débarrasser.

En Arabie saoudite, comme dans tous les pays où la Charia a force de loi, le témoignage d’une femme vaut la moitié de celui d’un homme.

La flagellation de Raïf Badawi

Né en 1984, Raïf Badawi est un écrivain libéral d’Arabie saoudite.

En 2008, il crée un blogue voué à la promotion de la liberté d’expression et de la laïcité dans son pays.

Mais l’Arabie saoudite est une monarchie obscurantiste dans laquelle il est interdit de construire des églises d’autres confessions et où prôner l’égalité entre les croyances équivaut à une hérésie.

Accusé d’avoir créé un site Web qui insulte l’Islam, il fuit son pays, puis y revient alors qu’il croit la plainte abandonnée. En 2009, il se voit interdire de quitter le pays. Son compte de banque est bloqué. Il est pris au piège.

En 2012, un premier tribunal le condamne à la peine de mort s’il ne se repentait pas devant Dieu et ne renonçait pas à ses convictions libérales.

Ayant refusé de se soumettre, son cas est transféré à une autre cour.

En janvier 2013, ce second juge rejette l’accusation d’apostasie après avoir convaincu M. Badawi de réciter devant lui une profession de foi musulmane. Mais ce magistrat se déclare incompétent à juger les autres chefs d’accusation. Le tout est transféré à un troisième tribunal.

Deux mois plus tard, un ecclésiastique près de la famille royale saoudienne lance fatwa contre lui, le considérant comme un apostat qu’il invite les Musulmans à assassiner s’il ne se repentait pas.

On trouvera à cette page Web, un résumé en anglais des écrits de Raïf Badawi.

Le troisième juge le condamne en mai 2014 à dix ans de prison, 1 000 coups de fouet, une amende de 266 000 dollars, et une interdiction de voyage de dix ans à l’expiration de sa peine de prison.

Son avocat a été condamné à quinze ans de prison pour avoir sapé le régime et ses officiels, et pour avoir insulté l’appareil judiciaire en le ridiculisant.

Raïf Badawi est lauréat en 2014 du prix Netizen décerné par Reporters sans frontières. Son épouse et leurs trois filles ont trouvé refuge au Québec, à Sherbrooke.

La réaction officielle du Canada

En février 2013, le gouvernement Harper mettait sur pied le Bureau de la liberté religieuse, rattaché au ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, et dirigé par un officier qui a titre d’ambassadeur.

Son mandat est triple :
• protéger les minorités religieuses menacées et défendre leurs droits;
• lutter contre la diffusion de la haine et de l’intolérance fondées sur la religion;
• faire la promotion des valeurs canadiennes que sont le pluralisme et la tolérance.

Le 8 janvier dernier, l’ambassadeur canadien pour la liberté de religion a condamné la première séance de flagellation a laquelle a été soumis M. Badawi.

Le 14 janvier dernier, par voie de communiqué, le ministre des Affaires étrangères du Canada s’est mollement inquiété de la sévérité de la peine infligée au blogueur mais n’a pas remis en cause l’à-propos de sa condamnation pour délit d’opinion.

Ce sont les seules réactions officielles du gouvernement canadien jusqu’ici. Il semble que M. Harper hésite à se porter à la défense de M. Badawi parce que ce dernier n’est pas citoyen canadien.

Le premier ministre n’a pas ces scrupules lorsqu’il reproche à la Chine, à la Russie, et à Cuba, leurs violations des droits de l’Homme.

Pourquoi hésite-t-il aujourd’hui ? Tous deux producteurs de pétrole, le Canada et l’Arabie ne sont-ils pas des concurrents commerciaux ?

Le problème est que l’Arabie saoudite, assise sur une immense rente pétrolière, est immensément riche et se fout éperdument du Canada. Or le premier ministre, soucieux de son image, n’aime pas passer pour un perdant, surtout à un an des élections.

Il aimerait qu’il lui suffise de bomber le torse pour faire peur à l’Arabie. Puisqu’il semble manquer de moyens, donnons-lui une idée à laquelle il n’a peut-être pas pensé.

Si le Canada menaçait d’interdire la double citoyenneté saoudienne-canadienne au motif d’incompatibilité des valeurs démocratiques, cela forcerait les Saoudiens installés au pays à renoncer à leur citoyenneté saoudienne, ce que l’Arabie n’apprécierait probablement pas.

De plus, cela protègerait mieux toutes ces Canadiennes, tombées amoureuses de Saoudiens, et dont les enfants sont kidnappés par leur père dès que celui-ci réussit à les amener en Arabie, officiellement pour faire connaissance avec leurs grands-parents.

