L’histoire d’un parfum

Publié le 5 mai 2012 | Temps de lecture : 3 minutes

Les cellules olfactives — responsables de l’odorat — sont les seules cellules nerveuses qui relient directement l’extérieur du corps au cerveau. Toutes les autres cellules doivent faire synapse, c’est-à-dire transmettre à d’autres cellules nerveuses, l’information destinée au cerveau.

Alors qu’on demandait à l’actrice Marilyn Monroe ce qu’elle portait au lit, celle-ci répondit : « Du Chanel No 5, évidemment ».

Déclassé en 2011 par J’adore de Dior, le Chanel No 5 était depuis 1921 le parfum le plus vendu en France. C’est encore le parfum le plus vendu au monde.

Son histoire débute au lit, plus précisément dans celui du Grand-duc Dimitri Pavlovich, fréquenté au début du XXe siècle par Coco Chanel. C’est par l’intermédiaire de ce cousin du Tsar Nicolas II que Mme Chanel fait la rencontre platonique du plus grand « nez » de Saint-Pétersbourg, Ernest Beaux.

Elle lui commande un parfum révolutionnaire. Elle ne veut pas que du point de vue olfactif, les femmes essaient de se faire passer pour des fleurs. Elle veut un parfum de femme à odeur de femme. « Je veux un parfum artificiel, je dis bien artificiel comme une robe, c’est-à-dire fabriqué. Je suis un artisan de la couture. Je ne veux pas de rose, de muguet, je veux un parfum qui soit un composé ».

À l’époque, les parfums étaient bâtis principalement autour d’une seule note florale. Ce sera la première innovation du parfum : il intégrera volontairement une touche synthétique.

M. Beaux présenta deux séries d’échantillons, numérotés de 1 à 5 et de 20 à 24. La couturière préféra le numéro 5. Cette préparation contenait un produit chimique — le méthyl-2 undécanal, à la vague odeur d’orange — parmi ses 80 ingrédients.

De la recette, jalousement conservée dans un coffre-fort, on ne connait que deux autres ingrédients : la rose de mai et le jasmin de Grasse.

La deuxième innovation du parfum sera son contenant. Coco Chanel refuse la surcharge décorative, le luxe ostentatoire. Elle veut un flacon sobre, au design dépouillé, conforme au style d’avant-garde — qu’on appelle aujourd’hui Art Déco — style qui devait triompher quatre ans plus tard à l’Exposition internationale des Arts Décoratifs et industriels de Paris.

La troisième innovation concerne son nom. La mode était aux noms de parfum poétiques, lyriques, voire ronflants comme ceux des bombonnes de purificateurs d’air d’aujourd’hui.

À la question « Quel nom allez-vous lui donner ? », elle répond : « Je lance ma collection le 5 mai, cinquième mois de l’année, laissons-lui le numéro qu’il porte. Et ce Numéro 5 lui portera chance ».

Peut-on parler ici de pressentiment féminin ?

Références :
Nº 5 de Chanel
Anonyme, Chanel No 5 – Le parfum du siècle, La revue, 2011, 18: 170.

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2 commentaires à L’histoire d’un parfum

  1. Jacynthe Marsolais dit :

    Quelle coincidence cet article sur Chanel No 5 : c’était le parfum de ma mère et nous avons appris hier soir qu’elle vit ses derniers jours… Ça me rappelle quand je mettais le nez dans son manteau de fourrure pour sentir cette odeur magnifiquement féminine.

    • Je suis désolé que mon texte soit publié à un si mauvais moment pour votre famille.

      Ceci étant dit, je tiens à te remercier pour ton témoignage : en effet, les souvenirs olfactifs, agréables ou non, si difficile à décrire autrement que par des références à d’autres odeurs, sont parmi les souvenir les plus vivaces de l’expérience humaine.

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