Sécurité des piétons : réduire la vitesse ou implanter le péage ?

Le 22 décembre 2022

Introduction

Au cours de ‘la Crise des piétons’ de 2019, le responsable de la mobilité de l’administration Plante déclarait qu’une collision automobile impliquant un piéton, c’est toujours entre deux usagers et que la responsabilité est partagée entre les deux.

Trois ans d’inertie

Critiquée pour son inaction, l’administration municipale dévoilait cette année-là les deux mesures phares qu’elle entendait mettre en œuvre pour protéger la vie des piétons.

Premièrement, on devait dépenser 58,5 millions$ sur trois ans — de 2019 à 2022 — à l’achat de feux pour piétons.

De tels feux sont utiles si on part de la prémisse selon laquelle les piétons se font happer parce qu’ils ne respectent pas feux de circulation ‘ordinaires’.

Ajouter des feux qui leur sont spécifiquement adressés est donc un moyen logique de les aider à respecter les règles de circulation et à réduire le nombre d’entre eux qui se font happer par leur faute.

De plus, sur une période de huit ans, on devait saupoudrer ici et là des poussières de secondes pour accorder aux piétons plus de temps pour traverser les rues à proximité des écoles, des CHSLD, des hôpitaux et des centres communautaires.

Évidemment, cette mesure devait s’appliquer uniquement là où se trouvent des feux de circulation. Ce qui n’est pas le cas à la rencontre des rues de Rouen et Parthenais (où eut lieu l’accident qui couta la vie à Mariia Legenkovska).

Réduire la vitesse de la circulation automobile

Depuis 2019, l’administration Plante a diminué le nombre d’agents affectés au respect des règles de circulation automobile.

En 2018, les agents de circulation donnaient douze-mille contraventions pour excès de vitesse dans les zones scolaires de la métropole. En 2022, ils en ont émis 5 299. Moins de la moitié.

De plus, les demandes de citoyens pour ajouter des passages piétons supervisés par des brigadiers scolaires ont été presque systématiquement refusées.


 
Mais tout cela ne doit pas nous faire oublier que des piétons sont blessés presque partout sur l’ile de Montréal.

Afin d’améliorer le bilan meurtrier des rues montréalaises, certains proposent une réduction systématique de la vitesse maximale permise, passant, par exemple, de 50 km/h à 30 km/h.

Effectivement, les études ont démontré que réduire la vitesse de la circulation diminuait de manière importante la gravité des collisions automobiles. Chaque réduction de 5 km/h réduit de 15 % le nombre des décès.

Toutefois, dans un contexte où la circulation est trop dense, réduire la vitesse de manière généralisée entraine des conséquences catastrophiques.

Prenons un exemple.

S’il faut 30 minutes pour parcourir le trajet du domicile au travail, cela signifie qu’après trente minutes, l’auto arrive à destination, se stationne, et cesse d’encombrer les rues.

Si on réduit de moitié la vitesse permise, cela veut dire que cette voiture — comme toutes celles qui circulent en ville — demeurera deux fois plus longtemps en mouvement avant de se stationner.

En somme, c’est doubler le nombre apparent de véhicules sur nos rues.

Aussi souhaitable que soit cette mesure en temps normal, c’est la dernière chose à faire quand le problème fondamental est l’excès de voitures. Puisqu’alors, on provoque la paralysie presque complète de la circulation automobile à Montréal.

Bref, dans le contexte actuel, c’est une fausse bonne idée.

Quant à l’idée de limiter la vitesse à 30 km/h, mais seulement dans certains endroits comme dans les zones scolaires, c’est déjà le cas. Précisons que seules les portions de rues qui longent le terrain d’une école font partie de sa zone scolaire. Or le lieu où Mariia Legenkovska a été tuée est situé à deux quadrilatères au-delà de cette zone.