Références :
Abdul-Rahman al-Barrak
A look at the writings of Saudi blogger Raif Badawi – sentenced to 1,000 lashes
Arabie Saoudite : L’ONU pour la suspension de la flagellation de Raïf Badawi
Bureau de la liberté religieuse – Retour en arrière
L’Arabie saoudite et le financement d’Al-Qaida
Le blogueur saoudien Raif Badawi passible de la peine de mort
Le prédicateur assassin
Myanmar woman screams innocence before Saudi beheading: video
Quatre questions sur Raif Badawi, le blogueur condamné à 1 000 coups de fouet en Arabie saoudite
Torturers, oppressors and executioners: remember to buy British
Raif Badawi

Publiés depuis :
Un sursis pour Raif Badawi (2015-01-23)
M. Baird, faites libérer Raïf Badawi! (2015-01-28)
La Suède met fin à sa coopération militaire avec l’Arabie saoudite au nom des droits de l’homme (2015-03-10)
Saudi Teenager Faces Death Sentence for Act When He was 10 (2019-06-09)

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Écrit par Jean-Pierre Martel


La tuerie de Charlie Hebdo : les lacunes du renseignement (4e partie)

19 janvier 2015

Longtemps encouragé et financé par différents pays (dont les États-Unis), le terrorisme est devenu une préoccupation des pays occidentaux quand ils sont eux-mêmes devenus les cibles d’attentats terroristes.

Depuis les événements du 11 septembre 2001, on a fait appel aux talents de milliers d’experts pour améliorer les systèmes en place. Après toute attaque réussie (comme celle de Charlie Hebdo), les gouvernements déplorent les failles à la sécurité des organismes responsables et s’engagent à leur accorder plus de pouvoirs et de nouveaux moyens.

Et comme personne n’a le monopole des bonnes idées, les gouvernements, à juste titre, s’inspirent les uns des autres.

Si bien que depuis une décennie, on accumule couche par dessus couche de protection. Même quand ces mesures sont limitées dans le temps (comme le Patriot Act américain), ces mesures sont reconduites automatiquement. Plutôt que de courir le risque d’être accusés d’avoir placé le pays en état de vulnérabilité, les parlementaires préfèrent maintenir les dispositifs déjà en place, tout en les renforçant constamment.

Ces mesures se divisent en deux groupes : la surveillance planétaire et les mesures ciblées.

La surveillance planétaire

Avant même les attentats de 2001, les gouvernements des pays anglo-saxons — les États-Unis, le Royaume-Uni, le Canada, l’Australie et la Nouvelle-Zélande — avaient mis sur pied un vaste réseau d’espionnage qui filtrait tous les courriels, textes, et conversations téléphoniques de la planète. De plus, grâce au géolocaliseur des téléphones multifonctionnels, on était en mesure d’épier tous les déplacements de leurs propriétaires.

Évidemment, il n’a jamais été question d’écouter chacun de milliards d’appels téléphoniques, ni de lire tous les documents expédiés par voie électronique. Cela nécessiterait des ressources humaines qu’aucun pays ne peut se permettre.

Ce qu’on a développé, ce sont des logiciels de reconnaissance vocale et de recherche textuelle dont le rôle est de déceler l’utilisation de mots suspects. La liste de ces mots-clés est évidemment secrète. Mais ce qu’on peut présumer, c’est que ce réseau indique comme inquiétants les messages qui ont une teneur particulièrement élevée de mots ou de verbes apparaissant sur cette liste.

Puis, une fois ces messages inquiétants découverts, on place sur surveillance particulière leurs expéditeurs et leurs récipiendaires, présumés potentiels comploteurs.

Ce réseau d’espionnage n’a été conçu spécifiquement comme mesure antiterroriste. Il sert donc également à l’espionnage conventionnel. C’est ainsi que les États-Unis ont espionné attentivement les appels de la chancelière allemande et de ses conseillers.

Selon Wikipédia, les données recueillies par ce réseau sur le territoire américain sont partagées avec l’Agence de lutte contre la drogue, le ministère du Revenu, ainsi qu’avec d’autres agences chargées de faire respecter la loi.

On peut donc présumer qu’il serait imprudent pour les ingénieurs de Bombardier ou de Dassault Aviation d’expédier des devis techniques par voie électronique puisqu’il est certain que ces documents ultra-secrets se retrouveraient chez leurs concurrents américains de la même manière que les États-Unis ont toujours aidé leurs industriels à découvrir les secrets de leurs concurrents étrangers.

Le problème majeur avec la surveillance planétaire, c’est qu’elle génère une somme de renseignements colossale qu’on n’arrive pas à traiter.

Afin de découvrir les liens qui unissent différentes personnes sur lesquelles ne pesait aucun soupçon, dans une seule journée de 2012, on a ramassé les données des carnets d’adresses électroniques de 22 881 comptes Gmail, 82 857 comptes Facebook, 105 068 comptes Hotmail et 444 742 comptes Yahoo.

Même s’il n’est pas exclu que la minuscule partie qu’on parvient à analyser donne un jour accidentellement des résultats, il ne semble pas qu’un seul complot ait été déjoué jusqu’ici par ce moyen. Ce qui pose la question de l’allocation des ressources.

