Le plomb dans l’eau potable des écoles

13 août 2019


 
Introduction

En février 2019, l’Institut national de Santé publique du Québec (INSPQ) publiait un rapport au sujet de la présence de plomb dans l’eau potable des écoles et garderies du Québec.

Ce rapport a été rendu public le mois dernier.

Puisque la nouvelle année scolaire débutera dans quelques semaines, que doit-on en penser ?

Résultat des études

Il n’existe pas de seuil en deçà duquel le plomb est inoffensif; à n’importe quelle dose, il est neurotoxique. Évidemment, il l’est moins à dose faible.

Depuis l’interdiction de l’essence au plomb, de la peinture au plomb et des canalisations en plomb, les taux de plomb dans le sang des Canadiens ont diminué de 70 % entre 1978 et 2013.

Chez les enfants, les taux moyens de plomb dans le sang sont de 0,67 µg par décilitre au Canada et 1,0 µg/dl au Québec. Cette différence résulte de l’exposition plus grande au Québec à l’ensemble des sources possibles.

Puisque ce contaminant est omniprésent dans notre environnement, les organismes sanitaires ont adopté arbitrairement des taux maximums à ne pas dépasser dans l’eau du robinet.

Au Canada, ce seuil était autrefois de 25 µg/l, réduit à 10 µg/l en 2013 et réduit de nouveau à 5 µg/l en mars 2019 (soit après la rédaction du rapport de l’INSPQ).

Cette norme est trompeuse puisque les taux sont mesurés après avoir fait couler l’eau pendant cinq minutes, ce qu’à peu près personne ne fait dans la vraie vie.

De 2013 à 2016, on a fait des prélèvements dans 436 écoles et garderies du Québec. Le dépassement de l’ancienne norme de 10 µg/l a été observé dans 3 % des établissements et dans 8,5 % des cas lorsqu’on applique la nouvelle norme plus sévère de 5 µg/l.

Le pire cas (350 µg/l) avait été observé dans une garderie. Le rapport ne précise pas s’il s’agit d’une garderie publique ou privée. On a aussi mesuré 174 µg/l dans le cas d’une école.

Qu’arrive-t-il si on mesure le plomb sans laisser couler l’eau pendant 5 minutes ?

À Québec, en 2015-2016, des prélèvements effectués dans 29 écoles ont révélé une médiane très faible dans l’eau de premier jet (moins de 2 µg/l). Toutefois, dans un cas, on a mesuré une concentration de 559 µg/l.

À Montréal, en 2017, une étude effectuée auprès de 51 écoles a mesuré une médiane de 4,5 µg/l dans l’eau de premier jet et un dépassement de la teneur de plomb de 10 µg/l dans 15,7 % des cas. Le maximum mesuré fut de 20 µg/l.

Ailleurs au pays, les taux médians sont habituellement plus faibles qu’au Québec, mais les valeurs excessives sont parfois stratosphériques (par exemple, 13 200 µg/l).

Contribution relative du plomb scolaire

Il existe de nombreuses sources de plomb dans notre environnement.

On en trouve dans l’eau potable domestique. Il y en a dans la poussière de peinture au plomb libérée lorsqu’on détruit une maison ou qu’on décape un vieux meuble.

La littérature scientifique démontre que chez les enfants âgés entre 6 mois et 7 ans, les sols et les poussières constituent la principale source d’exposition au plomb, et non l’eau potable (sauf dans le cas des teneurs très élevées).

On sait avec certitude qu’il existe une corrélation inverse entre les taux sanguins de plomb et le quotient intellectuel. On sait que le plomb dans les breuvages et la nourriture fait augmenter les taux sanguins. La grande inconnue concerne l’importance relative de l’apport alimentaire parmi toutes les sources possibles.

En somme, il faut réduire la teneur du plomb dans l’eau potable. Mais ce n’est pas parce que l’eau potable d’une école dépasse la norme fédérale actuelle (5 µg/l) qu’il faut condamner ses robinets.

Voilà pourquoi l’INSPQ estime que la réduction du plomb dans l’eau potable des écoles doit être poursuivie sans qu’il soit nécessaire d’adopter des mesures exceptionnelles et urgentes.

Plus de transparence S.V.P.

L’INSPQ a choisi de taire le nom des établissements dans lesquels des concentrations excessives de plomb ont été observées afin de ne pas provoquer de panique ou des comportements ‘irrationnels’ chez les parents concernés.

Est-ce irrationnel de vouloir éviter que son enfant boive de l’eau qui dépasse de 70 fois la teneur maximale recommandée ?

Pour un décideur public, cacher la vérité est une solution de facilité qui trahit un mépris du peuple.

Une réaction parentale irrationnelle serait, par exemple, de changer son enfant d’école ou de le retirer du système public afin de l’envoyer au privé ou de faire son éducation à domicile.

Dans les faits, il est facile de faire comprendre à ce parent qu’il suffit de donner à son enfant de l’eau embouteillée ou traitée par un système capteur de métaux lourds.

De plus, la révélation des noms des écoles et garderies fautives oblige ces institutions à agir. Une pression qu’elles n’ont pas lorsqu’on cultive le secret.

Selon la professeure Michèle Prévost de l’école Polytechnique de Montréal, dans 95% des cas, lorsqu’il y a trop de plomb dans l’eau potable, le problème se situe dans les 50 derniers centimètres de la robinetterie. Donc il n’est pas nécessaire de changer toute la tuyauterie de l’école.

De plus, on peut très bien changer un nombre limité de robinets par étage et indiquer clairement que seuls ceux-ci peuvent servir d’abreuvoirs.

On peut donc remettre à plus tard l’intention de changer les robinets qui ne servent qu’à se laver les mains ou à prélever l’eau des employés responsables de l’entretien.

Références :
Des taux inquiétants de plomb dans l’eau des écoles
Eau contaminée: Legault est préoccupé, mais pas alarmé
Nos écoles ont du plomb dans l’eau
Plomb
Présence de plomb dans l’eau des écoles et des garderies
Recommandations pour la qualité de l’eau potable au Canada
Silences de plomb

Parus depuis :
Le Québec sous-évalue le plomb dans l’eau (2019-10-16)
Plomb dans l’eau: des milliers de garderies échappent à tout contrôle (2019-11-14)

Détails techniques : Olympus OM-D e-m5 mark II, objectif M.Zuiko 25mm F/1,2 — 1/80 sec. — F/1,2 — ISO 500 — 25 mm

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Écrit par Jean-Pierre Martel