Les accords de libre-échange avec l’Ukraine

21 février 2024

Après un premier accord de libre-échange conclu en 2016, le Canada et l’Ukraine en ont signé une deuxième version le 23 septembre dernier.

Selon Ottawa, cet accord permettra aux entreprises canadiennes de participer plus activement à la reconstruction de l’Ukraine. Ce qui n’est pas pour demain.

Pour l’instant, l’entente fait que le Canada a éliminé ses droits de douane sur 99,9 % de ses importations provenant d’Ukraine et qu’en retour, celle-ci a fait de même pour 86 % de ses importations canadiennes.

Le commerce international a subi d’importants bouleversements depuis quelques années en raison de la pandémie au Covid-19 et des sanctions occidentales contre la Russie.

On peut soupçonner que ces bouleversements ont empêché l’Ukraine de profiter pleinement de la libération de ses échanges avec le Canada et donc, que ce pays est demeuré un partenaire commercial très secondaire pour notre pays.

Il en est autrement en Europe.

Au début de la guerre russo-ukrainienne, le peuple polonais a fait preuve d’une hospitalité exemplaire à l’égard des réfugiés ukrainiens qui fuyaient le théâtre de la guerre.

Toutefois, l’opinion publique s’est retournée contre eux lorsque cette immigration massive y a provoqué une grave pénurie de logements.

Après avoir écoulé en l’Ukraine son important arsenal militaire qui datait de l’époque soviétique, le gouvernement polonais est maintenant ulcéré de voir qu’on organise dans ce pays des processions qui célèbrent annuellement la mémoire des milices pro-nazies ukrainiennes qui, sur ordre SS, ont massacré des dizaines de milliers de Polonais au cours de la Deuxième Guerre mondiale.

Pour aider l’économie ukrainienne en favorisant ses exportations, l’Union européenne a décidé de dispenser les camionneurs ukrainiens de l’obligation de posséder le permis couteux qui est normalement exigé pour transporter des marchandises au sein du marché commun.

En décembre dernier, les camionneurs polonais bloquaient la frontière ukrainienne afin de protester contre cette concurrence déloyale puisqu’eux sont obligés de posséder ce permis.

D’autre part, depuis deux décennies, l’Union européenne et l’Ukraine signent des ententes économiques qui visent progressivement à une intégration règlementaire et économique préparatoire à une adhésion formelle (et lointaine) de l’Ukraine au marché commun.

À terme, l’agriculture ukrainienne bannira les mêmes pesticides et les mêmes insecticides que ceux interdits dans l’Union européenne et appliquera les mêmes normes quant au bien-être animal.

D’ici là, le parlement européen adopte un certain nombre de mesures d’exception qui visent à aider dès maintenant l’économie de ce pays.

La plus récente de ces mesures est le règlement 2013/1077, en vigueur pour un an à partir du 6 juin 2023.

Il prévoit que les droits antidumpings appliqués normalement aux importations ukrainiennes ne seront pas perçus au cours de cette période et, de manière générale, toutes les mesures de défense commerciales actuelles seront suspendues.

Récemment, les agriculteurs polonais ont bloqué une centaine de routes et de voies ferrées à la frontière ukrainienne afin de protester contre les importations agroalimentaires ukrainiennes jugées incontrôlées.

Parallèlement, les agriculteurs français érigent depuis trois semaines des barricades pour protester contre les importations massives de poulet ukrainien.

Dispensée des normes de production européennes, l’industrie de la volaille est dominée en Ukraine par un oligarque dont l’entreprise est enregistrée dans un paradis fiscal et qui est dirigée à partir d’une pétromonarchie. Cette entreprise réussit à vendre du poulet à trois euros du kilo alors que le prix coutant des éleveurs français est de sept euros du kilo.

En réalité, la France importe moins de poulet frais ou congelé d’Ukraine que la plupart des autres pays européens. Mais le poulet ukrainien se retrouve dans les produits dérivés (ex.: les croquettes congelées de poulet) qui inondent l’Europe, dont le marché français.

Face à ces protestations, le gouvernement Macron s’est engagé à défendre bec et ongles les agriculteurs français. Ce qui ne fait pas oublier que les représentants de la France ont consenti aux mesures adoptées par l’Union européenne en guise de solidarité avec l’Ukraine sans en prévoir les conséquences.

Références :
Accueil des réfugiés : l’usure de la bonne volonté
Frontière polonaise bloquée : « La situation est catastrophique » pour l’Ukraine
La Chambre des communes adopte un accord de libre-échange avec l’Ukraine
La nostalgie nazie en Ukraine
La Pologne ne fournit plus d’armes à l’Ukraine pour se concentrer sur son armement
Le loup dans le poulailler de l’Europe
Les agriculteurs polonais déversent des céréales ukrainiennes, Kyiv en colère
Règlement 2023/1077 du Parlement européen
Trudeau signe l’accord de libre-échange Canada-Ukraine

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Écrit par Jean-Pierre Martel