Les mesures ciblées

La torture

Pendant des années, l’administration Busch a justifié l’utilisation de la torture au nom de la protection des vies américaines.

L’analyse minutieuse des informations obtenues sous la torture n’a trouvé aucune preuve indiquant que ces interrogatoires ont permis de déjouer des complots imminents. Après avoir épluché près de six millions de documents fournis par la CIA, les enquêteurs du Sénat américain n’ont découvert aucun cas d’information inédite ayant permis de sauver des vies américaines et ce, en dépit de méthodes qui ont laissé certains détenus dans un état suicidaire et en proie à des hallucinations.

L’analyse des listes de passagers des vols aériens

Aucun avion ne peut décoller d’un aéroport occidental ou à destination de nos pays sans que la compagnie aérienne ait au préalable divulgué la liste des passagers et que les services de renseignement aient eu le temps de vérifier qu’aucun passager n’est interdit de vol.

Cette mesure simple a fait en sorte qu’aucune organisation terroriste n’a été capable de perpétrer le moindre attentat terroriste par voie aérienne depuis 2001.

Dans les transports en commun, les seuls attentats survenus depuis ont été par train (Madrid en 2004), puis dans le métro et dans un autobus londoniens en 2005, parce que toujours aussi vulnérables.

L’isolement des terroristes en prison

À l’exemple de la France, le gouvernement canadien compte exiger l’isolement carcéral individuel des personnes accusées ou condamnées pour terrorisme. Voilà une excellente mesure.

La guerre cybernétique

Si la Chine est capable d’ériger un coupe-feu qui isole sa population de la propagande occidentale, comment se fait-il que nous gouvernements soient incapables de faire de même à l’égard de la propagande djihadiste ?

De plus, les services de renseignements devraient scruter l’internet à la recherche des sites djihadistes. Ces sites devraient être rendus inopérants sur-le-champ : se contenter de surveiller ceux qui y ont accès est ridicule. Veut-on combattre le terrorisme, oui ou non ?

La surveillance de suspects

Toutes les personnes soupçonnées d’avoir combattu au sein des milices de l’État islamique sont sur surveillance policière.

Si cette surveillance a échoué à prévenir la tuerie de Charlie Hebdo et l’incendie du Hamburger Morgenpost cinq jours plus tard, elle semble avoir réussie en Belgique vendredi dernier par l’arrestation de trois comploteurs rentrés depuis peu de Syrie et qui préparaient un attentat imminent dans ce pays.

Une surveillance ciblée semble également avoir déjoué des projets d’attentats au Canada en 2006 et en 2013, de même que quatre ou cinq complots en Grande-Bretagne en 2014.

Il y a cinq ans, sur ce blogue, je me suis prononcé pour l’interdiction du port du masque en public (sauf pour des raisons climatiques ou médicales). Toute personne masquée devrait faire l’objet d’un contrôle d’identité.

Aujourd’hui, j’irais plus loin.

Une des caractéristiques vestimentaires des familles musulmanes intégristes, c’est que leurs femmes portent presque toujours le voile musulman intégral (celui qui couvre tout sauf les yeux). En dépit du proverbe voulant que l’habit ne fasse pas le moine, je dis plutôt que lorsque quelque chose a l’air d’un poisson, s’il sent le poisson et qu’il goûte le poisson, c’est probablement parce que c’est un poisson.

Cela ne veut pas dire qu’on doive présumer que tous les conjoints ou tous les fils d’une femme voilée intégralement sont des terroristes. Cela veut dire que le risque qu’ils le soient est considérablement plus élevé que dans la population en général.

Portaient le voile intégral, les femmes d’Oussama ben Laden, la soeur de Farid Benyettou, l’épouse en fuite d’Amedy Coulibaly, la mère et les soeurs d’Omar Khadr, entre autres.

De plus, toutes ces femmes appartiennent à des familles musulmanes de confession sunnite. Les épouses ou les mères des terroristes qui frappent les pays européens ou nord-américains ne sont jamais musulmanes de confession chiite. Tout simplement parce que le terrorisme international est financé principalement par l’Arabie saoudite, terre religieuse des Sunnites.

Par crainte d’être accusé de discrimination ou de persécution religieuse, aucun pays au monde ne possède de registre où sont inscrits tous les membres d’un clan familial sunnite où vit au moins une femme voilée intégralement.

Pourtant, au lieu de se diluer leurs ressources à espionner l’Humanité tout entière, les services de renseignements seraient mieux avisés de cibler ce qui est évident aux yeux de tous.

Mais qu’est-ce qui nous dit que les services de renseignements ne le font pas déjà ? Sont-ils obligés de tout nous dire ?

Pour être efficace, un tel registre doit être exhaustif. Et pour l’être, il ne peut être constitué que par des forces policières qui ont le pouvoir de demander l’identité à toute personne masquée sur la voie publique. Or ce pouvoir habilitant n’existe pas.

