L’inéligibilité de Sarkozy : les juges vs la souveraineté du peuple

Publié le 22 octobre 2025 | Temps de lecture : 4 minutes

Introduction

Les tribunaux, les prisons, la police et l’armée constituent les quatre moyens répressifs de l’État.

Dans le cas des magistrats, c’est l’État qui les nomme, qui les paie, qui construit et entretient leurs lieux de travail (les palais de Justice), qui leur fournit tout le personnel de soutien dont ils ont besoin dans l’accomplissement de leurs tâches, et qui rend exécutoires leurs décisions.

À la lumière de l’affaire Sarkozy, on doit se demander jusqu’où peuvent aller les tribunaux lorsqu’ils sanctionnent les délits ou les crimes commis par des politiciens. Et ce, sans devenir des complices du pouvoir.

L’égalité de tous devant la loi

Lorsqu’un politicien commet un crime (un homicide, par exemple) ou un délit (ex.: un excès de vitesse), il devrait être puni comme n’importe quel citoyen.

L’application de ce principe pose problème lorsqu’une législation vise à sanctionner des actes qui ne peuvent être commis que par des politiciens, comme la fraude électorale (qui est beaucoup plus large que la fraude financière).

De plus, parmi les sanctions que peut imposer une Cour constitutionnelle, il y a la peine d’inéligibilité. Priver un politicien du droit de se présenter à une élection correspond à une peine de mort politique.

Tout comme la peine capitale, elle ne devrait être prononcée que dans des cas gravissimes, à partir de preuves hors de tout doute raisonnable. Malheureusement, ce n’est pas le cas.

Ce qu’on voit plutôt, particulièrement en Europe de l’Est, ce sont des tribunaux qui prononcent des peines d’inéligibilité à partir de simples soupçons qui, une fois l’élection passée, se révèlent faux.

Et pour justifier l’arbitraire des magistrats, la Cour européenne des droits de la personne rendait le 6 mars 2025 un jugement dans lequel elle affirme que le droit à des élections libres et démocratiques n’est pas garanti dans le cas d’une élection présidentielle.

En d’autres mots, les juges ont parfaitement le droit de priver le peuple de son droit de choisir leur président.

De plus, il suffit que les détenteurs du pouvoir discrétionnaire d’intenter des poursuites reçoivent l’ordre de s’en abstenir dans le cas du chef de l’État ou de ses ministres, pour faire en sorte que le bras vengeur de la Justice ne s’abatte que sur ceux qui menacent le pouvoir établi.

En 1997, à l’époque où Roland Dumas était président du Conseil constitutionnel de France, celui-ci a interdit à tout juge d’instruction de se mêler des affaires pénales d’un président en exercice.

Conclusion

Lorsqu’on confie à la magistrature le pouvoir de condamner quelqu’un à une peine d’inéligibilité, cela correspond au pouvoir des juges de priver le peuple de son droit de choisir ses dirigeants.

Ce pouvoir exceptionnel se justifie exclusivement dans un cas très précis : lorsqu’on est condamné pour tentative de coup d’État.

Par définition, un coup d’État a pour but de s’emparer du pouvoir indépendamment de la volonté populaire. C’est une négation de la souveraineté du peuple et conséquemment, un crime contre la Démocratie qui mérite l’emprisonnement et la peine de mort politique, soit l’inéligibilité.

Les peines d’inéligibilité prononcées ou confirmées cette année contre François Filion, Marine Le Pen et Nicolas Sarkozy — et celles prononcées antérieurement contre Henri Emmanuelli (en 1996), Alain Juppé (en 2004), Jean Tiberi (en 2013), Yamina Benguigui (en 2016), Serge Dassault (en 2017), Thomas Thévenoud (en 2017), Léon Bertrand (en 2018), Jérôme Cahuzac (en 2018), et Patrick Balkany (en 1997 et en 2023) — sont autant d’abus de pouvoir de la part de la magistrature française.

L’idée que les magistrats seraient dotés d’une supériorité morale qui justifierait leur pouvoir de régenter la démocratie est l’expression du mépris d’une caste sociale richissime qui cache ses propres turpitudes derrière le secret dont elle s’entoure.

Paru depuis : Chantage à la sextape : Gaël Perdriau, maire de Saint-Etienne, condamné à quatre ans de prison ferme et à cinq ans d’inéligibilité avec exécution immédiate (2025-12-01)

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Écrit par Jean-Pierre Martel


Les tribunaux, remparts de la Démocratie 
par Jacques Légaré, ph.d. en philosophie politique

Publié le 1 avril 2025 | Temps de lecture : 3 minutes


Préambule : Voici un texte que Jacques Légaré a écrit en réponse au texte ‘L’inéligibilité de Marine Le Pen’. En raison de sa qualité, j’ai choisi d’en faire un billet ‘officiel’ du blogue.

À l’avenir, je n’écarte pas la possibilité de faire de même pour d’autres commentaires de lecteurs.

 
La position de Monsieur Martel, pourtant bien argumentée en droit comparatif, aboutit au pire : l’électorat devient juge.

Or la démocratie grecque, il y a 2500 ans, donnait à l’Ecclésia qui est l’assemblée du peuple en démocratie directe, un pouvoir judiciaire.

Elle fit exécuter sur le champ les généraux, pourtant au retour d’une grande victoire, qui s’étaient présentés devant elle pour recevoir tous les honneurs de la victoire. Accusés de n’avoir pas secouru leurs propres marins naufragés, ils furent exécutés sur le champ.

Très mauvais quand une institution cumule des pouvoirs qui nécessitent leur stricte séparation pour agir en toute cohérence, à défaut de sérénité. Les juges au tribunal sont plus sereins que les élus en assemblée.

Les juges ne sont pas mus par l’intérêt, la passion partisane ou le carriérisme. Uniquement par la vertu de justice et celle qu’ils réussissent à trouver dans les lois qui les encadrent et qu’ils appliquent.

Enfin, l’électeur veut voir sur son bulletin de vote que des gens intègres. Pas de criminels condamnés qui viennent par la bande lui commander une immunité par le suffrage universel.

La célébrité ou la notoriété ne sont pas des chèques en blanc pour l’impunité

Trump a réussi ce coup fumeux et vicieux, très vicieux. Les Canadiens, et même les Américains, ont déjà commencé à en manger les fruits pourris.

Que des mains propres comme candidats. Dehors les arrivistes, les populistes, les fascisants, les fourbes et les ratoureux qui détournent les fonds publics ou mentent comme ils respirent.

Seuls Poutine, Orban et Musk les appuient publiquement, de même que leurs partisans, indignes parce qu’ils sont justement des crapules (dans les faits avérés ou dans l’âme).

Pas beau notre avenir qui s’en vient.

Terminons donc ce texte par les alexandrins suivants :

La Justice est vertu avant d’être appareil.
Qui l’oublie, bien ou mal est devenu pareil.
On ne peut se laver par la célébrité,
Sinon un grand mafieux deviendra député.
En éducation même on aura pédophile
Un élu bien servi en enfants à la file.

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Écrit par Jean-Pierre Martel