De plus, moins de cinq pour cent des accidents impliquant des piétons surviennent dans les zones scolaires. Donc toute politique sérieuse visant à assurer la sécurité des piétons doit s’appliquer sur l’ensemble du territoire montréalais.

Le péage

Il y quelques années, Luc Ferrandez, maire de l’arrondissement du Plateau-Mont-Royal, adopta toute une série de mesures destinées à décourager la traversée de son quartier par des automobilistes venus d’ailleurs.

Ce qui suscita la colère des commerçants dont la clientèle venait d’un peu partout. Mais ce qui n’empêcha pas M. Ferrandez d’être réélu par une forte majorité de ses concitoyens, heureux de la paix retrouvée dans leur milieu de vie.

L’indignation et la colère populaire provoquées par la mort de Mariia Legenkovska ont incité l’administration Plante à renchérir au-delà de ses timides mesures de 2019; c’est ainsi que la mairesse de Montréal s’est engagée à ‘plateauiser’ Montréal. En somme, à étendre à toute l’ile les réformes à la Ferrandez.

Le péage est le seul moyen d’alléger la circulation automobile à Montréal.

Décourager la traversée de la ville aux automobilistes venus d’ailleurs est effectivement le moyen le plus efficace de réduire l’excès de voitures sur nos rues, cause profonde des accidents impliquant des piétons.

Les considérations politiques

Le pouvoir d’implanter le péage sur tous les ponts menant à Montréal est détenu par le ministère des Transports du Québec.

Donc si la ville de Montréal veut qu’un péage soit imposé sur tous les ponts qui mènent à l’ile et que les sommes générées servent à l’amélioration du transport en commun, elle doit soit demander à la ministre des Transports de le faire ou demander que Québec lui délègue ce pouvoir.

La ministre des Transports devrait s’y opposer farouchement puisque si elle délègue ce pouvoir à Montréal, elle craindra que la ville de Québec veuille faire la même chose à l’embouchure du 3e lien, signant ainsi l’arrêt de mort de ce projet cher au gouvernement…

Pour forcer la main de la ministre, il suffit que Montréal adopte un règlement qui ne permette l’accès aux rues de la ville reliées au pont Jacques-Cartier qu’aux camions de livraison qui arrivent de ce pont.

Implicitement, c’est l’équivalent d’interdire la circulation automobile sur ce pont. Une mesure qui devrait irriter la ministre, mais contre laquelle elle n’a aucun pouvoir.

En somme, pour réduire la dangerosité de circulation automobile, il faut des mesures radicales qui sont contraires à l’idéologie woke de l’administration Plante.

En déclarant Montréal ‘ville sanctuaire’ pour les migrants du monde entier et en prêchant le vivre ensemble de même que l’inclusivité, on voit mal l’administration Plante décourager l’accès des rues de la ville aux véhicules étrangers. Philosophiquement, une telle ‘xénophobie’ est une hérésie.

Voilà pourquoi les piétons montréalais qui craignent pour leur sécurité devront militer dans un organisme comme Piétons Québec s’ils veulent être entendus.

Références :
Ces automobilistes pressés
La crise des piétons tués durera huit ans
L’excès de voitures dans nos rues
Moins de contraventions pour vitesse sont données aux automobilistes en zone scolaire
Montréal ville refuge : la déclaration adoptée, des gestes concrets réclamés
Sécurité des piétons : Plante se dit fière de « plateauiser » Montréal

Parus depuis :
Zones scolaires, zones dangereuses (2022-12-23)
Brigadière heurtée par une automobiliste : « On attend quoi, au juste ? » (2023-01-12)
L’intersection où est morte la petite Mariia toujours aussi dangereuse (2023-05-06)
Embouteillages et pollution : New York prévoit un péage urbain en 2024 (2023-08-08)

Complément de lecture :
Les gros véhicules augmentent le risque de décès (2023-09-01)

Pour consulter tous les textes de ce blogue consacrés à la sécurité des piétons, veuillez cliquer sur ceci.

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