Disponibilité

Au moment où ces lignes sont écrites, le site Web du Service canadien du renseignement ne donne que le téléphone et le télécopieur comme moyens d’entrer en contact avec eux; aucune adresse électronique n’est précisée. Cela est un obstacle pour tout citoyen qui aimerait signaler l’adresse internet d’un site djihadiste.

Testé il y a quelques instants, le réceptionniste du bureau montréalais répond immédiatement lorsqu’un appel y est logé. Une telle disponibilité est excellente.

Conclusion

La lutte contre le terrorisme doit être axée sur la prévention et la surveillance. Si on en juge par les résultats, les efforts déployés sont nettement insuffisants. Or ce n’est pas une question de budget, mais de stratégie.

À juste titre, on isolera bientôt les prisonniers djihadistes en milieu carcéral. Mais la propagande haineuse des milieux terroristes circule encore trop facilement. À titre d’exemple, il est inconcevable que les milices de l’État islamique puissent recruter nos jeunes sur l’Internet.

De plus, la prévention passe également vers la revision de notre politique extérieure afin de tenir compte de la montée en puissance du ressentiment que cette politique crée et des dangers qu’elle fait subir à la population canadienne.

Quant aux services de renseignement, ils devraient cibler davantage les milieux fondamentalistes sunnites et cesser de disperser leurs énergies en épiant tout et n’importe quoi.

Références :
Attentats de Londres du 7 juillet 2005
Attentats de Madrid du 11 mars 2004
Belgique : deux djihadistes tués lors d’une opération antiterroriste
Caricatures de Charlie Hebdo: incendie criminel dans un journal allemand
Complot terroriste au Canada en 2006
Edward Snowden
Espionnage de la NSA: Merkel, addicte des portables… non sécurisés
Grande-Bretagne : « Quatre ou cinq complots terroristes » déjoués en 2014
Isoler les islamistes en prison : Ottawa songe à imiter la France
L’Arabie saoudite et le financement d’Al-Qaida
Profilage = efficacité
Projet d’attentats contre VIA Rail Canada de 2013
La torture par les États-Unis : un crime de guerre impuni
Surveillance globale

Parus depuis :
La radicalisation à la «mode» dans les prisons françaises (2015-01-24)
L’« infobésité » des services secrets britanniques (2016-06-08)
Le millefeuille de l’antiterrorisme français (2016-07-06)
« Contre le terrorisme, la machine législative est devenue folle » (2016-08-13)
Programme Hemisphere: des Canadiens surveillés de manière détournée? (2018-01-23)
L’alliance des Five Eyes veut des voies d’accès dans les applications cryptées (2020-10-11)

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Écrit par Jean-Pierre Martel


La tuerie de Charlie Hebdo : les lacunes du renseignement (3e partie)

17 janvier 2015

De la fin de la Deuxième Guerre mondiale jusqu’à l’effondrement du mur de Berlin, le monde se divisait en deux clans hostiles; les Communistes et le monde libre.

Depuis les attentats du 11 septembre 2001, nous sommes entrés dans un autre monde bipolaire; les terroristes et nous.

Tous les services de renseignement s’emploient à les différencier. Mais se peut-il qu’on ne naisse pas terroriste ? Et si on le devient, comment empêcher cette radicalisation ?

La plus grande menace terroriste qui plane actuellement sur les pays occidentaux est celle des milieux intégristes musulmans, mieux organisée et mieux financée que toute autre.

Si l’exclusion sociale prédispose à la criminalité, elle ne semble pas avoir grand importance dans la genèse du terrorisme, en dépit de ce que terrorisme en Europe semble suggérer.

Comme nous l’avons vu dans le second volet de cette trilogie, cette genèse nécessite seulement la rencontre de deux pré requis : un élément déclencheur et l’exposition à des idées radicales.

Si on devait enquêter auprès de chaque terroriste afin de savoir quel a été, dans son cas, cet élément déclencheur qui l’a bouleversé et rendu réceptif à une idéologie extrémiste violente, on obtiendrait sans doute autant de réponses qu’il aura de répondants.

Dans tous les cas où ce déclencheur est connu, il fait partie du contentieux déjà connu entre Musulmans et pays occidentaux. Ce contentieux s’articule autour de deux pôles : le conflit israélo-palestinien et la multiplication des guerres suscitées par les pays occidentaux dans des pays musulmans.

La guerre coloniale qu’Israël livre en Palestine

Tous les prétextes sont bons pour déposséder les Palestiniens de leurs terres, pour détruire leurs sources de revenus, pour massacrer ceux d’entre eux qui se révoltent, et pour implanter des colonies juives.

Fondamentalement, les dirigeants israéliens font aujourd’hui ce que les autorités britanniques ont fait pour affamer, puis décimer les peuples autochtones de l’Amérique du Nord afin de peupler leur territoire de braves pionniers européens.

