Montréal est une ville hostile aux vieux piétons
L’année 2019 se solde par un 24e piéton tué par un véhicule. C’est cinq de plus qu’au moment du décès du 19e mort, survenu aussi récemment qu’à la mi-novembre denier.
Nombre annuel de piétons tués par accident automobile
Depuis dix ans, le nombre de piétons tués par une voiture a varié de onze à vingt par année, avec un creux durant les années Coderre et un rebond sous l’administration actuelle, sans qu’on sache pourquoi.
On peut émettre l’hypothèse que les vieux piétons — les plus souvent frappés à mort — ont des comportements imprudents qui doivent être réprimés, mais qui ne l’ont pas été assez sévèrement ces toutes dernières années.
Nombre annuel de constats d’infraction émis contre des piétons
Année | N. de contraventions |
2010 | 15 545 |
2011 | 16 024 |
2012 | 18 962 |
2013 | 24 012 |
2014 | 22 708 |
2015 | 20 462 |
2016 | 22 304 |
2017 | 23 861 |
2018 | 22 826 |
Depuis 2010, le nombre de contraventions contre des piétons a augmenté de près de moitié.
À l’époque où la mortalité routière envers les piétons semblait diminuer, on pouvait croire que cette répression policière portait fruit.
Mais puisque cette mortalité revient en force en dépit d’une répression importante, on doit envisager d’autres explications.
On doit notamment se demander si les règles de circulation, conçues au siècle dernier, alors que l’auto était roi, ne devraient pas être repensées à une époque caractérisée par le vieillissement de la population.
En d’autres mots, est-il possible qu’il soit difficile pour une partie des piétons, notamment ceux âgés, de se déplacer à Montréal sans risquer leur vie et sans enfreindre des règles de circulation qui ne sont pas conçues pour eux ?
En deux mots, est-il possible que Montréal soit une ville hostile aux vieux piétons ?
À l’heure actuelle, le temps laissé aux piétons pour franchir les rues de Montréal est basé sur une vitesse de traversée de 1,1 mètre par seconde.
Depuis des années, on sait qu’un vieux se déplace plutôt à la vitesse moyenne de 0,8 mètre par seconde.
Conséquemment, même à 0,8 mètre, une partie d’entre eux — notamment ceux qui se déplacent à l’aide d’une canne — n’en sont pas capables. Tout comme certains handicapés et les enfants.
Avec la norme actuelle de 1,1 mètre par seconde, entre 30 et 50 % des personnes âgées n’y parviennent pas.
L’administration Plante se propose d’abaisser la norme actuelle à 0,9 mètre par seconde (ce qu’on sait d’avance être insuffisant). Et ce seulement à proximité des écoles, des CHSLD, des hôpitaux et des centres communautaires.
De plus, on mettra huit ans à reprogrammer les feux en conséquence. Huit ans, c’est long.
Avec l’augmentation du parc automobile consécutif à la dégradation du transport en commun (mille pannes par année dans le métro, bordel aux trains de banlieue) et en raison du vieillissement de la population, cette crise va en s’aggravant.
Non seulement 2019 est une année exceptionnelle, mais durant ses six dernières semaines, il est mort autant de piétons dans les rues de Montréal que dans la moitié de toute l’année 2015.
En ne prenant pas au sérieux cette crise, l’administration Plante fait preuve d’irresponsabilité.
Références :
La crise des piétons tués durera huit ans
Le 19e mort
Parus depuis :
How Helsinki and Oslo cut pedestrian deaths to zero (2020-03-16)
Piétons happés à mort : « On a effacé dix années de gains » (2022-03-05)
Chute importante des contraventions liées à la sécurité routière (2022-12-15)
Piétons happés à Montréal : l’automne meurtrier (2023-02-15)
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