Les 16 et 17 septembre 1982, alors que les camps palestiniens de Sabra et Chatila au Liban sont encerclés par l’armée israélienne et que la population y avait été désarmée, l’armée israélienne laisse entrer les milices chrétiennes qui y tueront hommes, femmes et enfants pendant deux jours. Le massacre fit entre 800 et 3 500 victimes. Ce carnage suscita une indignation généralisée, même en Israël.

À travers le monde, la population palestinienne est estimée à environ 11 millions de personnes, dont 3,7 millions en Palestine. On comprend donc l’importance de ce massacre pour ce peuple.

Au cours de la Seconde intifada, les soldats israéliens tiraient des balles réelles sur des adolescents arabes qui leur lançaient des pierres. De plus, l’armée israélienne postait des tanks devant les hôpitaux bombardés, tanks qui avaient pour mission de tirer sur les ambulances qui y apportaient des blessés.

Depuis quelques années, le gouvernement canadien est devenu l’allié inconditionnel d’Israël, contrairement au gouvernement américain qui exprime régulièrement des réserves précisément au sujet de cette politique coloniale.

Le Canada endosse totalement les politiques israéliennes en territoires occupés. Notre pays considère que les Palestiniens doivent éviter toute violence et accepter passivement la dépossession dont ils sont l’objet, comme les autochtones canadiens, idéalement, auraient dû le faire quand le colonisateur britannique les a confinés à des réserves indiennes.

Évidemment le zèle canadien expose notre pays (ses représentants et la population qui les porte au pouvoir), au ressentiment de ceux qui sont opposés violemment à cette politique coloniale.

La politique extérieure du gouvernement Harper augmente donc les risques que des attentats terroristes soient commis au pays.

La prévention du terrorisme au pays passe donc vers une révision de notre politique extérieure afin de la purger de ses éléments extrémistes et inutilement provocants.

Ceci étant dit, on aurait bien tort de croire qu’il suffirait d’adopter une politique extérieure rose-bonbon pour nous soustraire à la menace terroriste. Afin d’attirer du financement, les groupes terroristes ont besoin de réussir leurs attentats quelque part, n’importe où.

Les guerres suscitées en pays musulmans

La guerre du Golfe (1990-1991)

D’aout 1990 à février 1991, les États-Unis ont mené une coalition de 34 pays afin de délivrer un pays arabe, le Koweït, envahi par un pays voisin, l’Irak. Cette guerre justifiée par le Droit international a fait 1 100 morts et à peu près autant de blessés.

La guerre d’Afghanistan (2001-2014)

Les attentats du 11 septembre 2001 à New York étaient implicitement une déclaration de guerre contre les États-Unis. Leur réaction — la guerre d’Afghanistan — se justifiait donc par la légitime défense.

Dans un premier temps, les États-Unis se sont contentés de fournir une aide logistique aux rebelles Afghans (l’Armée du Nord) afin qu’ils chassent les Talibans du pouvoir.

Puis, à la demande des nouveaux dirigeants du pays, les pays occidentaux ont occupé l’Afghanistan.

Selon Wikipedia, cette guerre et cette occupation étrangère se sont soldées par la mort de plus de 20 000 personnes parmi la population civile.

La guerre d’Irak (depuis 2003)

La Guerre d’Irak et l’occupation militaire qui a suivi avaient pour but de libérer le pétrole irakien de l’embargo international dont il était l’objet et lui permettre d’être écoulé librement sur les marchés mondiaux afin d’en abaisser le prix.

Le décompte des pertes civiles en Irak varie selon les études. Il serait compris entre 100 000 et 1 450 000 morts.

La guerre civile libyenne (depuis 2011)

À l’occasion du Printemps arabe, divers soulèvements ont éclaté en Libye. Les pays membres de l’OTAN ont armé les rebelles et ont procédé au bombardement des défenses gouvernementales libyennes.

Après la chute du dictateur libyen, les mercenaires étrangers qui ont participé à ce renversement sont repartis avec leurs armes. Certaines de ces milices se sont mises depuis au service d’Al-Qaida au Sahel.

La guerre civile syrienne (depuis 2011)

Après avoir soutenu et armé les rebelles jugés modérés au régime de Bachar el-Assad, les États-Unis ont assisté, impuissants, à la montée en force des milices radicales de l’État islamique.

Celles-ci ont profité du vide créé par l’effondrement de l’état syrien pour créer une vaste zone de chaos et de violence en Syrie et en Irak.

Selon Wikipédia, le nombre de morts reliés à la guerre civile syrienne serait de l’ordre de 100 000 à 130 000.

La mondialisation du chaos

Le développement des moyens de transport a favorisé les échanges transfrontaliers. De nos jours, les appareils photo et les caméras captent des images prêtes immédiatement à être diffusées à travers le monde. Grâce à l’internet, textes et photos voyagent à la vitesse de la lumière.

Mais la mondialisation du commerce et de la finance s’est accompagnée de la confrontation d’idées et de cultures très différentes, voire opposées, qui s’ignoraient jusqu’ici en raison de l’éloignement.

Dans un premier temps, les gouvernements occidentaux ont puisé dans cette somme colossale d’information pour prouver leur supériorité morale et justifier la mission civilisatrice de leurs interventions militaires à l’étranger.

En semant la guerre et la désolation, les pays occidentaux ont favorisé les contrats d’armements au bénéfice de leur industrie militaire. Dans les pays atteints et les pays voisins, ils ont favorisé la fuite des capitaux et celle des cerveaux à leur avantage.

En contrepartie, ils ont favorisé l’émergence de dizaines de milliers de guerriers dont la seule expertise est dans l’art de piller, de violer et de détruire.

Ces barbares vivent à quelques heures de route d’Europe et à une dizaine d’heures de vol d’Amérique. Leurs idées sont à quelques millisecondes des ordinateurs de nos adolescents.

Selon un adage, celui qui sème le vent récolte la tempête. Il peut donc sembler naïf de penser qu’on peut semer la mort et la désolation sans susciter la haine et le désir de revanche.

C’est pourtant ce phénomène auquel nous assistons. Mais puisque nos gouvernements ne sont pas prêts à modifier leur politique étrangère prédatrice à l’égard des pays musulmans producteurs de pétrole, ils en sont réduits à essayer de contenir le mal qu’ils ont créé.

Dans le dernier texte de cette série, nos passerons en revue les moyens de lutte défensive contre le terrorisme.

Références :
Armée syrienne libre
Deuxième guerre civile libyenne
Guerre civile syrienne
Guerre d’Afghanistan (2001-2014)
Guerre d’Irak
Guerre du Golfe
La guerre en Irak ou l’aveuglement collectif américain
La mission canadienne en Afghanistan ou la perpétuation de coutumes arriérées
Le décès d’Ariel Sharon, criminel de guerre
Loi sur les Indiens
Mouammar Kadhafi
Première guerre civile libyenne
Syrie : la Turquie et les Etats-Unis à la rescousse de Kobané

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Écrit par Jean-Pierre Martel


La tuerie de Charlie Hebdo : les lacunes du renseignement (2e partie)

13 janvier 2015

Les attentats canadiens

Le deuxième texte de cette série passe en revue les divers attentats dont les Canadiens ont été victimes.

En raison de l’éloignement géographique du pays des zones de conflits armés à travers le monde, les attentats en Amérique du Nord se distinguent de ceux commis ailleurs.

Cette spécificité, loin de nuire à la compréhension du terrorisme, permet de le voir dans une perspective plus large.

La plus grave attaque terroriste de l’histoire du Canada a été l’explosion en 1985 d’un avion d’Air India en partance de Montréal.

Cet attentat a tué 320 passagers, dont 268 Canadiens (parmi lesquels se trouvait le pharmacien Gaston Beauchesne de la ville de Hull).

Les auteurs étaient des Canadiens de religion sikhe qui voulaient venger l’attaque menée par le gouvernement indien contre le Temple d’Or d’Amritsar, en juin 1984.

Les services de renseignement canadiens avaient été prévenus (notamment par le FBI) que la compagnie aérienne Air India devrait faire l’objet d’attentats à la bombe pour marquer le premier anniversaire de l’attaque du Temple d’Or. Pour cette raison, les services de renseignement canadiens avaient placé les comploteurs (qu’ils connaissaient) sous écoute électronique.

Mais on s’est contenté d’accumuler passivement des renseignements, laissant ainsi les comploteurs mener à terme leur projet.

Après l’attentat, en juin 1985, les dirigeants du service de renseignement ont donné l’ordre de détruire la majorité des données qu’ils possédaient afin de supprimer par le fait même l’évidence de leur incompétence. Pour cette raison, les principaux comploteurs accusés ont été innocentés par les tribunaux, pour insuffisance de preuve.

Les autres attentats canadiens et leurs motifs sont les suivants :
• ceux du Front de libération du Québec, dans les années 1960, prônant l’indépendance du Québec, (deux otages, dont un mort)
• la tuerie à l’Assemblée nationale du Québec, en mai 1984, visant à tuer les députés du Parti québécois (trois morts et treize blessés)
• la tuerie à Polytechnique de Montréal, le 6 décembre 1989, par haine du féminisme (14 mortes et 14 blessés)
• les divers attentats contre des médecins pratiquant l’avortement dans des provinces canadiennes-anglaises, dans les années 1990, dont plusieurs commis par un terroriste catholique américain (trois blessés)
• la tuerie de l’Université Concordia, en 1992, causée par la paranoïa d’un professeur (quatre morts et une blessée)
• la fusillade au Collège Dawson, en 2006, motivée croit-on par un comportement antisocial extrême (deux morts et 19 blessés)
• l’attentat du Métropolis, en 2012, destiné à tuer la nouvelle Première ministre et ses sympathisants, perpétré au nom du réveil des Anglo-Québécois (un mort et un blessé)
• l’attaque en voiture, le 20 octobre 2014, contre deux militaires à St-Jean-sur-Richelieu, conduite par pratiquant musulman radical déjà sous surveillance par les services de renseignement (deux morts, dont le terroriste, et un blessé)
• la fusillade du 22 octobre 2014 à Ottawa, causée par un pratiquant musulman radical auquel le passeport avait été confisqué par les autorités (trois morts, dont le terroriste).

En dépit de l’écoute électronique des comploteurs sikhs, de l’infiltration des milieux indépendantistes dans les années 1960, et de la surveillance ciblée des auteurs des attentats récents à St-Jean-sur-Richelieu et à Ottawa, aucun des attentats ci-dessus n’a été prévenu.

Même lorsque les services de renseignements savent qu’une personne veut commettre un attentat terroriste, la difficulté principale vient du fait que l’intention coupable présumée n’est pas un crime.

En absence de délit, on peut empêcher un terroriste étranger d’entrer au pays mais on ne peut pas arrêter et emprisonner à perpétuité un citoyen canadien sur la présomption de ses intentions.

Le seul moyen d’empêcher un attentat perpétré par un citoyen du pays est de l’arrêter au moment précis où il est sur le point de passer à l’acte.

Cela est apparemment très simple dans les séries télévisées et les films hollywoodiens. Dans les faits, c’est autre chose, autant au Canada qu’en France (où les auteurs des attentats récents étaient également connus pour leur dangerosité).

Analyse des causes

Comme on vient de le voir, il est faux de croire que les attentats terroristes sont l’apanage des fondamentalistes musulmans puisque le pire cas canadien est l’oeuvre de Sikhs et que la majorité des autres cas ne concernent pas des Musulmans.

Ce n’est pas non plus le résultat d’un conflit entre classes sociales. Osama Ben Laden appartient à une riche famille d’entrepreneurs saoudiens. Les cas canadiens comprennent des hommes d’affaires (Air India, Métropolis), un universitaire (Concordia), un militaire (Assemblée nationale du Québec) et des personnes occupant différents métiers.

Si la maladie mentale est à la source des attentats de Concordia et de Dawson, elle n’est pas en cause dans la majorité des autres cas.

Ce qui est commun, c’est le discours haineux. Tous ces gens, ont été choqués par un ou plusieurs incidents qui les ont rendus vulnérables à la radicalisation de leurs idées.

Ainsi la communauté sikhe du Canada a été scandalisée par l’assaut indien contre un temple sacré dans lequel des insurgés sikhs s’étaient retranchés.

C’est le cas des terroristes antiavortement, influencés par la propagande violente et l’intolérance de la Droite américaine, qui n’hésite pas à comparer les médecins avorteurs à des tueurs en série qui pratiquent leurs homicides en toute impunité.

Longtemps financé par les États-Unis, Osama Ben Laden leur est devenu hostile lorsque ce pays a établi une base militaire en Arabie saoudite. Selon lui, il était inacceptable que des soldats impies foulent le sol sacré de l’Islam.

Chez les auteurs parisiens de l’attentat à Charlie Hebdo, les humiliations infligées aux détenus musulmans par des militaires américains à la prison d’Abou Ghraib ont servi de déclencheur à leur radicalisation entre 2003 et le début de 2005.

Dans les années 1960, la rhétorique gauchisante qui dramatisait les humiliations dont étaient victimes les Québécois francophones a très certainement été à la cause de la naissance du Front de libération du Québec.

De manière analogue, la propagande haineuse publiée par les médias canadiens-anglais contre les gouvernements indépendantistes du Québec explique probablement les attentats terroristes à l’Assemblée nationale du Québec et au Métropolis.

Ce qu’il faut donc retenir, c’est deux prérequis indispensables dans tous les cas autres que la maladie mentale; un élément déclencheur et l’exposition à des idées radicales. L’un sans l’autre n’est pas suffisant.

Dans le cas de l’auteur de l’attaque à St-Jean-sur-Richelieu, on ne saura jamais ce qui fut son élément déclencheur : on sait seulement qu’il fréquentait la mosquée al-Imane, où l’intégrisme musulman sunnite est prêché à une poignée de fidèles.

Dans le dernier texte de cette série, nous verrons les pistes de solution.

Références :
Anti-abortion violence
Attentat du Métropolis
Front de libération du Québec
Fusillade au collège Dawson
Fusillade du 8 mai 1984 à l’hôtel du Parlement du Québec
Fusillade du 22 octobre 2014 à Ottawa
James Charles Kopp
Tuerie de l’École polytechnique de Montréal
Massacre annoncé
Rouleau était surveillé par la GRC et le renseignement canadien
Scandale d’Abou Ghraib
Tuerie de l’Université Concordia
Un imam controversé à Saint-Jean-sur-Richelieu
Vol 182 Air India

Paru depuis :
Le terrorisme et l’extrémisme violent au Canada (2018-05-20)

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Écrit par Jean-Pierre Martel


La tuerie de Charlie Hebdo : les lacunes du renseignement (1re partie)

12 janvier 2015

La première partie de ce texte vise à démontrer que les auteurs des attentats de la semaine dernière à Paris étaient bien connus des services de renseignements et qu’ils avaient même fait l’objet de condamnations par les tribunaux civils pour leur association avec des groupements terroristes.

Le texte débute par la présentation d’une personne qui n’a joué aucun rôle dans les attentats eux-mêmes, mais qui est à l’origine de la radicalisation de deux des trois terroristes impliqués dans cette affaire. Son cas est relaté ici puisqu’il servira à l’examen des causes et solutions à cette radicalisation.

Farid Benyettou

À 16 ans, Farid Benyettou habite chez sa soeur. Celle-ci vit également avec son époux — un Algérien intégriste relié à Al-Qaida au Maghreb islamique — qui sera expulsé l’année suivante vers l’Algérie pour avoir projeté de perpétrer des attentats pendant la Coupe du monde en France.

En 2003, Farid Benyettou est préposé d’entretien le jour et imam autoproclamé le soir.

C’est dans la mosquée parisienne d’Adda’wa (aujourd’hui détruite) qu’il recrute des jeunes dans le but d’aller combattre les soldats occidentaux auprès d’Al-Qaida en Irak.

Emprisonné en 2005 sous l’accusation d’être associé à des malfaiteurs en vue de préparer des actes terroristes, il est condamné en mars 2008 à six ans fermes de prison en tant qu’organisateur principal de cette filière djihadiste. Il a été libéré en 2011, soit six ans après le début de sa détention provisoire.

Âgé aujourd’hui de 33 ans, il est étudiant infirmier, diplômable en mars 2015, sans toutefois avoir de possibilité de travailler dans le secteur public en raison de son casier judiciaire.

Les frères Kouachi

En 2003, les frères Kouachi habitent ensemble dans le 19e arrondissement de Paris, où ils font connaissance de Farid Benyettou.

Convaincu par ce dernier, le plus jeune des frères décide de participer au djihad en Irak.

Le 25 janvier 2005, au départ d’un périple qui devait le mener à Damas (en Syrie), puis en Irak, Chérif Kouachi est intercepté par police française et condamné trois ans plus tard pour association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste.

Ayant purgé sa peine en préventive, il est libéré à l’issue de son procès. Toutefois, c’est durant sa captivité qu’il rencontre Amedy Coulibaly (le troisième homme des attentats de Paris de janvier 2015).

En 2010, les forces policières déjouent un complot estimé à faire évader l’auteur d’une série d’attentats à Paris en 1995. Parmi les suspects arrêtés, les frères Kaouachi seront libérés pour insuffisance de preuve.

Au cours de leur incarcération préventive, ils retrouvent Amedy Coulibaly, que Chérif a connu en prison en 2005.

En 2011, Saïd Kouachi (l’ainé des frères) fait un stage de deux semaines dans un camp d’entrainement d’Al-Qaida au Yémen en 2011. Les services de renseignement américains informent leurs collègues français de ce fait.

Les deux hommes se retrouvent donc sur une liste d’interdiction de vol à destination des États-Unis.

Amedy Coulibaly

Amedy Coulibaly est un malfaiteur multirécidiviste.

Condamné en 2004 pour vol à main armée, il fait la connaissance de Chérif Koauachi en prison. Ce dernier y est détenu en raison de sa participation à la filière djihadiste de Farid Benyettou.

En juin 2010, Amedy Coulibaly est arrêté par les services antiterroristes. Il est accusé d’avoir participé à un projet d’évasion de l’auteur d’une vague d’attentats commis en 1995 dans le métro et RER parisien pour le compte du Groupe islamique armé (GIA, algérien).

Lors de la perquisition de son domicile en marge de cette affaire, les enquêteurs retrouveront 240 cartouches de kalachnikov. Condamné pour possession d’arme illégale, il est libéré en mars 2014.

Références :
Amedy Coulibaly
Attentat à « Charlie Hebdo » : « Vous allez payer car vous avez insulté le Prophète »
Attentat en France: au cœur de la traque, la filière des «Buttes Chaumont»
Attentats: le budget illisible du Renseignement
Charlie Hebdo : une faille béante dans le Renseignement
Chérif Kouachi, ami d’enfance d’un tueur de l’État islamique
Chérif Kouachi faisait déjà parler de lui en 2005
EXCLUSIF. “Charlie Hebdo” : l’itinéraire de Coulibaly, le troisième homme
Coulibaly et les frères Kouachi, itinéraire d’un trio terroriste
Filière des Buttes-Chaumont
L’avocat du co-prévenu de Chérif Kouachi: En 7 ans cet homme est devenu un monstre
Les frères Chérif et Saïd Kouachi ont bien été formés au Yémen
Les frères Kouachi étaient connus de Washington
Mohammed Merah
Un ticket pour le jihad

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Écrit par Jean-Pierre Martel